Enquête sur le financement
Le procureur de la République, Jean-Michel Prètre, confirme que des investigations financières sont en cours sur l’association cultuelle à la suite d’un signalement de la mairie
Le parquet de Nice confirme l’ouverture d’une enquête préliminaire sur la mosquée En-Nour, dans la plaine du Var. Ces investigations font suite au signalement adressé, en début d’année, par la mairie de Nice au procureur de la République. Même si JeanMichel Prètre confie s’intéresser, moins au financement passé de ce lieu de culte, qu’à son fonctionnement actuel. Dans un courrier daté du 26 janvier, le directeur général des services de la ville de Nice avait invoqué l’article 40 – qui oblige toute personne dépositaire de l’autorité public à dénoncer un délit dont il serait témoin – pour communiquer à la justice «des élémentssusceptibles, selon lui, de constituer des infractions pénales. »
Tenu par le Conseil d’État
Au coeur des suspicions de la mairie : le financement de l’association En-Nour qui gère la mosquée. Jugé « opaque » par Christian Estrosi qui a rappelé, hier, n’avoir cessé depuis 2012 d’alerter le gouvernement à ce sujet. En vain. Il y a tout juste un an, l’ancien préfet des AlpesMaritimes, Adolphe Colrat, avait refusé de signer la déclaration d’utilité publique sollicitée par la mairie afin de créer une crèche en lieu et place de la mosquée. En dépit de l’avis favorable du commissaire enquêteur. Le 2 juillet, le représentant de l’État s’était finalement substitué au maire en autorisant l’ouverture au public d’EnNour. Me Ouassimi Mebarek, membre fondateur de l’association et avocat, estime que « le préfet était en fait tenu par la décision du Conseil d’État. »
Contexte politique et géopolitique
Car la plus haute instance administrative s’était ellemême prononcée, le 30 juin, en faveur de l’ouverture – sous astreinte (lire ci-dessous) – de ce lieu de culte. Le préfet Colrat aurait donc fait ce que « tout autre préfet aurait fait à sa place.» Même si Me Mebarek reconnaît que les intérêts géostratégiques de la France et les clivages politiques nationaux ont « peut-être aussi joué » en sa faveur. «L’Arabie Saoudite est un pays ami de la France. Et ce n’est pas la petite mosquée de Nice qui aurait pu remettre en cause cette amitié», pense l’avocat qui « n’exclut pas » non plus « la guéguerre politique locale » qui opposait le maire les Républicains de Nice et le ministre de l’Intérieur (et du culte) socialiste dans ce dossier : « Il y a peut-être eu un ordre en haut lieu, reconnaît-il, mais le préfet, quelle que soit sa couleur politique, était tenu par la décision du Conseil d’État. » Ce n’est évidemment pas l’avis de la mairie qui, à bout de recours juridiques pour tenter de s’opposer à l’ouverture d’En-Nour, a finalement saisi le parquet fin janvier. Ce signalement pointe donc les conditions de financement de ce lieu de culte, notamment des quelque 750 000 euros de travaux qui y ont été réalisés. Dans des conditions dont il appartient désormais aux enquêteurs de vérifier la légalité. Mais, dont le renseignement territorial avait luimême souligné le « manque de transparence » dans une note adressée au préfet en avril 2016… Au moment où le représentant de l’État tranchait en faveur de l’ouverture de la mosquée. Hier, Christian Estrosi a demandé « solennellement à Bernard Cazeneuve de revenir sur sa décision. » Le bras de fer est loin d’être fini.