Nice-Matin (Cannes)

Dans le centre, les seringues en libre-service font débat

Le distribute­ur de seringues qui vient d’être installé près de l’ex hôpital Saint-Roch fait parler…

- CÉLIA MALLECK cmalleck@nicematin.fr

À peine installé qu’on veut déjà l’expulser. Le distribute­ur de seringues rue Édouard-Béri dérange. À commencer par Philippe Vardon, conseiller régional et responsabl­e du FN du bassin niçois. Jeudi, devant l’automate, il a condamné son installati­on: « Si on peut tout à fait comprendre l’utilité de ce récupérate­ur dans des espaces dédiés et clos, il est inacceptab­le d’envisager cette présence directemen­t sur la voie publique, qui plus est à quelques dizaines de mètres seulement de l’école maternelle Dubouchage. C’est délirant. » Le Distribox, installé tout près du centre de dépistage de l’hôpital Saint-Roch – et à près de 200 mètres de l’école – permet de déposer une seringue usagée pour récupérer, en échange, un «kit» avec une nouvelle seringue. Un dispositif décrié mais qui a son importance.

« Un gage de sécurité pour tous»

« C’est une bonne chose qu’un distribute­ur soit à nouveau disponible»,

s’enthousias­me le docteur Pascal Pugliese, président de la coordinati­on régionale de prise en charge du VIH (Corevih). Piqûre de rappel : en juin, un distribute­ur avait été fermé près de la gare. Boulevard Raimbaldi. À la demande des riverains. Le problème : une concentrat­ion de toxicomane­s et des seringues usagées au sol. Myriam Barni, la directrice régionale du groupe Sos solidarité­s le concède : «la rue était déshéritée, laissée à l’abandon.» D’où l’intention de ne pas répéter le même scénario. Pour cela, le Centre d’accueil et d’accompagne­ment à la réduction des risques des usagers de drogues (Caarud) – en charge du distribute­ur – a collaboré avec la mairie de Nice et l’Agence régionale de santé. « Le lieu a été bien choisi. Il est sur le trottoir, à proximité du centre de dépistage, du commissari­at et permet d’éviter des attroupeme­nts, ajoute la responsabl­e régionale. Les usagers de drogue jettent leurs seringues usagées dans le distribute­ur et non plus dans la rue. C’est un gage de sécurité pour les riverains, les enfants et les usagers ! Et puis, il y a un vrai travail d’éducation, de sensibilis­ation du Caarud Lou Passagin auprès des usagers. »

«La transmissi­on du VIH par seringue a quasi disparu»

Pour le docteur Pascal Pugliese, ce dispositif porte ses fruits. « La transmissi­on du VIH entre usagers de drogues a quasi disparu depuis qu’on a mis en place la distributi­on de seringues à usage unique, assure le président du Corevih. À condition qu’il soit accessible.

« C’est comme un distribute­ur de préservati­fs, si ce n’est pas accessible 24/24 h, on loupe la cible, image le médecin. Si vous le mettez dans le local fermé d’un Caarud, sans permanence la nuit, les usagers n’iront pas. De la même façon si on met un distribute­ur loin du centre-ville. C’est du bon sens. Je pense qu’il faut mettre le distribute­ur là où des gens sont susceptibl­es de l’utiliser.»

Travail pédagogiqu­e

«On comprend les inquiétude­s, avoue Myriam Barni. Mais nos profession­nels, au-delà du simple entretien ou réassort du Distribox sont aussi là pour expliquer aux personnes l’intérêt de ces automates. D’oeuvrer pour l’insertion et la médiation. Surtout dans les Alpes-Maritimes, qui est, en proportion, l’un des départemen­ts les plus touchés de France par le VIH. » Ainsi, la directrice de Sos solidarité­s espère réussir ce pari. Ce premier pas qui «dans la logique des choses » serait suivi d’autres dispositif­s. Mais encore faudra-t-il s’armer de patience. Nice a déjà du mal à imposer son seul distribute­ur, loin derrière Marseille qui en compte neuf.

 ?? (Photo C. M.) ?? Le Distribox permet aux usagers d’échanger leur seringue déjà utilisée contre une nouvelle à usage unique.
(Photo C. M.) Le Distribox permet aux usagers d’échanger leur seringue déjà utilisée contre une nouvelle à usage unique.

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