Un Azuréen invente une appli pour mesurer les ondes
Arnaud Legout et son équipe d’Inria à Sophia Antipolis lancent Electrosmart. Avec votre smartphone vous pouvez être informé de votre niveau d’exposition à cette pollution invisible
Arnaud Legout est chercheur. Alors, forcément, quand il s’intéresse à un sujet, il le décortique. A fond. « Tout est parti d’un questionnement personnel. Avec le développement de la Wi-Fi, du Bluetooth... j’ai voulu en savoir plus sur la pollution électromagnétique. Connaître l’impact des micro-ondes. » lu des articles, des études, des rapports, » raconte-t-il dans son bureau avec vue sur les bâtiments d’Inria, plantés au coeur de la pinède de Sophia Antipolis. « L’OMS classe les ondes électromagnétiques dans la catégorie 2b, c’est-à-dire potentiellement cancérogène pour l’homme. Une corrélation existe mais la relation de causalité n’est pas prouvée ». Ce qui laisse le chercheur en informatique un peu sur sa faim.
Une volonté de transparence
« Les études datent du milieu des années 1990. Comment en 20 ans, n’a-t-on pas été capable de conclure ? En France, si on regarde des cancers qui pourraient être liés aux ondes, comme le gliome, il faut montrer que ce public a été exposé, établir une causalité. Mais de quels outils dispose-t-on ? Des questionnaires sont envoyés aux patients, pour leur demander combien de temps ils ont utilisé leur téléphone portable et de quel côté ils le mettent. » Autre source d’information : celle émanant des opérateurs. « Sur 1 000 utilisateurs, ils fournissent les temps de communication. Mais ces données ne prennent pas en compte l’environnement autour. Il y a plus de 10 ans c’était le téléphone qui exposait le plus aux ondes, en émettant jusqu’à 2 watts. Mais depuis 10 ans, on a des box qui émettent en Wi-Fi sur plusieurs bandes de fréquences, des relais cellulaires, des smartphones et tablettes à la maison. » Bref, notre environnement est de plus en plus dense et de plus en plus complexe. « On n’a aucune idée de l’exposition des gens aux ondes. Je ne dis pas qu’elles sont dangereuses ou au contraire qu’elles n’ont pas d’impact, mais simplement qu’il faut avoir une démarche de transparence. »
Comment ça marche ?
Aussi Arnaud Legout s’est-il lancé en 2015 avec son équipe dans la recherche et le développement d’Electrosmart. Une application gratuite pour smartphone (Android). L’idée : exploiter la capacité de mesure des smartphones. Arnaud Legout pose son téléphone sur le bureau et nous montre des petits points situés sur la tranche. Des antennes. « Il y en a pour le cellulaire, le Wi-Fi ou le Bluetooth. » Puis il affiche l’appli développée pour Android. « Exposition moyenne », s’inscrit en haut de l’écran, puis en dessous sont détaillées Wi-Fi (17 sources), 4G, LTE… Avec pour chacun cinq barres qui indiquent le degré d’exposition. De faible à fort. « On peut aussi accéder à son historique, » poursuitil. Conçue pour le grand public, elle permet de mesurer son niveau d’exposition aux ondes pour toutes les technologies sans fil que le smartphone accepte (GSM, 3G, 4G, Wi-Fi, Bluetooth...)
Quelle est son utilité ?
Electrosmart permet d’être informé de son exposition à cette pollution « invisible ». Chez soi, dans la rue, il suffit de sortir son smartphone pour effectuer un diagnostic. Application ludique et intéressante. C’est sympa de voir le bain d’ondes dans lequel on baigne en permanence », a ainsi commenté un utilisateur. L’autre intérêt d’identifier les sources qui nous exposent le plus, c’est d’agir en conséquence. Comment ? « On peut soit s’éloigner des sources, soit les éteindre quand on ne les utilise pas ». Il cite l’exemple d’un de ses collègues d’Inria. « Ilm’adit qu’il était peu exposé la nuit car il a un interrupteur qui coupe la box. Or, avec l’appli, il s’est rendu compte que le minuteur était mal configuré. » Il a rectifié le tir, et diminué son exposition. Retrouvez notre enquête du mois, « Peut-on en vivre en sécurité, entouré d’ondes ? », sur #solutions, notre offre numérique abonnés.