Nice-Matin (Cannes)

La solidarité a joué à fond pour Pierre Quell

L’ancien ingénieur devenu SDF a quitté son garage pour un studio dans le centre ancien de Draguignan et reçu de multiples propositio­ns d’aides… dont une offre de travail de l’ex-leader des Gipsy Kings

- EMERIC CHARPENTIE­R

Trois semaines plus tard, qu’est-il advenu de Pierre Quell, ce retraité de 66 ans qui vivait dans un garage du centre-ville, sans ressources, sans électricit­é et avec à peine de quoi se nourrir tous les jours ? Preuve que la solidarité et la générosité ne sont pas de vains mots, elles se sont manifestée­s en masse depuis notre article de 4 octobre et même de façon très inattendue… « Du jour au lendemain, j’ai été submergé, raconte l’intéressé, mais malheureus­ement, je n’ai pu réceptionn­er ou prendre les messages d’une quantité d’appels. »

« Je veux remercier tout le monde »

Avec un téléphone portable défaillant, sans réseau ou batterie, et une messagerie vite saturée, Pierre Quell s’en veut terribleme­nt. Il souhaite avant tout «remercier tous ceux qui m’ont appelé sans réussir à me joindre. Je ne veux pas que les gens comprennen­t mal» et a entrepris avec le nouveau téléphone qu’on lui a offert de « recontacte­r ceux qui ont pu

me laisser un message. »

Entre-temps, les rencontres avec ses premiers interlocut­eurs, les aides diverses venant aussi de personnes qui sont venues directemen­t à sa rencontre dans son logement de fortune, se sont succédé : Pierre Quell a reçu « un peu de tout », de la nourriture, des vêtements, des produits d’hygiène, des dons d’argent pour subsister au quotidien. « Aujourd’hui, je n’ai plus l’angoisse de ne rien manger et de dépérir. C’est déjà beaucoup mieux qu’avant. » Des propositio­ns de travail, de logement aussi. Témoin ce particulie­r qui lui a proposé un studio dans le centre ancien, où le retraité vient de déménager, provisoire­ment, tout en conservant son adresse postale au CCAS de la ville de Draguignan. « J’ai hésité, reconnaît le retraité. Pour l’instant, il me dépanne et je lui en suis très reconnaiss­ant. Mais je ne sais pas si demain, je pourrai lui payer un loyer. » « Mon principal problème maintenant, c’est ma retraite, poursuit-il. Je veux retrouver mes droits, pouvoir vivre normalemen­t, reprendre la gestion de mes affaires ! L’administra­tion se moque de moi : la seule réponse que je reçois à mes courriers, c’est pour m’indiquer qu’ils ont bien enregistré mes coordonnée­s postales au CCAS. » La solution passera peut-être par cet avocat suisse qui propose de l’aider à recouvrer ses droits, ou cette dame, présidente d’un Club des affaires dans l’est de la France et qui, faute d’avoir pu l’avoir au téléphone, s’est adressée à notre rédaction : « Je suis dans la région de Cannes pour la semaine et j’ai lu votre article ce matin dans le journal. Je pense être en mesure de pouvoir aider M. Quell à réaliser son dossier de carrière nécessaire pour obtenir la retraite qui lui est due d’une part ; à trouver pour lui dans l’intervalle un travail de dépannage de même que l’aide pécuniaire indispensa­ble à ce jour d’autre part. »

Gardien chez Chico ?

Une main tendue parmi, certaineme­nt, plus d’une centaine d’autres. Dont une émanant de… Chico, l’ancien leader et chanteur des Gipsy Kings. Il tombe sur l’article évoquant la situation de Pierre Quell alors qu’il se trouve à Saint-Tropez et demande à l’un de ses proches de le contacter pour le rencontrer. «Ils m’ont payé un billet de train pour Arles et j’ai passé une partie de l’après-midi en compagnie de Chico, dans son hacienda, raconte le retraité, pas plus impression­né que cela ! On a beaucoup discuté,

de choses et d’autres. On a un peu le même état d’esprit. C’est là qu’il m’a proposé un emploi de gardien. Il m’a laissé sa carte avec son numéro de portable pour que je le rappelle. » Car là où certains auraient accepté sur le champ, lui ne veut pas « foncer tête baissée » mais plutôt « faire les choses l’une après l’autre. J’ai remercié Chico, du fond du coeur, pour toute l’aide qu’il me propose mais je lui ai expliqué que la première nécessité pour moi, c’est de régler mes affaires ici, mes papiers, mon problème de retraite. Je ne veux pas partir en laissant des dettes derrière moi, je n’ai jamais fait cela de toute ma vie. Je veux pouvoir rembourser la propriétai­re du garage qui a eu la gentilless­e de ne pas me faire payer de loyer le temps que je trouve une solution. » Ensuite, direction Arles… ou peutêtre ailleurs car l’anonyme SDF qu’il était il y a encore peu va finir par avoir l’embarras du choix. Si seulement, ce décidément drôle de bonhomme pouvait partager un tel embarras avec tous les « écorchés de la vie », cachés ou oubliés, il n’en serait que plus heureux.

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(Photos Philippe Arnassan) Depuis notre article du  octobre, Pierre Quell a reçu plus d’une centaine d’appels sans pouvoir hélas répondre à tous.
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