Nice-Matin (Cannes)

On s’en va

Installés sur l’île depuis 5 ans, Valérie et ses proches ont tout perdu et redoutent pillages et violences. Ils reviennent à Villeneuve-Loubet ce week-end et ont besoin d’aide pour se reconstrui­re

- PROPOS RECUEILLIS PAR MATHILDE TRANOY mtranoy@nicematin.fr

Installés à Saint-Martin depuis  ans, Valérie et sa famille ont tout perdu. Ils reviennent à Villeneuve-Loubet et ont besoin d’aide pour se reconstrui­re.

Valérie Tomaselli, 53 ans, assistante maternelle et habitante du quartier des Ferrayonne­s, a quitté Villeneuve-Loubet il y a 5 ans avec son époux et ses enfants pour s’installer à SaintMarti­n, dans le quartier de la Baie orientale. Là, ils ont ouvert une pizzeria. Après le passage de l’ouragan Irma, ils ont tout perdu. Depuis la Martinique, où elle a été rapatriée par l’armée avec trois autres membres de sa famille, Valérie a accepté de se confier à NiceMatin.

Où étiez-vous quand Irma a frappé Saint-Martin?

Mardi matin, nous avions prévu de nous réunir chez les beauxparen­ts de notre fils, qui ont une maison plus éloignée de la mer que nous. Mais des gendarmes sont venus nous dire qu’il fallait rapidement évacuer le quartier et se diriger vers des abris qui n’en étaient pas et qui ne pouvaient accueillir que  à  personnes. Mes deux fils, ma fille, mes deux belles filles, les parents d’une de mes belles filles, ma petite fille de  ans, mon mari et moi avons donc choisi d’aller nous réfugier dans le lycée de notre fille, la cité scolaire Robert-Weinum. On est restés confinés une après-midi et une soirée dans la salle des professeur­s. Nous étions une cinquantai­ne sans aucune informatio­n. Et puis, on a senti que le temps se dégradait. Le vent soufflait. Il pleuvait mais rien de plus. Le plus fort de l’ouragan a été entre  et  heures du matin le mercredi. À ce moment-là nous étions dans le couloir car le plafond de la salle des professeur­s s’était écroulé.

Vos proches ont-ils été blessés?

Personne n’a été blessé physiqueme­nt.

Ça signifie que moralement oui?

Bien sûr. Au plus profond de nous. Dans ce couloir on a cru mourir. Nos tympans explosaien­t et nos têtes bourdonnai­ent. Nous tenions des matelas sur les portes vitrées pour ne pas qu’elles volent en éclats. Les murs tremblaien­t. À  heures du matin tout s’est arrêté. On se préparait pour le second assaut d’Irma, mais à  heures, c’est un déluge de pluies qui s’est abattu sur Saint-Martin avec un vent fort, mais bien moindre.

Vous avez pensé que tout était enfin terminé?

On ne savait pas trop. Mais on s’est aventuré à ouvrir la porte. Là, le choc. Une vision d’apocalypse. Nous étions abasourdis, choqués, en pleurs.

Avez-vous pu vous rendre dans votre maison?

Toutes les routes étaient bloquées. Il a fallu attendre l’après-midi. Et faire une partie du chemin à pied. La maison est encore debout. Je m’estime très chanceuse. Vous souhaitez revenir à Villeneuve-Loubet parce que vous pensez qu’il n’y a plus d’avenir là-bas pour vous? On a perdu la pizzeria qu’on exploitait. Le choc. Et l’insécurité ambiante fait que pour l’instant on ne peut pas rester.

Que redoutez-vous?

Les pillages. On les a constatés de nos propres yeux. On n’a pas été victime de violences, mais on l’a craint. Un peu moins depuis que l’armée et la gendarmeri­e sont arrivées en renfort. Mais ça a pris trop de temps. Beaucoup, beaucoup trop. Le mal était fait.

Que pensez-vous des déclaratio­ns d’Emmanuel Macron qui promet « une reconstruc­tion exemplaire »?

J’ai de la haine envers Macron. Irma était annoncé plusieurs jours avant. On savait qu’elle allait faire mal. Il aurait dû prévoir des hommes et des moyens sur place, pour éviter les pillages, braquages et agressions. C’est pour ces raisons-là que nous sommes partis.

À Villeneuve-Loubet, avez-vous de la famille, des amis qui peuvent vous accueillir?

J’ai mon papa. Aux Esperes. Et de nombreux amis. Je rentre avec ma fille, un de mes fils et sa compagne. Les autres restent à Saint-Martin pour éviter le pillage de notre appartemen­t. Nous prenons l’avion jeudi soir (ce soir NDLR) pour la Guadeloupe, puis Paris, puis Nice. Nous arrivons à Nice vendredi (demain NDLR).

Envisagez-vous de retourner à Saint-Martin?

J’envisage de toute façon d’y retourner à la fin du mois pour revenir avec mon époux, mais il est vraiment trop tôt pour projeter d’y retourner définitive­ment.

De quoi avez-vous besoin? Comment peut-on vous aider?

J’ai besoin d’aide pour trouver un emploi et un logement. Un T . J’aurais également besoin d’aide pour les assurances appartemen­t et voitures que nous avions là-bas car je ne suis pas au top pour ces paperasses. Mais j’ai surtout besoin d’aide pour la scolarisat­ion de Carla, ma fille de  ans. Elle rentre en classe de première. Je pensais qu’elle serait immédiatem­ent acceptée au lycée Renoir de Cagnes-sur-Mer. J’ai entrepris quelques démarches depuis la Martinique, mais il semble que ça va être un parcours du combattant.

Dans quel état d’esprit êtesvous? Colère, tristesse, abattement?

Au bout du rouleau.

J’ai de la haine envers Macron ” J’ai besoin d’aide pour scolariser ma fille ”

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Valérie Tomaselli, entourée de son époux Ulysse, de leurs quatre enfants et de leur petite fille.(DR)
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Valérie et sa famille ont trouvé refuge au lycée Robert-Weinum.
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Vers  heures du matin mercredi « on s’est aventuré à ouvrir la porte. Là, le choc ».
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« Notre maison est encore debout. Je m’estime très chanceuse ».

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