Sclavo, une dynastie d’un siècle de recyclage Saga Repères
Le leader du traitement et recyclage des déchets des entreprises du Var et des Alpes-Maritimes souffle ses cent bougies cette année. Une aventure humaine riche en rebondissements
Sclavo, c’est l’histoire d’une aventure familiale qui se transmet depuis quatre générations et qui a commencé en 1918. C’est le récit d’une revanche sur la vie, celle d’un émigré italien venu s’installer à Nice. Chiffonnier à l’époque, après avoir connu les affres de la guerre et risqué la faillite, il a transmis son entreprise à son fils qui l’a lui-même transmis à ses enfants et ainsi de suite. C’est aussi l’histoire d’un métier : celui du chiffonnier, passé ferrailleur et qui, aujourd’hui, grâce au recyclage, participe à la valorisation des déchets pour lutter contre la pollution.
Des sacs de toile sous la promenade des Anglais
Né en 1891 au nord de l’Italie, Antoine Sclavo part s’installer à Nice. Après avoir travaillé à l’Hôtel Royal, « Le grand-père s’est mis à la récupération de chiffons pour en faire des sacs et de fers et métaux, raconte Jean-Marc Sclavo, l’aîné de la famille, âgé de 60 ans. À l’époque, il faisait ça pour le business. Aujourd’hui, on parle de recyclage. » Antoine s’installe avec sa femme rue Sorgentino. Il récupère les chiffons, répare et revend les sacs en toile pour les moulins des Alpesde-Haute-Provence. Sa petite affaire traverse tant bien que mal la crise économique de 1929, mais se trouve au bord de la faillite, à la fin de la guerre de 1940. Une quinzaine d’ouvrières y travaillent pour réparer les sacs. Par chance, Antoine est ami avec le maire de Nice, Jean Medecin. Quand ce dernier décide de doubler la promenade des Anglais, il achète les sacs en toile d’Antoine pour y couler le béton et réaliser son chantier. Les sacs étant rares, le chiffonnier fait venir du Brésil un cargo rempli des sacs utilisés là-bas pour le café. Et sa femme Marie se rend ellemême en auto au port de Monaco pour les récupérer. Dans les années 50, le père de JeanMarc, Augustin, reprend l’entreprise et se spécialise dans les fers et métaux. Son dépôt est alors situé boulevard Sainte-Agathe. Il travaille avec les parfumeries de Grasse et de grands bâtisseurs de l’époque comme Spada, Nicoletti...
Crises successives
À sa mort, en 1979, son fils Jean-Marc reprend l’entreprise au pied levé. Aidé de sa femme Jocelyne, puis de ses frères Michel et Antoine, il manque plusieurs fois de tout arrêter. Ils sont alors rue Auguste-Gal à Nice. En 1981, Jean-Marc achète une multibenne pour le transport des matériaux, un vieux Berlier de 1964, pendant qu’Antoine s’attelle au négoce des métaux et des marchandises. Un troisième dépôt est ouvert rue Chanoine-de-Bailet. En 1986, « avec zéro de chiffre d’affaires », Jean-Marc et Antoine viennent s’installer au Capitou, à Fréjus « où il y a plus de ferraille », tandis que Michel reste dans les Alpes-Maritimes. En 1992, avec la crise économique, les difficultés sont telles que Jean-Marc envisage de vendre « aux Américains. On était une petite dizaine ici, on n’avait plus de sous. Mais mon frère Michel était très malheureux alors j’ai dit : on ne vend plus. » Malgré la concurrence, l’entreprise se retape doucement. Spécialisée dans le traitement des déchets et des fers et métaux, elle saisit l’opportunité, en 2000, de rejoindre Praxy, un nouveau groupement indépendant pour la gestion globale des déchets, à vocation nationale. Sclavo en sera l’un des membres fondateurs. Un tremplin puisque ce réseau traite avec des entreprises comme EDF, Vinci construction, de grands groupes automobiles... « Ça nous a tirés vers le haut », reconnaît JeanMarc. Le label ISO 14001 est décroché et les échanges sont fructueux. De gros investissements sont faits dans le matériel et la mécanisation. Les sites se multiplient. Aujourd’hui, l’entreprise se porte à merveille, dans un secteur en plein essor et porteur d’emplois. Elle ouvrira bientôt un huitième site au Capitou, à Fréjus, et un autre encore dans le Var en 2019. « Nous sommes fiers de transmettre notre entreprise à la quatrième génération maintenant, sachant que notre métier n’est pas un cul-de-sac. La valorisation des déchets, c’est l’avenir », confie Jean-Marc, ravi de célébrer ces cent ans. Et, par chance, la dynastie n’est pas prête de s’éteindre.