Nice-Matin (Cannes)

Jean d’Ormesson ou « le crayon des enchanteme­nts »

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Un simple crayon à papier. Un objet symbolique déposé par le président Emmanuel Macron sur le cercueil orné du drapeau français de Jean d’Ormesson. Voilà l’image que l’on retiendra de l’hommage national à l’écrivain hier aux Invalides. Le chef de l’État a répondu à un voeu de l’écrivain, qu’il a cité : « À l’enterremen­t de Malraux, on avait mis un chat près du cercueil, à celui de [Gaston] Defferre, un chapeau, moi je voudrais un crayon, pas d’épée, pas de croix, un simple crayon à papier ». « Du moins puis-je vous rester fidèle en déposant sur votre cercueil ce que vous avez voulu y voir : un simple crayon, le crayon des enchanteme­nts. Qu’il soit aujourd’hui celui de notre immense gratitude et de notre souvenir », a-t-il ajouté. Après l’émotion, la France vit à l’heure du souvenir pour l’un de ses romanciers les plus populaires. L’académicie­n « fut ce long été auquel pendant des décennies nous nous sommes réchauffés avec gourmandis­e et gratitude. Cet été fut trop court », a déclaré le chef de l’État dans un discours truffé de références littéraire­s. « C’est cette clarté qui d’abord nous manquera », a-t-il poursuivi. La famille de l’écrivain, de nombreux membres de l’Académie française dont il était le doyen d’élection après en avoir été le benjamin, les anciens présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande, des ministres, des dizaines de personnali­tés du monde de la culture et de la politique ont assisté à cette cérémonie qui avait été précédée d’une messe en la cathédrale Saint-Louis des Invalides. L’ambition de Laurent Wauquiez est, bien entendu, de desserrer cet étau. Il dispose pour cela d’une forte base : les collectivi­tés locales conquises par Les Républicai­ns ces dernières années et la majorité au Sénat. Mais il lui faut s’imposer comme l’opposant numéro . Il a choisi de radicalise­r son discours pour y parvenir. Une approche tactique afin de profiter de la perte de crédibilit­é de Marine Le Pen. Mais comment transforme­r une tactique en stratégie de long terme pour retrouver le chemin du pouvoir ? C’est là que la tâche de Laurent Wauquiez se complique. Il ne peut s’en tenir à une opposition radicale. Il lui faut rassembler sa famille politique et convaincre aussi un centre qui, lui, se referme comme une huître : plus d’alliance avec Les Républicai­ns ont décrété les patrons de l’UDI et du Parti radical. C’est donc le deuxième enjeu de ce scrutin : le nombre de voix qu’y obtiendron­t la filloniste Florence Portelli et le juppéiste Maël de Calan. Paradoxale­ment, l’intérêt de Laurent Wauquiez est de l’emporter sans écraser ses rivaux pour pouvoir – comme il le promet sans cesse ! – leur « tendre la main » et les intégrer dans son équipe dirigeante. Ce serait pour lui la meilleure configurat­ion : incarner l’opposition la plus résolue sans provoquer une hémorragie vers En marche ! à l’affût de toutes les dissidence­s. L’opération relève de la haute voltige. C’est ce qu’avez réussi Nicolas Sarkozy en  mais Emmanuel Macron n’existait pas. Ce qui change tout.

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