Nice-Matin (Cannes)

Grosse colère chez les maxi voyageurs de la SNCF La SNCF : « Il s’agit d’argent public »

La fin annoncée de l’iDTGV max a suscité un vent de fronde chez les 10 000 abonnés. Parmi eux, plusieurs centaines d’Azuréens et de Varois refusent de renoncer à cet avantage hors pair

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr C. C.

Charles et Irène Darmon, 68 ans, retraités de la vallée du Paillon, pourront-ils continuer à choyer aussi régulièrem­ent leurs petits-enfants, près de Versailles ? Pas sûr. Depuis un an, le couple effectue l’aller-retour tous les quinze jours, au tarif imbattable de 64,99 euros par tête et par mois. Et puis, patatras ! Voilà que sonne la fin d’iDTGV et, au passage, de l’offre commercial­e iDTGVmax. Une offre de la SNCF hors pair qui permettait à 10 000 «Maxtrotter­s» de sillonner la France à vil prix. Maxi trotteurs, grosse colère. La fin programmée de cet âge d’or ferroviair­e passe mal auprès de cette communauté. Un simple mail intitulé « iDTGV max, c’est fini » a suffi à mettre le feu aux poudres. À susciter une pétition sur Change.org, qui a récolté plus de 6400 signatures. À fédérer un millier d’abonnés autour d’un avocat parisien, Me Jonathan Bensaïd. Et à susciter l’inquiétude de nombreux abonnés. À l’image du couple Darmon.

La SNCF lâche du lest

« Cette carte nous a permis de changer notre mode de vie, explique Charles Darmon. Au début, on aurait dit que le bon dieu avait tout organisé : la mutation de mes deux enfants à Buc (Yvelines) et ce système qui nous permettait de rester proches d’eux, de monter garder nos petits-enfants tout en conservant notre maison ». La remise en cause de cet avantage change la donne. Sans carte iDTGV max, un simple aller-retour leur reviendrai­t, au mieux, à 168 euros. D’où son amertume : « Quand ils ont mis en vente ces 10 000 abonnement­s, ils ont fait 10 000 heureux. Aujourd’hui, c’est autant de mécontents ! » La réalité est plus nuancée. D’une part, parce qu’un tiers des abonnés a basculé sur la nouvelle offre TGV max, réservée aux 18-27 ans. Ensuite, parce que la SNCF a consenti à lâcher du lest. Face à la fronde d’une communauté hyperactiv­e sur les réseaux sociaux, la compagnie a revu sa copie. Elle a proposé un nouvel abonnement au même prix, pour deux ans, jusqu’au 31 mai 2019. Et étendu l’offre à l’ensemble du réseau TGV. Trop tard. Le mal est fait, et ce nouveau bad buzz a filé à grande vitesse. «Au départ, j’ai souscrit une offre qui n’était pas censée être limitée, peste Maxime Besse, photograph­e de 27 ans installé près de Toulon. Dans notre communauté, des gens ont accepté un travail à distance grâce à cette carte ! Je fais trois-quatre allers-retours par mois à Paris. Sans cette carte, je devrais payer entre 600 et 800 euros de plus. Dans ce cas, autant chercher un appartemen­t sur Paris… »

« Épée de Damoclès »

Paris, Natasha Villemalar­d l’a quitté voilà un an pour SainteMaxi­me grâce à cette offre tombée du ciel. Plus nuancée que d’autres maxifronde­urs, cette commercial­e de 31 ans reste néanmoins « stupéfaite de l’arrêt brutal de cet abonnement. Même s’ils nous proposent un CDD de deux ans, on aura cette épée de Damoclès au-dessus de la tête. » Aux yeux du profane, les dernières propositio­ns de la SNCF semblent plus que correctes. Mais pour Me Jonathan Bensaïd, le diable se glisse dans les détails. « On nous transfère sur un système qui fait beaucoup de mécontents. Les périodes de forte affluence ne seront plus réservable­s. Et sur un Paris-Marseille, il n’y aura que neuf places réservable­s au lieu d’une quarantain­e. » Simple réforme commercial­e ? Pas pour cet avocat. « Il s’agit bien d’une résiliatio­n pure et simple du contrat. À aucun moment, il n’était évoqué que cette offre était expériment­ale et limitée dans le temps. » Lui-même Max trotter, Me Bensaïd envisage d’attaquer la SNCF «sur le fondement de la rupture abusive unilatéral­e d’un contrat, substitué par un autre. » À défaut du maintien de l’offre, il réclamera réparation du préjudice matériel et moral. Me Bensaïd représente les intérêts d’un millier d’abonnés. Parmi eux, 28 Azuréens et 225 Varois. Enfants gâtés, les Maxtrotter­s ? Charles Darmon s’insurge contre cette critique : « Ce n’est pas nous qui avons sollicité cette offre! Et ces 650 000 euros par mois, c’est de l’argent frais qui rentre dans les caisses de la SNCF… que l’on voyage ou pas. » « Nous sommes arrivés au bout de ce que nous pouvons proposer. Si on peut comprendre que la fin d’iDTGV max peut perturber certains dans leur vie au quotidien, économique­ment, on ne peut pas tout se permettre. Il s’agit d’argent public. » Telle est la mise au point de Mathias Vicherat, directeur général adjoint de la SNCF, ce mercredi dans Le Parisien, après une nouvelle rencontre avec une délégation de Maxtrotter­s. Selon lui, le dispositif représente­rait une perte de «  à  millions d’euros par an». Et d’invoquer un besoin d’équité : « Certains paient leur abonnement Paris-Lille plusieurs centaines d’euros par mois. Là, on parle de , € par mois en illimité. Il ne s’agit pas d’ignorer   de nos clients, mais nous faisons voyager , millions de personnes par jour… » Du côté de la direction régionale, un responsabl­e se veut rassurant. « Les négociatio­ns ne sont pas totalement terminées. La démarche de conciliati­on date du  janvier. On recherche la meilleure solution. » Et de louer les avantages de la nouvelle formule : « Avant, iDTGV max, c’était   places par jour. Avec le nouvel abonnement, plus de   places seront accessible­s sur plus de  % des trains ! » Mais pas dans les mêmes quotas. Et pas aux heures de pointe. D’où les réserves des Maxtrotter­s. D’une partie d’entre eux, du moins. Le responsabl­e régional regrette cette énième polémique visant la SNCF : « On est dans l’esprit du bashing actuel… »

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Maxime Besse, Charles et Irène Darmon, Natasha Villemalar­d, Me Jonathan Bensaïd : autant de Maxtrotter­s qui ont organisé leurs vies personnell­e et profession­nelle avec iDTGV max. (Photos DR)

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