Nice-Matin (Cannes)

À la fédé, ambiance (presque) fair-play entre les deux camps

À Nice, les «Onagagné!» des pro-Hamon ont couvert la déception du camp Valls, au premier rang desquels figurait le premier secrétaire fédéral. « Deux gauches » qui s’efforcent de ne faire qu’une

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr S. C. scasals@nicematin.fr

C’est la salsa du Hamon! » Le slogan fuse sur un air de boutade. Xavier Garcia n’a pourtant pas le coeur à danser. Mais à Nice, le premier secrétaire fédéral garde le souci de... fédérer. Malgré la déception. Il avait clairement affiché son soutien à Manuel Valls. Or hier soir, à Nice comme ailleurs, ce sont les partisans de Benoît Hamon qui affichent une mine réjouie. « On a gagné ! On a gagné ! » L’euphorie gagne les rangs. Au diable la retenue : rue Biscarra, au siège de la fédération PS, les jeunes socialiste­s saluent jusque sur le perron ce sacre sans appel. La métaphore est tentante, au terme d’un dimanche rythmé par l’actu sportive. « Federer a gagné, la France est championne du monde et Hamon est notre candidat ! », résume Mélanie Russo, responsabl­e des jeunes avec Hamon dans les A.-M., en se congratula­nt avec ses pairs.

« Un nouvel espoir »

Le coup de sifflet de final a retenti à 20 h 41. Le président de la haute autorité de la primaire est apparu sur France 2, projeté sur grand écran. « C’est Nadal-Federer », lâche un militant. Au vu de l’écart final, ce serait plutôt France-Norvège. « Benoît Hamon : 58 % ». L’assistance n’attend même pas l’annonce du score de Manuel Valls. Les hamonistes se tombent mutuelleme­nt dans les bras. Les vallsistes ont le visage fermé. « Bravo à vous », souffle néanmoins Xavier Garcia à Mélanie Russo, Ils cherchent l’entrée. S’engagent dans la rue Sincaire, puis rebroussen­t chemin. Jusqu’à tomber sur l’affiche qui indique le chemin vers le bureau de vote Ségurane à Nice. Dimanche dernier ce couple de retraités niçois ne s’était pas déplacé pour la primaire citoyenne. Comme de nombreux électeurs de gauche. Mais hier, ils ont tenu à voter. « Pour choisir le candidat du Parti socialiste à l’élection présidenti­elle », glisse la septuagéna­ire. Elle a suivi le débat de l’entre-deux-tours, « très intéressan­t au niveau des idées ». Alors Hamon ou Valls ? Elle ne dévoilera pas son choix.

« Hamon, c’est du rêve » Dans la file d’attente, Gilbert, est quant à lui plus disert. «Je vais voter pour Valls, il est beaucoup plus réaliste. Hamon, c’est du rêve, je ne suis pas d’accord avec son idée de revenu universel, ni celle de régularisa­tion des étrangers. » Un peu plus d’une heure après l’ouverture du bureau Ségurane 2, ils sont une quarantain­e dans une accolade fair-play. « Bravo à vous aussi », réplique la jeune femme. Paul Cuturello et Christine Mirauchaux ont battu la campagne pour Benoît Hamon dans le départemen­t. Tous deux affichent un sourire réjoui. « Les électeurs se sont mobilisés entre les deux tours, parce qu’ils ont saisi qu’il y a une nouvelle offre politique à gauche, se félicite des quartiers Barla, Risso, Riquier... à avoir glissé leur bulletin dans l’urne. « Il y a plus de monde, c’est net ». Registre en main, Reine est ravie. « On a plein de gens qui n’étaient pas le conseiller municipal. Maintenant qu’on a un candidat enfin désigné, on va pouvoir vraiment travailler et parler à l’ensemble de la gauche! » « On le sent sur les réseaux sociaux : un nouvel espoir s’est levé pour le peuple de gauche », abonde l’ex vice-présidente de Région. Même dans les Alpes-Maritimes où Valls avait viré en tête au premier tour, Hamon venus dimanche dernier. » Cette militante ne se lance pas dans de grandes analyses politiques, pour elle, l’explicatio­n tient au bulletin... météo. « Aujourd’hui il fait beau, alors ça finit huit points devant. Mélanie Russo l’assure : elle l’a « senti au contact des jeunes dans les quartiers, à Las Planas ou aux Moulins. Même s’ils ne croient pas à la politique, ils sont sensibles aux propositio­ns novatrices de Benoît Hamon » . Pour son porte-parole départemen­tal, Yann Librati, ce scénario est « au-delà de ce dont on avait rêvé. Ça fait relativise­r les sondages... » Et de glisser un tacle aux esprits chagrins : « Continuez donc à dire qu’on est des utopistes, qu’on n’a aucune chance ! »

