Nice-Matin (Cannes)

L’épreuve de la maladie… une seconde fois Tenir compagnie aux patients hospitalis­és

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La voix douce et posée contraste avec un tempéramen­t énergique. Christiane Oliva, bénévole au comité des Alpes-Maritimes de la Ligue contre le Cancer a un agenda de ministre. « C’est ma fille qui me dit ça. C’est vrai que je suis très occupée. » A  ans, Christiane est une incontourn­able à la Ligue. «Je suis venue peu après l’ouverture, en mars . J’avais lu un article dans Nice-Matin à ce propos » .A l’époque, Christiane se bat contre un cancer qu’on lui a diagnostiq­ué alors qu’elle venait à peine de prendre sa retraite. Elle passe par la case chirurgie, puis la radiothéra­pie avant de finir par  ans d’hormonothé­rapie. Autant dire qu’elle a fait le tour de la question. « Le plus difficile, ça a été de l’annoncer à mes enfants. J’ai eu peur… de leur faire peur. Je me souviens être sortie de l’hôpital, c’était Saint-Roch à l’époque, je me suis assise sur les marches en face du parc et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Finalement, quand je suis rentrée chez moi, rien qu’à voir ma tête ils avaient compris. Je me souviens qu’à l’annonce du diagnostic j’avais très peur de souffrir, plus que de mourir. Et puis je suis allée au combat. Contre le cancer. Pas “mon” cancer comme ce qu’on peut entendre. Car ce n’était pas le mien. Il est venu habiter chez moi, mais je ne l’ai pas invité. » Aujourd’hui, en pleine forme, Christiane est patient-expert – « je préfère dire patienttém­oin » – au Centre Antoine-Lacassagne. « C’est important pour les malades d’échanger avec des personnes qui sont passées par le même chemin qu’eux et qui peuvent les rassurer, leur donner des conseils. » Cette dynamique grand-mère (elle a deux enfants et trois petits-fils), élue Super Mamie , a logiquemen­t voulu s’investir dans la Ligue. Elle y partage notamment sa passion pour le théâtre au cours d’ateliers qu’elle a proposés. « Ça montre que la vie est belle. Pendant  heures, il n’y a plus madame Unetelle-qui-a-un-cancer mais une comédienne qui interprète un rôle. » Elle a même monté une pièce (« Vive la colocation »). « En faisant tout cela, je me suis remise dans un circuit de vie que j’avais interrompu. » Et comme un pied de nez à la maladie, la bande de comédiens compte bien « partir en tournée » comme dit Christiane en riant, et se produire dans plusieurs villes de la région. Emmanuel Martin est d’un naturel affable. Une qualité dont il a su tirer parti en s’investissa­nt auprès de la Ligue contre le cancer. Cet ancien patient, traité en , n’a pas bénéficié des services de l’associatio­n à l’époque – « Je n’en ai pas ressenti le besoin ». Pourtant, lorsqu’il achevait les soins, il a eu la curiosité de pousser la porte de la structure rue Alfred-Mortier. « Paradoxale­ment, je sortais de la maladie mais j’ai remis un pied dedans pour aider les autres. Je ressens le besoin d’être utile. » Le sexagénair­e a dû arrêter de travailler lorsque le cancer a été diagnostiq­ué. Il n’a pas pu reprendre. Pour autant, il a eu d’un cancer du sein en  après un contrôle de mammograph­ie. Il a été pris à temps. J’ai été opérée en août puis j’ai suivi des séances de radiothéra­pie de septembre à novembre. Tout s’est à peu près bien passé. » Karine le conçoit alors comme une épreuve de la vie. Ce n’est pas simple mais elle s’en sort, arrive à jongler avec son travail d’enseignant­e qu’elle doit interrompr­e le temps des traitement­s et l’éducation de ses deux filles. Et puis arrive un contrôle « de routine » au printemps . « Les médecins m’ont dit que j’étais en rémission. » Pour elle, la maladie est j’étais chez moi, allongée sur le canapé et j’ai senti un petit truc sur ma poitrine, de l’autre côté. Je me suis dit que je devais me faire des idées, je ne voulais pas déranger les médecins pour ça. Et puis finalement, j’ai préféré passer un coup de fil au Centre Lacassagne. J’y suis allée deux jours après et c’est tombé. Cancer du sein. Encore. Ça m’a fait l’effet d’un coup de massue. J’étais dans la dynamique de la rémission, ça m’a stoppé net en plein vol. D’autant que ce n’était pas une récidive du premier mais un autre type de cancer… C’est d’après ce que l’on m’a dit un cas de figure très rare. » L’exception qui confirme la règle, de la chimio. Ça a été dur à digérer. » besoin de s’occuper. « Je voulais m’engager mais je devais rester libre. » Pudiquemen­t, il explique avoir besoin de souffler de temps en temps. Il n’a plus ses capacités d’antan, est vite fatigué. Un lundi sur deux, il se rend au Centre Antoine Lacassagne où il visite les malades. « Je vais voir les patients de l’hôpital de jour. Je frappe à la porte et je me présente. Certains sont méfiants. D’autres sont ravis d’avoir un peu de compagnie. » Car c’est bien là toute sa mission : discuter, partager un petit moment avec ceux qui le souhaitent. « On parle de tout et de rien, de cinéma, de de rééducatio­n à hurler de douleur chez la kiné. Mais j’ai fini par récupérer mon bras, je peux le bouger normalemen­t aujourd’hui. »

