Portrait bigarré des « marcheurs » azuréens
Qui sont les électeurs de La République en marche!? Le parti de Macron a manifestement fait le plein de voix à gauche, mais il a aussi réussi à séduire un électorat de droite sur ses terres de prédilection
Habituellement, les vagues s’arrêtent toujours à l’Estérel», souffle un ancien militant socialiste qui, lui aussi, a rejoint le camp des «marcheurs». La dernière remonte à 1981, lorsqu’emportée par l’élection de François Mitterand, une déferlante socialiste était venue irriguer ces terres de droite. « Mais le phénomène était resté plus contenu qu’ailleurs. Or, cette fois-ci, les candidats de La République en marche ont amélioré de plus de six points le score qu’avait réalisé Emmanuel Macron dans les Alpes-Maritimes au 1er tour de la présidentielle, alors qu’au plan national la progression n’est finalement que de 4 %. Cette fois-ci la vague s’est amplifiée audelà de l’Estérel. Et ça, c’est vraiment une première! » Qui ne s’explique pas seulement par la déconfiture du parti socialiste.
PS et écolos siphonnés
Certes, le mouvement La République en marche! a largement capté les électeurs du PS qui réalise, dans les Alpes-Maritimes, sans doute ses pires élections de toute la Ve République, avec 1,7 % des suffrages exprimés. À peine 5978 électeurs azuréens ont voté pour le parti à la rose au premier tour de cette élection législative. C’est moitié moins que le nombre de voix récoltées, il y a cinq ans, par Patrick Allemand, son ancien secrétaire départemental, à lui tout seul et rien que dans la 1re circonscription. Pour l’ex-chef de file du PS06, qui a rejoint depuis les «marcheurs», il ne fait guère de doute que «les électeurs socialistes ont trouvé une autre forme d’expression politique. Ils ont même deux alternatives.» L’une à la gauche de la gauche pour les plus «radicaux». Et l’autre au sein du mouvement La République en marche ! La majorité présidentielle a sans aucun doute capté en grande partie les quelque 62 000 électeurs azuréens perdus par le PS depuis 2012. Mais le parti de la rue de Solférino – si tant est qu’il soit encore en mesure de garder son siège parisien (voir par ailleurs) – n’est pas le seul à s’être fait siphonner. Le portrait type du « marcheur » est sans doute aussi teinté de vert. Car les défenseurs de l’environnement, Europe-Ecologie-Les-Verts en tête, ont également perdu près de 40 % de leur base électorale, soit plus de 8000 électeurs par rapport à 2012. Si on les ajoute aux quelque 62 000 déserteurs du PS, ces petits comptes d’apothicaire, qui sont loin d’être une science exacte en politique, ne suffiraient même pas à expliquer la percée des candidats macronistes, portés par près de 90 000 suffrages dans le département. Il faut encore rajouter vraisemblablement une bonne dose de bleu pour achever ce portraitrobot.
Défections en terres de droite
Car ce sont bien Les Républicains et leurs alliés de l’UDI qui ont perdu le plus de voix en cinq ans : près de 85000 électeurs soit la moitié de leur électorat. Sur ces terres pourtant de droite, une partie de la défection s’est sans doute faite au profit, là encore, de la majorité présidentielle. Le détail des votes par commune, voire par bureau en témoigne. «Le fait est qu’une partie de notre électorat est aussi parti vers La République en marche!, constate-t-on dans l’état-major de l’un des barons de la droite locale. Mais c’est apparemment une frange plutôt jeune si l’on se fie à la sociologie des bureaux. Comme au Domaine du Loup à Villeneuve-Loubet, par exemple, qui place Nathalie Audin (REM) en tête. Dans la 7e Pauget (LR) se fait quant à lui devancer à Opio, Valbonne ou encore Roquefort. Ce qui correspond plutôt à un électorat d’actifs de droite aisés. Des entrepreneurs, sans doute aussi, qui ne voient pas d’un si mauvais oeil la mise au placard du code du travail. » Pour Dominique Estrosi-Sassone, Les Républicains ont surtout été victimes de « l’abstention massive » ce dimanche. Le parti de droite a ainsi perdu près de la moitié de ses électeurs de 2012, soit 84 562 suffrages. Alors que dans le même temps 81 022 électeurs de plus qu’il y a cinq ans boudaient les urnes. Cette fois le compte y est presque.