Mélanomes métastatiques: forcer leur résistance À la une
Une jeune chercheuse niçoise est récompensée pour ses recherches sur la résistance des mélanomes métastasés aux traitements ciblés
Y aller ou pas. La question m’a taraudée lorsque l’on m’a parlé de la petite Théa. Quelles conséquences pourrait avoir l’exposition médiatique de sa situation de petite fille née garçon. Et puis je me suis décidée à la rencontrer. Elle et sa famille. Et mes doutes se sont envolés. J’ai compris. J’ai compris que cette enfant ne voulait plus, ne pouvait plus vivre dans le secret. Quand rien ne peut lui être reproché, sinon d’être née comme ça, pourquoi lui intimer de se cacher ? Non, Théa n’a rien fait de mal. Elle est atteinte de dysphorie de genre. Un trouble qui n’a pas fini de livrer ses secrets et de nous troubler. Il nous bouscule, nous interroge, nous heurte… Mais est-ce sa faute à elle ? Non. Théa est une petite fille, à l’intelligence très vive. Accompagnée par des parents aimants, elle a accepté et veut nous le dire. A-t-on le droit de refuser de l’écouter ?
Elle est jeune, elle est jolie, elle est brillante. Rania Ben Jouira a réalisé au cours de sa thèse de sciences – qu’elle présentera dans quelques semaines – des recherches qui pourraient à terme contribuer à améliorer le traitement du cancer de la peau le plus redoutable : le mélanome cutané métastatique (lire cicontre). « Plus de la moitié des patients répond aux thérapies ciblées lorsqu’elles sont instaurées. En revanche, la majorité développe des résistances après quelques mois de traitements », explique la jeune chercheuse. Encadrée par Marcel Deckert, directeur de recherche au Centre méditerranéen de médecine moléculaire (C3M, Inserm, Université Côte d’Azur), Rania Ben Jouira a entamé des recherches pour décrypter les mécanismes cellulaires et moléculaires à l’origine de ces résistances. En s’intéressant particulièrement à ce que l’on nomme le microenvironnement tumoral, terreau très fertile pour les cellules cancéreuses. «La matrice extracellulaire (MEC) est un des acteurs clés de ce microenvironnement ; il s’agit d’un réseau de protéines extracellulaires qui peut être fabriqué par la cellule tumorale ». Pour échapper au traitement destiné à l’éliminer, la cellule cancéreuse édifie en quelque sorte une forteresse autour d’elle. Mais elle ne va pas s’arrêter là.
Processus machiavélique
« Les tumeurs de mélanome sont très hétérogènes ; la résistance acquise par quelques cellules tumorales peut être “transmise” aux cellules voisines via la MEC. » Jusque-là sensibles aux traitements ciblés, celles-ci vont, à leur tour, « se barricader ». Mais comment tout cela est-il possible ? « Habituellement, la MEC est fabriquée par un type de cellules non cancéreuses, appelées fibroblastes. Une certaine population de mélanome résistante à la thérapie ciblée n’a plus besoin de ces cellules ; elle fabrique elle-même “son” propre réseau matriciel abondant, rigide et favorable à la progression tumorale. En adhérant à cette matrice, les cellules voisines des cellules résistantes vont recevoir des signaux qui vont renforcer leur résistance à la thérapie. » Un processus machiavélique auquel les travaux de Rania pourraient contribuer à mettre