La géolocalisation en question
C’est la crainte de la CGT qui s’est abstenue de voter l’installation d’un GPS sur le boîtier de verbalisation électronique, connecté directement au PC radio pour localiser l’agent
Surveillés ou protégés? La question se pose à nouveau, au sein même de la police municipale. Un comble ! L’objet du débat, si ce n’est du délit ? Le PVE. Pour Procès Verbal Électronique. Depuis quelques mois, les agents sont équipés d’un boîtier à l’allure de smartphone, mais ce n’est pas exactement un téléphone portable. Ce terminal permet de rédiger un PV et de l’adresser directement au centre de traitement à Rennes, sans passer par la souche papier. Avec avis déposé sur le pare-brise du contrevenant. Une mesure qui limite déjà les palabres et contestations. Mais, en cas de besoin, l’appareil dispose également d’un bouton rouge d’alarme, relié au PC Radio qui identifie aussitôt le boîtier concerné. Mais la Ville a décidé d’aller encore plus loin, avec la mise en place d’une géolocalisation intégrée, afin de localiser immédiatement l’agent. Cette fois, c’est Robert Bacchi, secrétaire général de la CGT qui est alarmé : « On nous parle de sécurité (voir encadré ci-dessous), mais nous, ce que l’on craint, c’est que les agents sont pistés en réalité ».
Big Brother à la PM ?
Des policiers fliqués ? Le syndicaliste persiste et signe : « Avec cette géolocalisation, on pourra observer le moindre déplacement d’un policier, évaluer sa durée… et si quelqu’un n’est pas dans les petits papiers de la direction, il peut être vite ciblé, estime-t-il. Et puis, du coup, comme on a tous une feuille de route à respecter, les agents risquent de s’y cantonner stricto sensu, et ne pas sortir de leur périmètre en cas de besoin, pour ne pas avoir ensuite à sans cesse se justifier. C’est une entrave à la réactivité des agents ». Du coup, alors que la mesure était présentée en commission paritaire, la CGT s’est abstenue de la voter. D’autant qu’au-delà de la surveillance, Rober Bacchi redoute que ce système permette d’établir un nouveau dispositif sur le terrain, où le policier serait démultiplié, mais moins sécurisé. « Sur le rapport, on parle de protection d’un travailleur isolé. Ça veut dire quoi ? Qu’avec cette géolocalisation, le policier pourra désormais être seul à patrouiller ? Pour nous, c’est hors de question ! ».
Non à une patrouille en solo
Et l’élu syndical de légitimer sa crainte par un compte rendu de réunion avec le maire en janvier 2016, où il est évoqué « la possibilité de patrouilles pédestres en binômes séparés, notamment rue d’Antibes, chacun des agents empruntant le trottoir de part et d’autre de la chaussée, en gardant un contact visuel, à portée de voix ». À l’époque, Robert Bacchi s’y était déjà fermement opposé. « Quelques jours après, un employé municipal tentait de saisir l’arme une policière en patrouille afin de se suicider. Heureusement que cette policière n’était pas isolée ! Et l’hypothèse d’un binôme séparé d’un trottoir à l’autre a été abandonnée… ». Pas sûr qu’il en soit de même avec la géolocalisation, votée par les autres syndicats policiers. « Oui, mais au sein des effectifs, les avis sont beaucoup plus partagés », insiste Robert Bacchi. Géolocalisé ou pas, le débat est lancé.