Un « fiché S » à l’inquiétant profil incarcéré à Grasse
Mohammad Khan Wazir est-il un paisible musulman, qui s’est emporté devant des travailleurs sociaux en proférant des menaces de mort ? Ou un islamiste radical en sommeil, potentiellement dangereux ? Pas simple pour la justice de trancher. Mais au regard de la sanction prononcée vendredi soir à Grasse (18 mois de prison ferme assortis d’une incarcération), le tribunal correctionnel, présidé par Marc Joando, semble avoir privilégié la seconde hypothèse. Le profil du prévenu pose question. Mohammad Khan Wazir est né il y a trente ans à Khost, en Afghanistan, près de la frontière pakistanaise. Il a quitté son pays, il y a dix ans, pour se retrouver en Iran. Il aurait également séjourné en Turquie puis aurait pénétré dans l’espace Schengen via la Grèce. Il se marie ensuite en Grande-Bretagne avec Claire Khacer, 40 ans, considérée actuellement par la Sécurité intérieure comme l’une des pasionarias françaises de la cause djihadiste. En situation irrégulière outre-Manche, Khan Wazir est expulsé et renvoyé à Kaboul.
Un enfant prénommé « Djihad »
Le couple réapparaît en 2011 à Cannes. De leur union, naît un enfant sur la Côte d’Azur qui porte le prénom connoté de « Djihad ». Ce qui signifie en arabe : abnégation, lutte, résistance. « Un choix de mon ex-épouse », se défend aujourd’hui le prévenu. Le couple se sépare en 2012. Claire Khacer part en Syrie où elle rejoint Daesh. De retour en France, elle est aussitôt mise en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste criminelle, et incarcérée à Fleury-Mérogis. Leur fils est placé dans une pouponnière des Alpes-Maritimes. Pendant ce temps, malgré des lacunes en culture religieuse selon les enquêteurs, Wazir s’est retrouvé imam dans une mosquée à Cannes-La Bocca. Il dit avoir complété ses revenus en travaillant comme maçon au noir. Il s’installe ensuite au Muy dans le Var, où il rencontre à la mosquée une étudiante française en sciences politiques de 20 ans. La jeune fille se convertit à un islam rigoriste et l’épouse. C’est lors d’une visite périodique à son fils, à la pouponnière, que Mohammad Khan Wazi, qui prétend prôner un islam de tolérance et de paix, a dérapé devant éducateurs : « Si je n’ai pas mes papiers, je monterai voir les magistrats au tribunal de Grasse avec une kalachnikov et je les buterai tous. » D’autres éléments troublants, vont pousser le parquet à demander à la cellule antiterroriste de la police judiciaire de Nice d’enquêter.
Il dit condamner le terrorisme
Les perquisitions et les études du téléphone du suspect n’ont rien apporté de probant. Mohammad Khan Wazir se défend d’être un extrémiste et dit condamner le terrorisme. La situation administrative de cet Afghan n’est pas claire. Sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français, il a obtenu devant le tribunal administratif l’annulation de cette décision, son fils étant né en France. Mais apparemment, il peine à obtenir une carte d’identité française pour son fils. Une situation qui a le don d’énerver un homme d’apparence paisible, plutôt bon père quand il vient rendre visite à son fils, selon les services sociaux. Le parquet de Grasse avait requis un an de prison ferme pour sanctionner des « menaces de mort à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique ». Le tribunal est allé audelà. Le prévenu a dix jours pour faire appel.