Espionnage de salariés: Ikea risque de devoir s’expliquer au tribunal
La perspective d’un procès d’Ikea France se rapproche : le parquet de Versailles a requis le renvoi en correctionnelle du géant suédois, accusé de s’être illégalement renseigné sur certains de ses salariés avec la complicité de policiers. Ce réquisitoire du parquet, qui demande également le renvoi de quinze personnes, est l’aboutissement de près de six années d’enquête qui ont permis de lever le voile sur un système relevant de méthodes de barbouzes peu conformes à l’image de marque du groupe d’ameublement mondialement célèbre. Le parquet a notamment requis la tenue d’un procès pour violations du secret professionnel et collecte illicite de données personnelles au profit d’Ikea France, de son côté accusé de recel de ces infractions. Le juge a désormais trois mois pour faire connaître sa décision.
Contrat avec des policiers véreux
Ikea France s’est refusé à tout commentaire sur le réquisitoire du parquet, n’en ayant pas été notifié. La maison mère a quant à elle réagi en souhaitant « rappeler que les charges retenues contre [sa filiale] sont en totale contradiction avec ses valeurs, et Ikea continue à collaborer pleinement afin que toute la lumière soit faite ». Tout a commencé en février 2012, quand Le Canard enchaîné révèle que la direction de l’entreprise est soupçonnée d’avoir mis en place un système structuré de surveillance de certains salariés, notamment ceux à l’activité syndicale jugée embarrassante. Le but : récolter un maximum d’informations sur leurs antécédents judiciaires ou sur l’état de leur compte en banque. L’enseigne est notamment soupçonnée d’avoir passé un « contrat » avec des policiers ayant accès au Stic, vaste fichier policier répertoriant les auteurs et victimes d’infractions, afin qu’ils leur transmettent des données confidentielles. Quatre fonctionnaires de police ont d’ailleurs été mis en examen dans cette affaire.
Comédiens espions
Les syndicats accusent également la direction d’Ikea France d’avoir recruté des comédiens dont la seule mission était d’espionner leurs collègues et de rédiger des rapports. Plus d’une dizaine de personnes ont été mises en examen dans cette affaire. Parmi elles, l’ancien p.-d.g. France de 2010 à 2015 Stefan Vanoverbeke, son prédécesseur JeanLouis Baillot, ainsi que le directeur financier de 2009 à 2014, Dariusz Rychert, qui risquent tous un renvoi en correctionnelle.