François Fillon mis en examen
Il devra répondre notamment de détournements de fonds publics, ainsi que de recel et complicité d’abus de biens sociaux
J« uridiquement, je ne vois pas comment ça peut se produire. On serait dans une quasi-voie de fait », avaitil déclaré le 13 février dernier à Saint-Denis de La Réunion. François Fillon a pourtant bien été mis en examen hier, la veille de sa convocation initiale par les juges dans l’enquête sur de possibles emplois fictifs de sa femme et de ses enfants comme assistants parlementaires.
(1) Le candidat de la droite et du centre est soupçonné de détournement de fonds publics, complicité et recel de détournement de fonds publics, recel et complicité d’abus de biens sociaux, et manquement aux obligations de déclaration à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Il a refusé de répondre aux juges d’instruction, mais leur a lu une déclaration, diffusée ensuite par Le Figaro. «Oui, j’ai employé mon épouse et la réalité de son travail est indéniable» , affirme-t-il notamment, estimant que des témoignages et des attestations le confirment et ajoutant que la justice n’a pas à « porter une appréciation sur la qualité ou la teneur de ce travail ». « Il est tout aussi faux de prétendre que son emploi à La Revue des deux mondes », propriété de l’un de ses proches, l’homme d’affaires Marc Ladreit de Lacharrière, «n’avait aucune réalité», ajoute-t-il.
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Nouvelles révélations sur les enfants
L’avocat de François Fillon a expliqué que dans leur mise en examen, les juges ont retenu les salaires de Penelope Fillon, qui sera convoquée le 28 mars, mais aussi ceux de deux de ses enfants, Marie et Charles, que le député de Paris avait employés comme assistant parlementaire lorsqu’il était sénateur, entre 2005 et 2007. Sur ce dernier point, l’ancien Premier ministre doit faire face à de nouvelles informations, publiées hier par Le Parisien-Aujourd’hui en France. Le quotidien a en effet révélé que ceux-ci ont rétrocédé une partie de leurs salaires. Des faits qu’ils ont spontanément révélés aux enquêteurs, selon leurs conseils. Dans le détail, sur les 46 000 euros net touchés par sa fille Marie d’octobre 2005 à décembre 2006, environ 33000 euros, soit plus de 70 %, seraient repartis sur le compte joint des parents. Son avocat, Me Kiril Bougartchev, a confirmé ces chiffres, assurant que la fille du candidat avait souhaité « rembourser » à ses parents les frais de «son mariage, mi2006 », qui avait coûté 44 000 euros : « Elle ne voyait pas en quoi son père devait lui offrir son mariage alors qu’il ne l’avait pas fait pour ses frères. »
Du jamais-vu dans la politique française
Quant à son frère Charles, qui touchait un salaire brut mensuel de 4846 euros lorsqu’il travaillait pour son père, les sommes rétrocédées à ses parents s’élèvent à 30 %. Il s’agissait selon son avocat, Me Pascal Eyraud, de « remboursements correspondant aux montants des frais pris en charge par ses parents », à savoir «le loyer de son studio séparé» et «ses charges » courantes. À quarante jours du premier tour, ce nouveau rebondissement dans une campagne présidentielle de plus en plus folle constitue une première pour un candidat majeur dans la course à l’Élysée. Marine Le Pen y a échappé vendredi en refusant de répondre à une convocation des juges dans l’enquête sur des soupçons d’emplois fictifs chez les assistants des eurodéputés frontistes.