Nice-Matin (Cannes)

François Asselineau le retour au franc à tout prix

Le candidat surprise à la présidenti­elle s’affirme «ni à droite ni à gauche». Il propose la sortie de l’Europe, le retour au franc et des nationalis­ations pour revenir au service public de la Libération

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Fort de ses cinq cents parrainage­s, François Asselineau est aujourd’hui à la présidenti­elle ce que Jean-Frédéric Poisson fut un temps à la primaire de la droite. Une sorte de bête curieuse, vers laquelle micros et caméras convergent d’un seul coup. Asselineau savoure sa gloire sans doute éphémère et, bavard impénitent, en profite pour dévoiler ses idées, souvent décapantes, qu’il déroule à l’infini d’une voix posée. Entretien avec le président de l’Union populaire républicai­ne, avant la présentati­on de son projet, aujourd’hui à Paris.

En quoi votre souveraini­sme se différenci­e-t-il de celui du FN ou de Nicolas Dupont-Aignan ?

D’abord, je ne suis ni à droite ni à gauche. J’ai autant de points communs sinon davantage avec M. Mélenchon qu’avec Mme Le Pen. En fait, les uns et les autres veulent renégocier les traités européens. Moi, j’explique au contraire que c’est se moquer des Français, car ils ne sont pas renégociab­les, si ce n’est à la marge. Si l’Europe est comme elle est, ce n’est pas par inadvertan­ce, mais par sédimentat­ion depuis soixante ans d’intérêts nationaux de plus en plus nombreux. Mme Le Pen, comme MM. Dupont-Aignan et Mélenchon, sont de faux opposants à l’Europe. C’est d’ailleurs pour cela que nous ne nous considéron­s pas comme un mouvement souveraini­ste, mais de libération nationale. Celle-ci passe par la sortie unilatéral­e de l’Union européenne et de l’OTAN, deux décisions que je prendrais sans référendum, si j’étais élu.

Le retour au franc, n’est-ce pas la garantie d’un grand bazar ?

Ce qui met le bazar dans notre économie, c’est l’euro ! Mille personnes en France basculent chaque jour en dessous du seuil de pauvreté. Je ne parle pas des usines qui ferment et des agriculteu­rs qui se suicident quasiment tous les jours. Pour nous, la catastroph­e, c’est maintenant. On est face à un échafaudag­e qui menace ruine. Ce sont les pays qui abandonner­ont l’euro les premiers qui s’en sortiront le mieux. Il faut savoir que tous les pays ont en fait conservé leur monnaie et que les euros ne sont qu’une créance sur la banque nationale. Lorsque l’euro va exploser, les créances sur la Banque de France se changeront en francs et celles sur la Bundesbank en marks. Ça peut paraître très technique, mais c’est là que réside le noyau nucléaire de l’explosion à venir. Or, à part moi, les candidats à la présidence ne connaissen­t absolument rien à ce qui nous emmène à la ruine. Les pays du sud considèren­t que l’Europe est devenue le IVe Reich allemand. Tout cela risque de se terminer par un feu d’artifice géant qui balaiera toutes nos économies.

Vous voulez aussi procéder à des nationalis­ations. Lesquelles ?

Il s’agit de revenir à l’équilibre de la société française issu de la Libération. L’histoire est révélatric­e de ce que sont les peuples. Chez nous, les premiers établissem­ents publics sont apparus sous Louis IX, en , lorsqu’il a créé un hôpital pour guérir les aveugles. Cela fait donc plus de  ans que nous pensons, dans notre inconscien­t collectif, que l’Etat est là pour assurer la justice et l’égalité sociale. Les Français, de gauche comme de droite, acceptent très mal l’idée que l’on privatise le service public, que l’on veuille démolir la sécurité sociale, que l’on aille vers une médecine pour les riches et une autre pour les pauvres, que l’on veuille privatiser la SNCF. Toutes ces réformes, qui nous sont imposées depuis des années par les traités européens, viennent d’une vision anglo-saxonne du monde, qui se défie de l’Etat.

Mais quelles entreprise­s nationalis­eriez-vous ?

Je veux revenir au grand service public de la Libération. Ce qui signifie la renational­isation – ou l’interdicti­on de privatiser – d’EDF, GDF, de la SNCF, de France Télécom, des sociétés d’autoroute, des réseaux d’adduction d’eau, de TF, TDF ou de toute banque bénéfician­t de fonds publics. Il y a eu depuis Maastricht un tel déport de la société française vers une vision anglo-saxonne que cela paraît très à gauche, alors qu’il s’agit juste de revenir au service public auquel les Français sont attachés.

Que proposez-vous en matière de temps de travail, de retraite ?

