Chassé du Zimbabwe, un Cannois témoigne
Alors que le Zimbabwe est en pleine transition après la démission la démission du président Robert Mugabe, Lao Watson Smith porte un regard mitigé sur la situation. « Nous avons bien sûr célébré la nouvelle. Mais Emmerson Mnangagwa – qui doit prendre officiellement les rênes du pays (lire par ailleurs) –estun monstre, responsable du génocide de Gukurahundi qui a fait près de 20000 victimes. Il fallait du changement. Mais j’espère que le peuple n’acceptera pas un nouveau dictateur. » Expatrié à Cannes depuis quinze ans, cet entrepreneur, aujourd’hui âgé de 43 ans, a tout perdu en 2002. Installés au Zimbabwe depuis quatre générations, les Watson Smith étaient à l’époque à la tête d’une ferme florissante de 8000 ha à quelques kilomètres d’Harare, la capitale lorsqu’ils ont été chassés brutalement. « Nous avons eu quelques heures pour quitter le pays. Le général Solomon Mujuru, ancien commandant de l’armée zimbabwéenne, et ses milices nous ont tout pris. Terrain, voitures, animaux, équipements...»
Cannes, terre d’accueil
Un préjudice que la famille estime a quelque 22 millions de dollars. Malgré une plainte déposée devant la cour suprême du Zimbabwe et un jugement rendu en leur faveur en 2003, les WatsonSmith n’ont jamais été indemnisés. C’est en France qu’ils ont trouvé une terre d’accueil. «Mes parents, qui connaissaient la région, ont voulu investir dans un pays économiquement stable.» Et c’est dans la cité des Festivals que la famille s’est reconstruite. Grâce aux fonds d’un groupe d’investisseurs, les Watson Smith ont acheté une centaine d’appartements à Cannes et créé trois sociétés qui emploient 18 personnes. Parallèlement, père et fils ont poursuivi leur bataille devant les tribunaux pour obtenir justice. «L’an dernier, nous avons rencontré la veuve de Solomon Mujuru qui est également l’ancienne viceprésidente du pays, Joice Mujuru. Elle a accepté de signer une reconnaissance de dette, ce qui est assez inhabituel pour une figure politique. Depuis, plus rien. » Hors de question aujourd’hui de retourner au Zimbabwe. «Beaucoup souhaitent désormais rentrer. Pas nous. Il n’y a plus rien là-bas. Nos animaux sont morts, le matériel délabré. Nous avons reconstruit une vie ici. J’ai deux enfants qui sont nés à Nice. Et nous sommes heureux. »