« Saut dans le vide »

Côté vallsistes, ce second tour était la chronique d’une défaite annoncée. «Onajoué notre carte jusqu’au bout. Mais l’arithmétiq­ue après le premier tour était implacable », soupire Xavier Garcia. S’il respecte le camp des vainqueurs, le premier secrétaire fédéral avoue : « Dans les semaines qui viennent, je ne serai pas le premier porte-parole de Benoît Hamon dans ce départemen­t... » Son prédécesse­ur à ce poste, Patrick Allemand, avait soutenu Manuel Valls après Vincent change tout, dimanche dernier il pleuvait des cordes. »

Pas foule à l’hôtel de ville Pluie ou pas, cette septuagéna­ire est de retour, au bureau de Peillon. « Je n’ai rien à dire », répète-t-il, préférant rester à l’écart du buffet. Comme un symbole, Manuel Valls prononce son discours à l’antenne dans l’indifféren­ce générale. Marie-Hélène Raybaud, militante, confie son scepticism­e : « C’est un grand saut dans le vide. » Michèle Spizzo, « vieille militante » auto-proclamée, ne cache pas sa déception : « Le PS n’est plus le PS. Hamon, il fait le lit de Macron. » Fouzia Ayoub, déléguée aux sections, s’efforce de positiver : « Il va falloir qu’on se rassemble. Qu’on se retrouve sur les fondamenta­ux. » La politique est un sport. Et pour espérer jouer la gagne, le PS devra ressouder le collectif. Pour l’heure, « coach » Garcia confie son amertume : « L’histoire retiendra que la stratégie payante revient à ceux qui ont sapé le travail du gouverneme­nt. Malheureus­ement, le rapport de la gauche au pouvoir dans ce pays n’est toujours pas résolu. C’est ça qui me désole le plus. Pas la défaite de Manuel Valls. Car les défaites, ça arrive en politique... » l’hôtel de ville de Nice où il n’y a pas foule. « J’ai voté Hamon au premier tour, mais je l’ai trouvé un peu léger pendant le débat. Et puis, avec l’affaire Fillon, on a la trouille du FN. Valls a l’expérience du pouvoir, il pourra sans doute donner plus de force à une gauche qui n’est pas frondeuse, pour s’opposer à Marine Le Pen. » De l’autre côté du Var, au bureau du centre-ville de Saint-Laurent, Marc Orsatti, conseiller municipal d’opposition accueille les électeurs avec un large sourire. Un quadra, socialiste depuis toujours, l’interroge sur la participat­ion. « À midi, on avait le double de votants, par rapport à dimanche dernier », se félicite l’élu. Le Laurentin prend ses deux bulletins. File vers l’isoloir. À sa sortie, il ne fait pas secret de son choix. « Manuel Valls, parce qu’il a plus d’expérience. Mais avec la candidatur­e de Macron, ça va être compliqué. C’est à la gauche de s’unir... le problème c’est qu’elle n’a jamais su le faire.»

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(Photo Frantz Bouton)  h  hier à la fédération PS . À la proclamati­on des résultats, l’enthousias­me du camp Hamon tranche avec le scepticism­e des vallsistes. (Photo Jean-François Ottonello) Au bureau Ségurane, dans le quartier du Port à Nice, les électeurs sont au...

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