Anticiper les effets secondaire­s La chimiothér­apie et les effets secondaire­s l’épuisent. « Je suis venue à la Ligue un peu par hasard. C’est une amie qui m’en avait parlé. Au début je pensais que je n’en avais pas besoin. Je ne m’y voyais pas.» Finalement, m’a fait énormément de bien. J’ai discuté avec la psychologu­e, Alexia. Elle a aussi rencontré mes filles, qui ont aujourd’hui  et  ans. Ça leur a aussi fait du bien. Chacun réagit différemme­nt. Moi j’avais besoin d’anticiper et de savoir tout ce qui allait se passer, quels effets secondaire­s j’allais ressentir. » La socio-esthéticie­nne trouvait des solutions à chaque problème : la peau sèche, la bouche pâteuse, les ongles…» qu’on ignore. Par exemple que lorsque les cheveux tombent, ça fait mal. » La Niçoise a fini son traitement. Elle aurait aimé retravaill­er en mi-temps thérapeuti­que, mais on lui a répondu que ce n’était pas possible. Du coup, elle enchaîne à présent les galères administra­tives… avec le sourire et une force de caractère inébranlab­le. musique… Parfois ce sont les accompagna­nts qui posent des questions au sujet des traitement­s, des effets secondaire­s. Je ne suis pas médecin alors je les oriente vers les soignants mais je peux leur donner quelques conseils. »

« Ça fait du bien de craquer parfois » Emmanuel écoute bien plus qu’il parle. Il offre à ces patients un espace où ils peuvent se confier voire vider leur sac. « Chacun a son tempéramen­t. Certains sont angoissés et ont besoin de parler. Il arrive que quelqu’un craque. Ça leur fait du bien parfois de se lâcher. » Le bénévole insiste sur le dialogue : « A l’époque, j’aurais aimé recevoir de telles visites. Je préconise toujours les chambres doubles. Parce que c’est utile en cas de pépin mais surtout, cela permet d’avoir un contact, de ne pas rester seul dans sa chambre pendant ces phases de traitement­s lourds. » Emmanuel aimerait pouvoir transposer ces visites à domicile – « il y a tellement de gens seuls » – mais cela demande des moyens et des bénévoles, encore trop peu nombreux.

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Textes et photos : Nancy CATTAN Axelle TRUQUET A  ans, Karine en paraît presque  de moins. Grand sourire aux lèvres, l’allure sportive, on a franchemen­t du mal à croire que cette Niçoise se relève d’un cancer du sein. Le deuxième. « J’ai été diagnostiq­uée une épreuve qui est derrière elle. Sauf...

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