Marine Le Pen refuse d’être entendue
Protégée par son immunité parlementaire, elle s’est soustraite aux enquêteurs dans l’affaire des emplois présumés fictifs de collaborateurs d’eurodéputés FN
Changement de tactique. Après avoir dénoncé une « cabale politique » ,Marine Le Pen a tout simplement, dans l’affaire des emplois présumés fictifs d’une vingtaine de collaborateurs de députés européens Front national, opté finalement pour la politique de la chaise vide. Convoquée mercredi à l’Office anticorruption de la police judiciaire, à Nanterre, pour être entendue dans le cadre d’une audition libre, la présidente du FN a refusé de s’y rendre, a-t-on appris hier. « Comme pendant les régionales, je ne répondrai pas pendant la campagne électorale, cette période ne permettant ni la neutralité ni la sérénité nécessaire au fonctionnement correct de la justice », s’est justifiée la présidente du parti d’extrême droite. « Il faut revenir à un usage républicain qui est celui d’une trêve [judiciaire] . Que ces auditions aient lieu après les élections » présidentielle et législatives, a renchéri son avocat, Me Rodolphe Bosselut, s’étonnant d’une «subite précipitation» des investigations à deux mois de la présidentielle. Protégée par son immunité de députée européenne, Marine Le Pen ne peut être contrainte pour être entendue, ni soumise à aucune mesure coercitive. Il faudrait au préalable que les juges d’instruction fassent une demande de levée d’immunité, qui serait ensuite soumise au Parlement européen.
« Le respect de l’Etat commence là »
Une position fortement condamnée quelques heures plus tard par le Premier ministre, Bernard Cazeneuve : Marine Le Pen « ne peut se placer au-dessus des lois de la République », a-t-il estimé. « Aucun responsable politique ne peut refuser, s’il est républicain, de déférer aux convocations de la justice. Le respect de l’autorité de l’État et des institutions commence par cela. Lorsqu’on prétend aux plus hautes responsabilités, on ne peut se placer au-dessus des lois de la République. » Dans cette affaire, les juges d’instruction, saisis depuis décembre après une enquête du parquet de Paris, cherchent à déterminer si le Front national a mis en place un système pour que le Parlement européen prenne en charge, via des contrats d’assistants parlementaires, des salaires de cadres ou d’employés du parti en France. Cela concerne notamment deux proches de Marine Le Pen elle-même : sa cheffe de cabinet, Catherine Griset, qui a été mise en examen pour recel d’abus de confiance ; et son garde du corps, Thierry Légier, qui est ressorti de garde à vue sans avoir été inculpé.
Une autre enquête en cours
Dans une autre enquête visant le Front national, sur des soupçons d’escroqueries au préjudice de l’État lors de la campagne des législatives 2012, Marine Le Pen avait refusé à deux reprises de se rendre à une convocation des juges d’instruction avant la tenue des élections régionales en 2015. Elle avait ensuite été placée sous le statut de témoin assisté. Dans ce dossier, le Front national et deux de ses cadres ont été renvoyés au tribunal correctionnel, mais les dates du procès n’ont pas encore été fixées.