A Toulon, le boulevard de Strasbourg est créé à la même époque
Le boulevard de Strasbourg a, à Toulon, un destin semblable à celui de l’Avenue niçoise. C’est également à la suite de la venue de Louis-Napoléon Bonaparte - alors président de la République - que fut décidée sa construction. En , après s’être rendu au haut du Faron pour observer la ville, Louis-Napoléon Bonaparte suggéra d’abattre les remparts érigés par Vauban, qui étouffaient la cité et de construire un grand boulevard à la place. Comme à Nice l’appellation de ce nouveau boulevard rendit
L’un des plus célèbres sera celui de la Maison Dorée, à la place actuelle de la Société Générale. Cette « Maison » est fréquentée par des gens célèbres comme l’écrivain Mistral ou l’homme politique Paul Déroulède, romancier, député, homme politique important de la IIIe République, mort à Nice en 1914. Léon Gambetta, président du conseil (équivalent de Premier ministre aujourd’hui) et de la Chambre des députés, y faisait des entrées spectaculaires lorsqu’il venait voir son père à Nice. Auprès des journalistes qui viennent le rencontrer, il se fait fort de réciter par coeur le budget de la France.
Des cochers et des tramways
En 1883, l’Avenue devient le centre de presse de la ville avec l’installation de l’ Éclaireur qui précédera au numéro 29 notre journal Nice-Matin, installé là après la Deuxième Guerre mondiale avant de déménager dans les années 1980 dans la plaine du Var où il se trouve actuellement. Les intellectuels se retrouvent sur l’Avenue. Dans les salons de l’«Hôtel des Îles britanniques», dont l’immeuble, près de l’actuel boulevard Victor-Hugo, a disparu aujourd’hui, deux dames niçoises tinrent salon – comme Madame Verdurin à Paris dans la Recherche du temps perdu de Proust. Elles s’appellent hommage à l’Empereur en prenant le nom de boulevard Louis-Napoléon. Le boulevard fut ensuite débaptisé en septembre
Madame de Stefanis et Madame Decori. La seconde, craignant que les voyous deviennent plus nombreux que les héros recommande ceci: «Plantez plutôt du chanvre que du laurier, car bientôt on aura plus de gens à pendre qu’à couronner!» Ces salons sont fréquentés par les écrivains Alexandre Dumas ou Frédéric Nietzsche, par le compositeur Gounod, ou encore par Gambetta. Napoléon III lui-même vint le visiter. En plus des café-concerts, il y a aussi les café-théâtres. Bien avant que s’ouvre au numéro 10, en 1905, ce temple de l’opérette que sera l’Olympia (occupé par l’enseigne Zara, aujourd’hui), on se rend ici au Claridge, où l’on applaudit sa danseuse à corde; là à la Gaîté; ailleurs à l’Ambigu ou à la Bua. Et, au croisement de l’actuelle rue Pastorelli, on va applaudir au cirque Niçois les jongleurs indiens, les sauteurs chinois, les acrobates génois, les nains, la chèvre savante, le cheval gastronome ou encore l’acteur monstre qui joue l’ Éléphant roi du Siam. Une fois par an, à partir des années 1890, le carnaval déroule sous les guirlandes lumineuses, son cortège fou de chars, grosses têtes et batailleurs de confetti. L’Avenue est décrite ainsi, au milieu des années 1880, par Stephen Liégeard, dans son livre la à la suite de la défaite française dans la guerre franco-allemande déclenchée par l’Empire français contre le Royaume de Prusse et la capture de Napoléon III. Il fut alors nommé boulevard de Strasbourg en hommage à la résistance de la capitale alsacienne face aux Prussiens. Comme pour l’Avenue à Nice, l’histoire du boulevard de Strasbourg est jalonnée par la construction de grands bâtiments : l’opéra en , le lycée Peiresc en , l’ancien collège Rouvière en , le musée en. « Côte d’Azur » qui a donné son nom à notre région : « À peine a-t-on quitté la gare et côtoyé l’imposante rangée d’eucalyptus qui abrite le trottoir, que les adjurations des cochers vous appellent «monsieur le comte», le fouet des omnibus, le sifflet des tramways à chevaux vous révèlent la présence d’une grande ville. Entre sa double rangée de platanes à hautes tiges, l’avenue de la gare se déploie. L’église néogothique de Notre-Dame, le Crédit Lyonnais, vieux palais de marbre, peuvent y compter parmi les plus remarquables édifices. Entre eux et à proximité s’ouvre la Bourse, petit temple de style grec, siège de retentissants procès. » La Bourse n’existe plus aujourd’hui. Son petit temple grec, situé en retrait de l’Avenue, au 50 avenue Gioffredo, a été transformé en salle des ventes. Quant au bâtiment du Crédit Lyonnais, il a été le premier grand établissement bancaire édifié sur l’Avenue. Ont suivi deux autres immeubles célèbres: celui, Belle Époque, des magasins de la Riviéra (aujourd’hui enseigne FNAC) en 1913 et, en 1916, celui des Galeries Lafayette aux façades ocre rouge et aux arcades turinoises. La Grande Guerre éteignit progressivement, à partir de 1915, les réverbères et les distractions de l’Avenue. Les grandes constructions ne reprirent qu’en 1921 avec les immeubles de la BNP et de la Société Générale. C’est le second qui, en 1976, devait être visité de nuit par un certain Spaggiari ! À cette époque, l’Avenue avait déjà pris le nom de Jean- Médecin (voir encadré). Mais pour tous, elle demeurait tout simplement l’«Avenue». C’est en , sous la mandature de Jacques Médecin, que le nom de son père Jean Médecin a été donné à l’Avenue. Jean Médecin a été maire de à , avec une interruption de à où il laissa place à Jacques Cotta - père de la journaliste et éditorialiste de Nice-Matin Michèle Cotta. Il fut également candidat à l’élection présidentielle en et secrétaire d’État de la Présidence du Conseil, en , sous Edgar Faure. Jean Médecin était parfois surnommé « le roi Jean » ou bien encore « Jan de Nissa ». Total changement de physionomie de l’avenue Jean-Médecin, en , sous la municipalité de Jacques Peyrat avec la construction d’un nouveau tramway. L’Avenue avait connu un tramway tiré par les chevaux dans les années et un tramway électrique au début des années . Au XXIe siècle, les arbres sont abattus, les rails installés. L’Avenue entre dans son ère moderne.