Nice-Matin (Cannes)

«On ne parle pas des vrais problèmes»

Petit tour place du Palais à Nice. Dans une campagne présidenti­elle polluée par les affaires, c’était le lieu pour rencontrer Sami Sarkis, kiosquier de son état, et ses clients

- G. LECLERC gleclerc@nicematin.fr

À tour moins de quinze jours du premier de l’élection présidenti­elle, nous continuons à placer les électeurs au coeur de la campagne. Aujourd’hui, votre journal donne la parole à Sami Sarkis, vendeur de journaux de la place du Palais à Nice. Un personnage, un vrai, qui voit passer une bonne partie de la société dans son kiosque, qui pour un magazine, qui pour un journal, qui pour une carte postale.

Son kiosque de la place du Palais, à Nice, est le premier endroit où l’on cause. De rien, mais surtout de tout. De la politique, du sport, de la météo, de la une de Paris Match ou de Nice-Matin. Sami Sarkis, Libanais d’origine, contemple la campagne un brin amer, en brassant ses piles de journaux. « Je regardais au début, il y a encore un mois et demi. Mais vu comme les choses se passent, j’ai pris mes distances. »

« Ça me gêne qu’il ait menti »

Sami ne cache pas son écoeuremen­t. «Un pays comme la France mérite mieux. » Un pur Nissart débarque dans la conversati­on pour acheter « le » NiceMatin. «Indécis, voilà comment je suis. Indécis», explique Marcel Lionardo, 73 ans. « J’étais de droite, pour Fillon, mais maintenant je me pose la question. Ça me gêne qu’il ait triché, menti. Il dit que, mis en examen, il ne se présentera­it pas, et finalement il le fait. Il aurait dû

‘‘ se retirer. Ou le parti aurait dû lui demander de se retirer. Je vais peut-être être obligé de voter à gauche si j’ai Macron au deuxième tour, car pour moi, Macron, c’est la gauche. » Marcel vient à peine de tourner les talons que déboule l’ancien maire de Nice, Jacques Peyrat. Il cherche sa femme. Elle est passée quelques minutes plus tôt. Il poursuit sa route mais accepte quelques questions. «La campagne est horrible. Les gens s’étripent, on essaye de descendre les candidats en flammes par des manoeuvres judiciaire­s incroyable­s. Les problèmes essentiels de la France, mais aussi de l’Europe et du monde entier ne sont pas évoqués. Qu’est ce qu’on en a à cirer des poursuites contre M. Fillon, Mme Le Pen, M. Macron ? » Devisant, nous passons devant le palais de justice : « On a l’impression qu’on cherche à éliminer les candidats par le pouvoir des

juges. Déjà que la justice est discrédité­e en France… » Selon lui, «les médias devraient mettre en avant les vrais problèmes, pas les affaires. En ce qui me concerne je mets en premier l’immigratio­n, l’insécurité, le chômage, l’absence de moyens réels pour l’armée. »

« Je suis dans le flou artistique »

Retour au kiosque, où Sami enchaîne les clients. Les affaires? « A l’origine, il y a une affaire, estime le kiosquier. On ne peut pas reprocher aux journalist­es de faire des enquêtes, ni aux juges. D’autant plus que le juge qui s’occupe de l’affaire Fillon [Serge Tournaire, Ndlr] a travaillé à Nice. Je l’ai eu en tant que client. Ce n’est pas quelqu’un qui se met en tête d’abattre untel ou untel. » Albert-David Tobelem, avocat, attrape plusieurs journaux. Son choix est-il fait ? « Je déteste me déplacer dans un bureau de vote pour mettre un papier blanc, je suis dans le flou artistique», avoue-t-il. Maria-Victoria, une Italienne vivant à Nice, pose un paquet de journaux à la caisse. « Quand je vois ce qui se passe ici, je retrouve l’Italie. On va toujours choisir le moins pire, comme nous les Italiens. J’ai l’impression qu’au lieu d’être des candidats qui proposent, ils passent leur temps à médire des autres. On ne parle pas des vrais problèmes. »

Un pays comme la France mérite mieux ”

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(Photos François Vignola) Sami Sarkis, kiosquier emblématiq­ue de la place du Palais, à Nice.

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