Libre-échange avec le Canada : le feu vert des eurodéputés
L’accord contesté a été voté par 408 voix pour et 254 voix contre. Il devra encore avoir l’assentiment des 38 Parlements nationaux
Malgré de vives contestations, le Parlement européen s’est prononcé mercredi en faveur du CETA, le tumultueux accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. Avec ce vote favorable, une grande partie du texte devrait très prochainement être appliquée de manière provisoire, le temps qu’il soit ratifié par l’ensemble des Parlements nationaux et régionaux de l’UE, ce qui prendra des années. Réunis en session plénière à Strasbourg, les eurodéputés ont été 408 à se prononcer en faveur du texte, 254 à voter contre et 33 à s’abstenir. Dans le même temps, environ 700 opposants au CETA, selon la police, manifestaient dans Strasbourg jusqu’au Parlement européen. Plusieurs dizaines d’autres ont bloqué l’entrée du bâtiment dès le matin. « Dire oui au CETA, c’est piétiner le peuple », clamait une banderole, tandis que d’autres affirmaient « Démanteler la démocratie? Hors de question ! ». Les adversaires du CETA le jugent anti-démocratique, trop favorable aux multinationales, léger sur l’environnement ou encore dangereux pour l’agriculture européenne. Le texte – appelé Accord économique et commercial global (AECG, en anglais CETA) – supprimera 99 % des droits de douane. Mais il prône également la coopération en matière sociale, sanitaire et environnementale.
Les socialistes divisés
L’accord était soutenu par les eurodéputés de droite, ainsi que les libéraux et la plupart des socialistes. Les Verts, l’extrême gauche, l’extrême droite et certains socialistes ont voté contre. Le groupe Socialistes et démocrates (le deuxième du Parlement) a été particulièrement divisé sur ce texte. Son président, l’Italien Gianni Pittella, y était favorable «à titre personnel », mais la délégation française, par exemple, a fustigé « une menace directe pour l’emploi », qui « n’intègre pas l’urgence climatique et environnementale, ni le principe de précaution ». Les écologistes sont tout aussi sévères, à l’image du Français Yannick Jadot qui voit dans le CETA « l’aboutissement d’un processus de dérégulation, de privatisation de la norme ».
« Un traité scélérat » pour Marine Le Pen
Pour la présidente du Front national, Marine Le Pen, le CETA est « un traité scélérat » qui détruira « des milliers d’emplois », après avoir été « soigneusement caché à tous les citoyens ». Parmi les principales cibles des critiques, les tribunaux arbitraux amenés à être mis en place une fois que le traité aura été définitivement approuvé. Ces juridictions pourront être saisies par une entreprise afin de demander réparation à un Etat ayant pris une réglementation contraire à ses intérêts. La balle est maintenant dans le camp des Vingt-Sept. « Les Parlements nationaux [...] doivent rejeter le traité», a déjà lancé Karine Jacquemart, de l’ONG Foodwatch, qui juge « le CETA est tout aussi mauvais que le Tafta » ou TTIP, l’accord de libreéchange négocié par l’UE avec les Etats-Unis. Encore plus contesté, cet accord a d’ores et déjà été gelé avec l’élection de Donald Trump à la Maison-Blanche.