Nice-Matin (Cannes)

Le chantier de Sophipolis dans l’oeil du cyclone

À la demande du préfet, la Ville a retiré le permis de ce projet mêlant hôtel, commerces et bureaux, chemin de Saint-Bernard. Le motif ? « Pour forte présomptio­n d’illégalité »

- M.-C.A mabalain@nicematin.fr

Que recèle exactement le projet Business Resort Sophipolis ? Pour le préfet Georges-François Leclerc, la destinatio­n finale de ce futur centre d’activités, mêlant ensemble hôtelier, commerces et bureaux, répartis sur une surface de vente de près de 12000 m2, dans la zone chemin de Saint-Bernard, à flanc de colline, est trop floue. Pire. Le représenta­nt de l’État évoque « une forte présomptio­n d’illégalité » et vient de demander au maire Michelle Salucki le retrait du permis de construire modificati­f délivré l’an dernier. Ce qui a été fait et affiché publiqueme­nt, en mairie. Le permis initial avait, lui, été délivré en mars 2014. Sur l’imposant chantier tout est arrêté. Ouvriers et engins sont partis. Aucun panneau. Aucun permis affiché. Ni d’ailleurs d’avis de retrait ! Une partie de la palissade est couchée, livrant un panorama extraordin­aire : blocs de roche et gravats de terre arrachés à un pan de la colline, cratères, monticules gigantesqu­es. Un espace quasiment ouvert aux quatre vents.

« Nous avons constaté une dérive...»

Comment en est-on arrivé là ? Serge Castel, directeur de la DDTM (Direction Départemen­tale des Territoire­s et de la Mer) explique : « Nous avons constaté une dérive de ce projet déjà ancien et qui a connu des difficulté­s à obtenir l’autorisati­on de la CDAC (Commission départemen­tale d’Aménagemen­t Commercial) finalement accordée en 2008. Puis, il y a eu plusieurs évolutions de la destinatio­n interpella­nte » .En 2013, la SCI Sophipolis, gérée par la société PROGEREAL, a obtenu de la CDAC le feu vert pour une extension de la surface de vente : 10 880 m2 et 17 cellules, au lieu de 4 129 m2 et 10 cellules. Le projet avait suscité de nombreuses inquiétude­s des riverains et des associatio­ns de défense de l’environnem­ent, notamment concernant l’impact sur la circulatio­n, déjà difficile dans le secteur. Le permis de construire accordé en 2014, les travaux de terrasseme­nt ont débuté en 2016 pour une livraison de l’ensemble espérée fin 2018. Mais, en 2017, le projet connaît une nouvelle évolution avec une demande de permis modificati­f. Permis accordé. « Une modificati­on est minime »,

assurait la mairie à l’époque. Quoi qu’il en soit, le permis accordé a été passé au crible par les services de l’État. « Nous avons trouvé une dissonance entre la déclaratio­n sur les formulaire­s et les plans, déclare Serge Castel. D’où cette forte suspicion d’illégalité qui a conduit au retrait du permis ». Michelle Salucki rappelle que ce projet a été initié avant son arrivée à la tête de la mairie, le permis étant accordé par son prédécesse­ur quelques semaines avant le premier tour des élections municipale­s de 2014. À l’époque, la candidate avait exprimé ses réserves sur le projet : « Mais, le programme était validé. Nous avons vu là une source d’emplois non négligeabl­e. Nous avons aussi été intéressés par l’implantati­on d’un hôtel haut de gamme. Il était aussi question que Pôle Emploi s’installe, là...». Sophipolis sur la sellette, ce n’est pas nouveau. Le projet a été pointé du doigt lors d’un conseil municipal de la ville de Cannes, en juillet dernier. Le maire David Lisnard a dénoncé une réalisatio­n « qui porterait un coup extrêmemen­t dur à nos commerces » . Il annonçait avoir alerté le préfet et la CCI. L’appel a été entendu, semble-t-il. Dans une interview accordée à notre titre en début d’année, Georges-François Leclerc avait évoqué un risque de « surdensité commercial­e » dans le départemen­t, qu’il entend prévenir. La suite ? « Il faut revoir toute la procédure administra­tive mais le dossier est dans une phase de contentieu­x entre l’État, la Ville et le porteur de projet », conclut le directeur de la DDTM.

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