Des saisies sur les comptes de femmes victimes de PIP
Les victimes le vivent comme un affront de plus. Fort d’un arrêt de la cour d’appel qui le conforte, l’ex-certificateur de PIP lance des procédures de recouvrement. Légal… mais saisissant
Ce n’est pas un aléa. Pour certaines, c’est « une catastrophe». Le 22 janvier dernier, une cinquantaine de femmes, qui sont ou furent porteuses de prothèses PIP, ont vu leurs comptes en banque bloqués, avec une partie de leur argent prélevé.
‘‘ Leur avocat n’a de mots assez durs pour dénoncer une procédure « humiliante ». Le paradoxe est que ces « saisies attribution » sont totalement dans les clous de la légalité.
Pas responsable
Celui qui les a lancées n’est autre que l’ex-certificateur de PIP, géant mondial du contrôle qualité : TÜV Rheinland, qui entend bien récupérer des sommes versées il y a trois ans. Ou plutôt, une mince part de ces sommes. Rappel historique : pendant des années, des salariés de TÜV Rheinland et TÜV France ont audité les services de la société PIP, Poly-Implant-Prothèse. Or, le fabricant varois de prothèses mammaires remplissait ses implants d’un gel non déclaré, donc hors la loi et hors normes sanitaires. TÜV n’y a jamais vu que du feu, berné par les manoeuvres de PIP. Alors que sur le plan pénal, TÜV a été reconnu victime de l’escroquerie commise par les dirigeants de PIP, une procédure civile a été lancée à Toulon, pour tenter d’incriminer le certificateur. En 2013, la responsabilité de TÜV a été invoquée par 1 600 femmes victimes, dont les avocats affirmaient que les audits auraient été défaillants. Après avoir gagné au tribunal de commerce de Toulon, les femmes ont perdu en appel devant la cour d’Aixen-Provence (2015). C’est sur le fondement de cette deuxième décision, que TÜV demande aux femmes de rembourser les indemnités qu’elles ont reçues. C’est donc parfaitement légal. Une difficulté est tout de même que l’arrêt de la cour d’appel n’est pas définitif, vu qu’un pourvoi est instruit en cassation.
Les Françaises, seules ?
Autre question, les Françaises sont-elles seules dans l’oeil du cyclone? D’autres femmes, françaises elles aussi, ont préféré se manifester et ont négocié un échéancier avec TÜV, dès 2015. Leur avocat Me Jacky Petitot souligne que « certaines sont presque insolvables, d’autres remboursent 50 € par mois». Il ajoute: «Il est évident que les Françaises sont en première ligne ». Les Colombiennes par contre, 1 200 dans la procédure, sembleraient protégées par un océan et quelques milliers de kilomètres. Si l’application du droit est légitime sur le fond, la situation vécue par ces femmes reste saisissante. À l’image de Valérie, domiciliée à Toulon et dont le compte a été bloqué. « En plus, qu’on nous prenne des intérêts, c’est honteux ». Ceux-ci font effectivement flamber l’addition, de 3 400 à 4600€. TÜV répond aisément en rappelant que « les remboursements spontanés » se sont fait attendre (lire ci-dessous). Un bref calcul montre que cette cinquantaine de femmes représente environ 4 % des 5,4 millions d’euros versés. En incluant les frais d’huissier. Et en attendant la Cour de cassation.
Honteux qu’on nous prenne des intérêts ”