Guillaume Denoix de Saint-Marc : « Nous sommes tous des écorchés vifs »
Guillaume Denoix de SaintMarc préside l’Association française des victimes du terrorisme, qui a créé en cette cérémonie, coorganisée depuis avec la Fenvac.
Cette cérémonie a-t-elle répondu à vos attentes ?
Oui, car toutes les victimes étaient représentées. Leur voix a été mise en avant, ainsi que celle de l’Etat. Ce mariage a bien fonctionné, pour un vrai moment de rassemblement. C’était notre cérémonie à nous, associations de victimes. Et l’ensemble des participants a trouvé qu’elle avait de la hauteur, de la force.
Comment ont été choisies les prises de parole ?
On a tenu à ce que les noms soient lus par des personnes touchées de près par les attentats. On n’a pas relu les différentes prises de paroles avant, et sans que l’on se concerte, toutes se complétaient ! Chacune parlait de la même histoire, sous un angle différent. Il ne faut pas avoir peur de la voix des victimes : elle est pleine de sens, de sensibilité et de profondeur.
Qui était invité ?
Etaient formellement invitées toutes les victimes dont nous avions les coordonnées, ainsi que les autres victimes par voie de presse, et les personnes de la société civile souhaitant y participer. Nous avons envoyé invitations, la Fenvac sans doute autant, et les autres associations (onze, PrayForParis...) ont envoyé les leurs. Il y avait une dizaine de représentants des victimes de Nice, venues avec l’association Promenade des Anges ou à titre individuel. Elles sont venues nous remercier pour cette cérémonie ; cela veut dire qu’elles y ont trouvé un sens.
Aviez-vous reçu beaucoup de réponses favorables ?
Notre association a reçu près de réponses positives. Tous ceux qui ont pu sont venus. Mais beaucoup ne pouvaient pas à cause de contraintes logistiques ou horaires - l’heure nous a été imposée en fonction du calendrier du Président. Etant des associations, nous ne sommes pas en mesure de financer les déplacements, et chacun vient par ses propres moyens. Certains viennent chaque année du Tchad ou du Congo...
Comprenez-vous que certains refusent d’y participer par choix ?
Je le comprends tout à fait. C’est compliqué de venir, ce n’est pas naturel. Il y a aussi une méconnaissance de l’esprit de cette cérémonie : beaucoup croyaient que c’était organisé par les pouvoirs publics. Ceci étant, ces victimes ont la possibilité de se taire si elles le souhaitent. Cela ne les empêche pas de se sentir proches de nous. Chacun a sa façon de gérer le deuil, de trouver un chemin qui peut être tortueux. Moi-même, il m’est arrivé de ne pas vouloir venir...
L’annonce de la refonte du fonds de garantie est une vraie bonne nouvelle ?
Cela va dans le bon sens. Pour nous, ce fonds était un adversaire ! Cela faisait des années que l’on parlait de dysfonctionnements. Notre requête a enfin été entendue et de réels changements sont annoncés. Même si depuis vingt-sept ans que je suis victime du terrorisme, j’ai appris à être prudent avec les discours.