Clément, intolérant aux ondes, vit dans un fourgon
Un homme de 40 ans vit dans son véhicule pour se protéger des ondes et des circuits électriques. Une « électrosensibilité » qui lui a valu une batterie de tests à Paris
Un petit fourgon utilitaire, un brin cabossé, tout ce qu’il y a de plus banal. Garé dans une artère cossue du CapMartin. Sauf que c’est dans ce véhicule que Clément Toulliou vit et dort. À même le sol, un matelas d’usage. Les fenêtres, elles, sont obstruées par de l’aluminium. « Je suis électrosensible », justifie cet homme de 40 ans. Pour faire bref, il ne supporte plus les ondes, ni les circuits électriques. « Avec ce système, ça permet d’arrêter et de renvoyer les ondes», chuchote-t-il pour ne pas chambouler la quiétude des voisins.
« Sans mes parents, je me serai suicidé »
L’homme, bien que d’apparence discrète, n’est pas toujours vu d’un bon oeil dans le quartier. Pourtant, l’emplacement revêt pour lui un aspect stratégique. «Les deux immeubles qui m’entourent me protègent des antennes relais», assure-t-il. Et puis, ses parents vivent dans un appartement à deux pas de son chez soi improvisé. «Ils m’amènent à manger et prennent soin de moi. Je ne peux même plus travailler (1). Mon travail, c’est de rester en vie. Sans eux, je me serai suicidé. Ma vie est un enfer sur terre.» C’est chez eux qu’il prend des douches. En coup de vent, toujours, car il ne souhaite guère s’éterniser dans un lieu truffé d’ondes. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a déserté, en octobre 2017, son appartement de Rennes et sa Bretagne natale. Dès lors que ce n’était plus supportable pour son corps. Si Clément Toulliou a vu les premiers symptômes survenir il y a deux ans, la maladie n’a fait, semble-t-il, qu’empirer avec les mois. «Au début, en touchant mon téléphone, j’avais des fourmillements ou alors un échauffement de l’oreille. Désormais, si je m’expose, la souffrance est énorme. J’ai mal à la tête comme si elle était dans un étau, le corps et le coeur sont compressés », relate-t-il, tout en insinuant que la maladie de Lyme, dont il souffre depuis le plus jeune âge, a un lien avec la naissance de cette électrosensibilité. « Et ce ne va pas aller en s’arrangeant ! Macron veut mettre la 4G de partout. C’est le pire qu’il puisse nous arriver. Il n’y aura plus de zone pour se réfugier.» Ces fameuses zones blanches qui ont tout l’air d’un exutoire pour Clément Toulliou.
Recherche zones blanches désespérément
Après presque une année d’attente, le quadragénaire a été récemment consulté à Paris par le fameux Professeur Dominique Belpomme, spécialiste de la question (lire ci-dessous). Avec une batterie de tests à subir. Ce dernier lui délivre alors un certificat médical. «Clément Toulliou est atteint d’un syndrome d’intolérance aux champs électromagnétiques associé à un syndrome d’hypersensibilité multiple aux produits chimiques (...) Ces syndromes ont été mis en évidence au plan clinique et confirmé par des tests sanguins et d’imagerie médicale », peut-on lire sur le document. Lequel conseille d’éviter au maximum une exposition «sous peine d’atteinte à sa santé sous la forme d’une détérioration cérébrale sévère.»
En quête d’un logement adapté
De cette visite, il en tire un soulagement non feint. «Ce n’est pas psychologique», souffle-t-il. Mais peu d’espoir de guérison en dépit d’un traitement onéreux ( «250 euros par mois ») et pas pris en charge. «Ça ne fera pas de miracle même si chez certains, on constate une légère amélioration. Le meilleur traitement, c’est de s’éloigner le plus des ondes.» Son seul réel espoir ? Dénicher un logement adapté dans un rayon de 20 kilomètres autour de Roquebrune-Cap-Martin. Dans ses annonces (2), il dit chercher « un studio en soussol, rez-de-chaussée ou flanc de colline, un cabanon ou une cave aménagée… » En quête de zones blanches, désespérément.