Une start-up valorise les talents des autistes à haut potentiel à Nice
Créée en mars, Avencod, start-up en développement informatique, travaille pour Amadeus. Avec des retours positifs. D’autres grandes entreprises s’intéressent à cette jeune pousse sociale
Derrière leurs écrans, Fiona, Jules* et Olivier sont concentrés. Pas un bruit. Le calme règne dans les locaux d’Avencod. Une jeune start-up sociale créée en mars dans la pépinière d’entreprises de la plaine du Var à Nice. « Le téléphone ne sonne jamais, il ne sert que pour les appels sortants », glisse Laurent Delannoy. Histoire de ne pas perturber ses « collaborateurs », des travailleurs handicapés dont certains sont des autistes à haut potentiel. Pour créer des conditions propices à leur bien-être au travail, il évite tout imprévu. Ce consultant informatique a décidé avec sa compagne Laurence Vanbergue de créer une « entreprise adaptée » pour permettre à ces femmes et ces hommes d’accéder à l’emploi. De s’épanouir professionnellement. Malgré leurs « différences ». « On utilise leurs talents pour proposer un service dont les entreprises ont besoin : du développement informatique. L’objectif c’est de faire du social, rentable », résume-t-il. Et c’est plutôt bien parti. Amadeus, la plus grosse entreprise du département a fait confiance à Avencod. « Ils nous ont donné un logiciel à créer ». Au bout de quatre mois de travail, les premiers retours sont positifs. Autre motif d’encouragement : la satisfaction des salariés.
Une entreprise adaptée
« Avant de créer Avencod, on s’est rapproché du centre de ressources qui travaille sur l’autisme à Lenval. » Pour éviter les faux pas. C’est Andreia Santos, psychologue, spécialiste des troubles du spectre de l’autisme qui les guide. « Il y a des profils très différents, mais on trouve chez ces personnes des difficultés de communication, d’interaction et des intérêts et comportements particuliers. Au niveau des compétences, certains ont des QI élevés, et peuvent avoir une expertise dans l’informatique. Mais ils ont du mal à intégrer une entreprise parce que l’entrée dans le monde du travail et la vie professionnelle sont très basées sur la capacité à communiquer, à interagir et à s’adapter aux exigences. » Chaque jour, à 14 h 30, Fiona, Jules et Olivier « tchatent » avec deux ingénieurs d’Amadeus. Des séances de questions-réponses. « Ce sont toujours les deux mêmes interlocuteurs. Avec la psychologue, nous sommes allés les rencontrer. Elle leur a présenté ce qu’était l’autisme. »
« Je suis reconnu pour ce que je suis »
Les pressions professionnelles, les relations avec les clients sont assumées par les fondateurs d’Avencod. « Pour que nos collaborateurs puissent se consacrer uniquement à leur travail. » Concentration, sens du détail... ils remplissent leur mission. Avec « bonheur ». À en croire leur témoignage. Sollicités pour une interview, ils ont préféré nous adresser un texte par mail. « Avant, lorsque dans ma recherche d’un emploi, l’on ressentait mon atypie, c’était surtout négatif : j’étais souvent “trop”… quelque chose, explique Jules. Depuis que je suis chez Avencod, mes “trop” sont regardés comme des qualités et, dès lors, je suis reconnu pour ce que je suis. Ni plus ni moins. » Ici, il se sent à sa place. Quant à Fiona, elle apprécie l’intérêt du travail, dans un environnement sans stress. L’insertion professionnelle peut-elle avoir un effet positif sur les personnes présentant des troubles de l’autisme? « Il n’y a pas de but thérapeutique direct, mais lorsqu’on est respecté dans son travail, note Andreia Santos, l’effet indirect est là. On est plus épanoui et plus serein. »
SOPHIE CASALS scasals@nicematin.fr