Nice-Matin (Cannes)

Nouvelle gauche

L’ancien frondeur a largement gagné la primaire de gauche en laminant Manuel Valls. Le plus dur l’attend : rassembler le Parti socialiste, menacé d’implosion au profit d’Emmanuel Macron

- THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Benoît Hamon a remporté largement la primaire de la gauche. Il devient le candidat officiel du PS à la présidenti­elle.

Même les télés n’ont pas fait semblant d’entretenir un faux suspense. La victoire de Benoît Hamon était inscrite dans les chiffres du premier tour et elle s’est très logiquemen­t amplifiée hier soir. Mercredi déjà, sans être spécialeme­nt plus finauds que la moyenne, les journalist­es conviés à rencontrer Manuel Valls dans son QG parisien l’avaient bien compris. Malgré quelques rodomontad­es d’usage, de pur réflexe, l’ancien Premier ministre avait intégré sa défaite. Il était étrangemen­t serein, détendu, d’une humeur badine rarissime chez lui, comme délivré d’un poids. Il avait plié les gaules.

Un projet lisible

Cette issue était au fond assez prévisible. Comme ceux de droite avant eux, les électeurs de gauche ont choisi le candidat incarnant avec le plus de franchise idéologiqu­e, quitte à placer le curseur très loin, leurs aspiration­s cardinales. Quel que soit le regard critique qu’on peut porter sur le projet de Benoît Hamon, on lui doit cette justice : il a pris le temps de bâtir un programme étayé, novateur, qui réinvente une société. Utopiste ou pas, peu importait au fond. C’est lui qui a mis les sujets sur la table, qui a imposé les débats qu’il souhaitait. Bref, qui a su incarner une espérance, là où Manuel Valls, candidat dans l’urgence, s’est surtout contenté d’incantatio­ns laïques, si louables soient-elles, et de formules parfois creuses pour défendre sa volonté de concilier « le coeur et la raison », sans réussir à faire vraiment comprendre comment il s’y prendrait. Une victoire, pour en faire quoi ? Tel est désormais l’immense défi qui se pose à l’ancien trublion et aiguillon de la gauche, qui en ramasse aujourd’hui les oripeaux.

Pris en étau

Si la participat­ion s’est quelque peu ragaillard­ie au second tour, elle ne donne pas au champion de la gauche une légitimité terrible. Benoît Hamon pourra-t-il jouer un rôle à la présidenti­elle, ou devra-t-il se contenter d’y sauver les meubles, pris en étau par Macron et Mélenchon ? Les jours à venir seront décisifs pour voir si se dessine, ou non, un rassemblem­ent de circonstan­ce des socialiste­s. En un mot, si le PS est encore en mesure de résister à une déferlante macroniste en passe d’imposer une seconde primaire à gauche, à grands coups de sondages assassins cette fois. Hier soir, Benoît Hamon a voulu croire que les gauches ne sont pas « ir réconcilia­bles». Manuel Valls a fait un pas, timide, sur le chemin d’un ralliement sous conditions. Mais l’accolade forcée et expédiée des deux hommes n’a pas respiré la sincérité. Tout reste à défricher.

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(Photo MaxPPP)

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