Nice-Matin (Cannes)

Loup-Denis Elion: sa vie après Scènes de ménages…

Après 4 500 sketches depuis 2009, « Cédric » a décidé de quitter la série de M6. Juré aux Rencontres cinéma de Cannes, le comédien veut incarner le chevalier de Saint-Georges

- PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE CARINI acarini@nicematin.fr PROPOS RECUEILLIS PAR A. C.

On le sait, Cédric et Marion, c’est fini! Loup-Denis Elion et Audrey Lamy, les « poussins » de Scènes de ménages, ont décidé de voler de leurs propres ailes, même si on les verra toujours sur M6 jusqu’en juin 2018. Jouissant de sa nouvelle liberté (ça tombe bien, c’est le thème de cette année) aux Rencontres cinématogr­aphiques de Cannes (RCC), le comédien tente de faire bon ménage avec les autres jurés. « Ah ça, il faudra demander à ma femme ! ironise l’intéressé, qui a déjà connu l’expérience au festival TV de La Rochelle. Làbas, ça s’est très bien passé. À l’heure du choix, on s’est engueulés entre jurés, mais ça, c’est normal, et c’est passionnan­t. Et puis je suis très content d’être aux RCC, car c’est aussi l’occasion de voir de bons films. » Entre deux projection­s, on a fait un arrêt sur image.

Alors, c’est bien fini, plus question de faire une scène de ménage ?

Toutes les bonnes choses ont une fin. Neuf ans de série, c’est déjà assez chronophag­e. Il fallait sortir d’un certain confort, et « Allô, bonjour, Antoine Duléry, auteur ». Au téléphone, l’une des vedettes les plus populaires de France. Mais Antoine Duléry, c’est un peu comme un shampoing deux en un. Non seulement le plaisir de voir le comédien. Mais aussi le rire devant les imitations de tous ses copains. Dans Antoine Duléry refait son cinéma, qu’il a joué cette semaine à Cannes, le voilà qui raconte une fin de soirée où sont conviés aussi bien Fabrice Luchini que Jean Dujardin. On rigole avec Belmondo son idole, on se gondole à l’évocation de Louis Jouvet ou Gabin. Le septième art rigolard, mais aussi un bel hommage, tendre et affectueux, aux talents du grand écran. Du commissair­e Larosière à Paul Gatineau dans Camping, Duléry se multiplie à l’envie. À tour de (d)rôles…

Duléry refait son cinéma ? Du nouveau au show ?

J’ai affiné le spectacle, ajouté des personnage­s comme Marlon Brando, Roger Hanin, Sarkozy aussi, car il a dit un jour : «tous les hommes politiques sont un peu comédiens ». Mais c’est toujours Antoine Duléry dans une soirée entre amis, qui ne parvient pas à rentrer chez lui alors que sa femme l’attend. Il y a aussi Daniel Prevost, Patrick Chesnais, Jean c’était le bon moment de consacrer mon énergie à faire autre chose. C’est toujours un piège de se laisser enfermer dans un rôle de série. Ce fut un plaisir, mais c’est une décision assumée avec Audrey Lamy. Dujardin, et même un psy. C’est une comédie à l’italienne, anachroniq­ue, surréalist­e, drôle j’espère, mais aussi émouvante.

Et un bel hommage aux monstres sacrés et à l’amitié ?

Exactement! Je n’imite que les gens que j’aime et j’admire. Ce sont des acteurs avec un énorme charisme, du talent, et une personnali­té extrême car ce sont des grands artistes avant tout. On les reconnaît au geste ou à la voix, ce sont des stars éternelles.

Jusqu’à  ans, Vous étiez fou de dessin. L’imitation tient un peu de cela aussi ?

Tout à fait. En deux-trois traits je dessinais un bonhomme. J’essaie de faire pareil en deux trois gestes, pour que quelqu’un soit tout de suite identifiab­le. C’est d’abord un travail d’observatio­n.

Pourquoi ce besoin d’imitation ?

Tout petit, j’étais très introverti, j’avais besoin d’être un autre. Mes imitations sont plus proches de l’interpréta­tion, je me fonds dans Luchini ou Arditi, ce n’est pas juste du mimétisme. Je suis allé au-delà de ma timidité pour faire rire les copains car vous savez, l’acteur n’est jamais très bien, seul avec lui-même.

Il y a donc une vie après cette série à succès ?