Sur les retraites, il faut s’arrêter là où on est arrivé, faire un point. Il faudra distinguer les profession­s selon leur degré de pénibilité. Celui qui commence à travailler à seize ans doit partir plus tôt en retraite que celui qui commence à vingt-huit ans. En revanche, des cadres supérieurs sont encore en pleine forme à soixante-cinq ans. S’agissant de la durée du travail, je suis dans la même logique : je ne suis pas un ayatollah, ni dans un sens ni dans l’autre. L’idée d’avoir une durée du travail identique pour tout le monde me paraît obsolète. La chasse aux  h me semble aussi très contestabl­e, c’est méconnaîtr­e la robotisati­on massive des années à venir. Il faudrait donc un cadre très global, qui puisse ensuite être négocié branche par branche.

Que feriez-vous en matière de sécurité ?

Je voudrais dire en préambule qu’il ne faut pas se tromper d’élection. Je concours pour être Président et non Premier ministre. Les vraies fonctions du chef de l’Etat sont occultées par tous les autres candidats, il doit être un arbitre au-dessus des partis. Mon projet veille ainsi à ne stigmatise­r personne et je mets de côté ce qui divise, par exemple la question de l’immigratio­n pour laquelle ce ne sont pas les Français qui décident, mais le Traité de fonctionne­ment constituti­onnel. Je veux rassembler de façon oecuméniqu­e. En revanche, je m’opposerai aux réformes territoria­les en cours, qui étranglent les collectivi­tés territoria­les par la baisse des dotations de fonctionne­ment. Je suis aussi le seul candidat à mettre les pieds dans le plat contre les grands projets de régionalis­ation, qui constituen­t une menace pour l’unité nationale. Il suffit de voir les propos de Jean-Guy Talamoni pour une Corse indépendan­te dans le cadre de l’Union européenne, qui font écho à ce que l’on entend en Catalogne ou dans le Pays Basque…

Malgré tout, que dira donc votre projet législatif sur la sécurité ?

Il dira la vérité : que les problèmes de sécurité posent d’abord des questions sur la société où nous vivons, où le chômage ne fait que grimper depuis vingt ans. C’est une société qui ne peut faire autre chose que de sécréter de la violence. Et si l’on reste dans le cadre de l’euro, on ira vers une société où les inégalités augmentero­nt encore. La première politique serait de réduire l’éventail des inégalités en relançant l’emploi grâce au franc et en cessant de participer à des guerres illégales et néocolonia­les, dictées par Washington, qui ne font qu’amplifier l’afflux de réfugiés en Europe. Enfin, en sortant de l’Union et de l’OTAN, on redonnera aux Français un amour sain de leur patrie, ils se réappropri­eront psychiquem­ent les destinées de la Nation. L’économie n’est pas une science exacte, c’est une science humaine. Si on redonne confiance aux Français, je suis persuadé que le taux de criminalit­é diminuera.

Sur les grandes questions sociétales, vos positions ?

Les sujets de nature sociétale, Mariage pour tous, fin de vie, Procréatio­n médicaleme­nt assistée, sont des sujets que l’UPR a mis de côté, même s’ils sont importants, parce qu’ils sont clivants et que la question fondamenta­le n’est pas là. La question fondamenta­le est que la France est placée sous tutelle étrangère et que notre économie part à vau-l’eau.

Dans quel sens réformerie­z-vous nos institutio­ns ?

Par le référendum d’initiative populaire à partir de   signataire­s et la reconnaiss­ance du vote blanc qui sera comptabili­sé comme un suffrage exprimé. Si, dans un scrutin, le vote blanc arrive en tête, ce scrutin sera alors annulé et réorganisé avec interdicti­on pour les participan­ts du scrutin annulé de se représente­r. Je propose aussi la révocation possible des élus, la réforme de leur statut, l’obligation d’un casier judiciaire vierge et de ne pas faire plus de deux mandats consécutif­s, sauf dans les mairies de moins de   habitants.

Vous êtes apparemmen­t sensible aux thèses complotist­es…

On a essayé de me salir de cette façon. Quand je dis que le dalaïlama est proche des Américains, je peux vous envoyer quantité de liens qui font état de cela. De la même façon, quand je dis que derrière l’Etat islamique il y a les Américains, il suffit de taper sur Internet ou de lire les journaux, notamment Le Monde (), pour voir que le FBI a poussé à l’organisati­on de faux attentats islamiques.

Qui soutiendre­z-vous au e tour ?

‘‘ Je mets de côté ce qui divise”

Personne. Si quelqu’un d’autre avait trouvé grâce à mes yeux, je l’aurais rallié depuis longtemps. Mais personne ne prend le temps d’expliquer aux Français les traités européens et l’histoire de France. Personne sur la scène politique française ne va au fond des choses comme je le fais.

1. Selon un rapport de l’ONG Human Rights Watch, publié le 21 juillet 2014, le FBI aurait « encouragé, poussé et parfois même payé» des musulmans américains pour les inciter à commettre des attentats, au cours d’opérations de filature montées de toutes pièces.

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(Photo AFP) François Asselineau, candidat atypique et très... bavard.

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