« Si tout le monde était vacciné, il n’y aurait pas de grippe »
Le Dr Pierre-Marie Tardieux, urgentiste, est aussi responsable de l’unité mobile de gérontologie du CHU de Nice.
Quels constats par rapport aux dernières épidémies ?
Le nombre de passages a encore augmenté, nous sommes à plus de par jour, mais surtout nous nous retrouvons, chaque année, face à un nombre croissant de personnes très âgées. C’est la génération du papy-boom. On a amené ces personnes au grand âge ; elles ont aujourd’hui , ans… La plupart vivent à domicile, elles sont suivies par leur médecin traitant, et bien soignées pour leurs pathologies : insuffisance cardiaque, respiratoire, diabète… Le problème se pose lorsqu’elles rencontrent un virus, comme la grippe. La fièvre, les douleurs, la fatigue font qu’elles mangent moins, se déshydratent, sont affaiblies d’un point de vue immunitaire, et développent des complications graves, liées à des surinfections et à la décompensation de leurs maladies.
À quoi sont dus les nombreux décès que l’on observe ?
Les décès directement liés à la grippe sont très rares. Les patients meurent des complications, respiratoires en particulier.
On a l’impression que le vaccin ne protège pas complètement ?
Si tout le monde était vacciné, il n’y aurait pas de grippe ! Par ailleurs, s’il est vrai que le vaccin protège moins bien les personnes âgées, que les plus jeunes ( % contre %, du fait de leur système immunitaire moins performant), il réduit dans tous les cas les complications et le risque de décès. C’est démontré.
Le problème de l’hospitalisation, récurrent, est une nouvelle fois pointé du doigt…
Dans une société qui a fait le choix de diminuer le nombre de lits, pour développer l’ambulatoire, il est difficile d’hospitaliser tout le monde dans des périodes comme celles-ci ! Classiquement, % des patients des urgences nécessitent d’être hospitalisés, actuellement ce chiffre peut aller jusqu’à % ! Sachant qu’un service de médecine compte environ lits, lorsque l’on est face à la nécessité d’hospitaliser personnes, il faudrait dans l’absolu vider deux services pour y parvenir !
Jusqu’en , il existait un « service grippe », qui permettait de répondre à ces situations épidémiques. Qu’est-il devenu ?
Effectivement, on ouvrait à cette époque, pendant trois mois, un service éphémère de quinze lits dédiés à ces malades. Mais, on a arrêté ce dispositif très coûteux, et a été mis en place le dispositif « hôpital en tension ».
En quoi consiste-t-il ?
Il permet aux responsables des services d’urgence d’alerter l’ARS lorsqu’ils sont confrontés à un afflux de malades et au manque de lits. Ce qui doit se traduire par une déprogrammation des interventions, de certaines hospitalisations et par le rappel du personnel, pour répondre à l’urgence.
Dans les faits, ce n’est pas si simple...
Effectivement, et le problème des urgences est récurrent. Il faudra à terme trouver des solutions. L’état doit créer le bon système, celui qui réponde à la question : comment vider les urgences et placer les patients au bon endroit ? Et pour revenir à la grippe, se poser peut-être la question de rendre la vaccination obligatoire.