J’écris déjà des scénarii. L’écriture, c’est toujours sain pour un comédien, ça permet de révéler ses envies, même si ça n’aboutit pas forcément. C’est un autre moyen de s’exprimer. J’ai des projets de comédie, mais aussi de téléfilm historique sur le chevalier de Saint-Georges, le premier compositeu­r noir de musique classique. Un personnage que je ne connaissai­s pas et que j’ai rencontré par l’Opéra. Il a eu une vie romanesque formidable et un fort impact culturel et artistique sur son époque.

En tant que comédien noir, vous avez vous-même un rôle à jouer sur la diversité à la télé ?

C’est très étrange… J’essaie de ne pas penser à cette question quand je joue, mais en même temps, je suis Belmondo, votre idole, est même devenu un de ces copains ? Je l’imitais déjà quand j’avais  ans ! Je suis redevable de sa rencontre à Claude Lelouch, et on a joué ensemble au théâtre durant neuf mois. C’est devenu un grand ami en effet. Jean-Paul, c’est pour moi le cinéma, le rire et les pleurs ; le polar et le film de cape et d’épée, la nouvelle vague et le film d’auteur. C’est le père, le frère qu’on aimerait avoir, le copain auquel on veut tous ressembler. obligé d’y voir une utilité. Car hélas, il y a toujours un petit effort à faire dans le paysage audiovisue­l où règne toujours trop de machisme, d’homophobie et de racisme. Personnell­ement, je suis content de n’avoir pas eu un rôle de black, mais je dois considérer le sujet. Quand Omar Sy a eu le César, il y a eu beaucoup de questions là-dessus, mais c’est parce qu’il est bon acteur, pas parce qu’il est noir!

Acteur, vous êtes aussi ténor ?

Je l’ai été, mais j’ai complèteme­nt arrêté. Je n’ai plus le temps de travailler ma voix pour être dans un choeur profession­nel comme autrefois. Et puis l’hygiène de vie, depuis que j’ai rencontré Audrey Lamy (rires)… Mais aux RCC, je ferai peut-être un boeuf

Vous avez également tourné sept films avec Claude Lelouch ?

J’aime sa liberté et l’improvisat­ion. Il adore les acteurs, et il y a toujours un esprit de troupe sur les tournages.

Une atmosphère de bande, comme dans un film de Sautet ?

Ah oui, j’adore ! Même si le milieu est devenu plus individual­iste, j’y ai encore de grands copains, comme Jean Dujardin. avec Tchéky Karyo.

Cannes, c’est aussi le Festival?

J’y suis venu comme talent Adami en , j’ai monté les marches dans un costume crème beaucoup trop grand pour moi ! Mais j’ai adoré l’expérience. Dans le Palais, quand il y a une belle scène à l’écran, le public applaudit, comme au théâtre!

À Nice, il y a eu aussi la pièce Open Space, de Mathilda May ?

C’était super de jouer ainsi avec le corps, sans prononcer de mots intelligib­les. J’ai fait des arts martiaux et l’école du cirque et en fait, j’adorerais être un action hero !

Vous êtes devenu populaires avec deux rôles aux antipodes : mari infidèle dans Camping, et inspecteur Larosière dans les Agatha Christie ?

Camping, c’est plus de quatre millions d’entrées, dans un rôle de compositio­n alors que Larosière me ressemble davantage. Ce sont deux rôles complèteme­nt différents, j’en suis très content.

Une popularité sur le tard ?

J’ai toujours travaillé. Et Gide disait : « Faut suivre sa pente, du moment qu’elle monte...».

Vos projets hors one-man show ? J’ai tourné deux polars , Crime parfait, pour France , où je joue une sorte de Colombo. J’ai aussi le projet de réaliser mon premier film, une comédie à l’italienne que je suis en train d’écrire. Je dois également tourner dans l’adaptation cinéma d’Edmond, la pièce à succès. Enfin, j’ai un projet de film pour Belmondo, avec mon compère Fabien Onteniente. Reste à convaincre Jean-Paul.

Si vous deviez imiter Duléry ?

Ah… C’est compliqué. Je n’oserais jamais !

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Quand Antoine Duléry imite un Fabrice Luchini plus vrai que nature... (DR)
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A l’hôtel Splendid, Loup-Denis Elion est à l’aise, dans son nouveau rôle de juré aux RCC. (Photo G. T.)

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