Tchéky Karyo, dans le rôle d’un président!
Interview Président du jury aux 30èmes Rencontres Cinéma ouvertes hier, il nous confirme l’arrêt de la série britannique à succès et revient sur ses plaisirs de musique et cinéma
Il a toujours cette « gueule ». De polar, commede rock star. Casquettebranchée, lunettes fumées. Avec cette barbe mal rasée, d’un saloparddu7ème art. Celui qu’on adoredétester à l’écran. Tchéky Karyo, l’antihéros. Depuis laBalance, des rôlesdeméchant. Comme on fait feu à volonté. Nikita, Jeanne d’Arc ou Le baiser mortel du Dragon pour Luc Besson. Composition! Car la voix douce et le regard profond trahissent gentillesse, et humanité. L’acteur-chanteur est de toutes les partitions. Qui n’en finit pas d’explorer ses talents. Par amourdu jeu, sans ego du je. Pour le plaisir en partage. Avec Julien Baptiste, le flic retraité et apiculteur de The Missing, il a aussi butiné sur le petit écran. Personnage positif aux millionsd’adhérents. À Cannes, le voilà dans un rôle de président! Envrai. Au sein du jurydes RCC, on se doute qu’il ne sortira pas le flinguepour imposer ses choix. Mais comme il a double voix, on en profite pour capter sa parole. D’acteur. Etd’homme. César ou pas, nous, on a toujours voté Tchéky!
Président, un rôle inhabituel?
Malgré mes deux voix, je ne me sens pas vraiment président. Je serai davantage comme François de Rugy à l’Assemblée, je donnerai la parole!
Acteur, mais aussi cinéphile?
Je fais des efforts. Quand on est à l’Académie des Césars ( Ndlr, il a été nominé au César du meilleur espoir Masculin pour Petrovic dans la Balance), on reçoit énormément de films, ce qui permet de découvrir des cinéastes qu’on n’aurait pas rencontrés autrement.
Malgré votre immense filmographie, vous n’en avez jamais reçu de César?
Nul n’est prophète… Mais je ne me pose pas trop la question. Si j’obtiens un César un jour, je serai très heureux d’être reconnu par quelques pairs… (sourire)
Cannes. Souvenirs de Festival?
J’ai monté les marches dans des conditions géniales, avecNick Nolteou Emir Kusturica… (Silence. Puis soudain très ému, presqu’aux larmes). J’en profitais pour voir mon père ( Ndlr, chauffeur routier turc) à Fayence, où il avait construit sa maison tout seul. Je le surnommais l’homme de fer, et je venais ici pour lui…
Cannes, c’est aussi… le projectionniste dans la Cité de lapeur, et les Nuls!
Ah oui, ça s’est fait par hasard! Je me baladais au Trocadéroun jour, à la cinémathèque, et je les croise. Ils me disent: « Tiens, ça te dirait pas de jouer un projectionniste assassiné pour notre film? » . Ce fut un tournage délirant, j’ai adoré.
Àvous voir, on sedemande comment vous avez joué autant de sales types?
J’ai aussi fait d’autres choses, mais ce sont des rôles forts dans des films populaires, des polars d’action que j’aimais moi-même regarder plus jeune. Quelque part, le méchant est aussi un type de héros, une espèce deNemesis. Et puis c’est un exutoire, une façonde forcer le trait, d’autant que j’ai joué des méchants un peu expressionnistes, auxquels j’ai tenté d’apporter une certaine humanité.
Une certaine incarnation du polar de tradition française?
Peut-être… C’est agréable à entendre en tout cas. La gueule, elle, elle est là. Mais c’est dans les gènes: mon père ressemblait à Lino Ventura! Après, il y a aussi d’autres choses à creuser chezmoi, que n’a pas encore creusé le cinéma français…
Et pour Luc Besson, un acteur fétiche?
Ça relève plus d’une admiration mutuelle. Jouer le mentor de Nikita, c’est inoubliable, et dans Le baiser mortel du dragon, mon personnage est complètement déjanté, j’adore. Dans Jeanne D’arc, il y a unpeu plus de comédie. J’aimerais retravailler avec lui.
Lucien Baptiste, enfin un héros positif!
Il est beau ce personnage! Les auteurs de The Missing l’ont écrit en pensant à un ami de leur père, un détective français. J’ai d’abord refusé dem’engager pour six mois de tournage, je venais d’avoir une petite fille, et puis jeme suis dit: quand même! Je suis super fier de cette série, mais il n’y aura pas de saison , car après le succès des et , ils ne veulent pas décevoir.
Et la musique, quelle part dans votre vie?
J’aime me faire plaisir enconcert avecmon groupe, dire des textes plus intimes, à fleur de peau dans mes chansons, et ce contact direct avec le public, dans l’instant. Mais je ne peux pas arrêter de jouer la comédie. Le jeu, c’est le fruit de mes questionnements, et je dois les exprimer.