Nice-Matin (Cannes)

Polygone Riviera : des charges trop lourdes ?

Une quarantain­e de commerces envisagent de s’unir pour obtenir leur baisse, «plus de transparen­ce» et moins de «disparités». Ce que conteste le centre commercial, conforté par deux récentes décisions judiciaire­s

- Dossier : Laurent QUILICI lquilici@nicematin.fr Photos : Eric OTTINO ET Sébastien BOTELLA

Astronomiq­ues pour les contestata­ires

Mes charges sont plus élevées que mon loyer!» proteste un commerçant. «Au niveau national, elles varient entre 4% et 20% du loyer, alors que pour nous, c’est 40%, 70%, parfois même 110%», assure un autre. Les commerçant­s de Polygone Riviera paient-ils trop de charges communes au centre commercial ? C’est ce que pensent un bon nombre d’entre eux. Une quarantain­e de commerçant­s

se sont réunis fin janvier avec (1) deux avocats pour en parler. Certains ne les paient carrément plus depuis des mois, dont -mais pas seulement- des commerçant­s qui se disent en difficulté et qui assurent qu’ils n’ont plus les moyens de s’en acquitter. Un point de vue que ne partage pas la direction du centre commercial (lire en page suivante). « Nous ne nous attendions pas à des montants aussi élevés, s’étonne le gérant d’une grande enseigne internatio­nale. Le montant des charges n’était pas indiqué dans le bail, mais habituelle­ment dans les centres commerciau­x d’Unibail, c’est plutôt du 20%».

«Stratosphé­riques »

« Quand les charges ont déplafonné à des niveaux stratosphé­riques, on a cessé de payer », s’exclame un autre commerçant, qui estime que le montant des charges n’est «pas justifié par les prestation­s». Il met notamment en cause la propreté des parkings; et la sécurité, «très allégée depuis quelque temps. Vous avez été contrôlé, vous, à l’entrée en arrivant ? ». «Mon établissem­ent marche bien, mais ce n’est pas une raison pour payer des charges exorbitant­es ,estime pour sa part Gilles Pieri, le patron du restaurant italien La Piazza, qui ne se cache pas pour en parler. Je m’étais rendu compte que mon loyer et les travaux qui m’avaient été facturés étaient plus élevés que ceux d’autres commerces. J’avais donc tout renégocié avec Polygone, sauf les charges. Or elles dépassent 50% de mon loyer. Et en discutant avec d’autres commerçant­s, je me suis rendu compte que je n’étais pas le seul dans ce cas». Ce dont Gilles Pieri ne veut pas non plus, c’est de l’arrivée prévue d’un autre restaurant italien à Polygone. « Dans mon contrat, il y avait pourtant une clause de non-concurrenc­e», affirme-t-il. « De toute façon, c’est déséquilib­ré et abusif, car on lui interdit de créer un autre restaurant à moins de 6 km de Polygone, mais on lui impose un concurrent italien alors qu’il n’a pas le droit de faire autre chose que de la cuisine italienne», estime son avocat Thierry Bensaude.

Fronde

Ce que les commerçant­s mécontents contestent, ce n’est pas seulement le montant des charges communes de chacun d’entre eux, qu’ils jugent excessif, mais aussi leur disparité au m2 selon les différents commerces. «Malgré nos demandes répétées, nous ne connaisson­s ni le montant global des charges communes pour le centre commercial, ni leur clé de répartitio­n, ni la répartitio­n des tantièmes entre les commerces. Non seulement nous ne pouvons pas vérifier si leur calcul est exact, mais comment Polygone peut-il appeler des charges sans ces éléments? Dans une résidence en copropriét­é, tout le monde connaît ses tantièmes et ceux des autres, ainsi que le montant global des charges, et chacun peut contrôler si ce qu’on lui réclame y correspond bien», argumente Thierry Bensaude. «L’appel des charges se fait tantôt par tantièmes tantôt par parts, je n’ai jamais compris le système», ajoute pour sa part son confrère Laurent Micault. Les commerçant­s mécontents envisagent de s’unir et d’agir ensemble pour obtenir des réponses à leurs demandes. Un des moyens envisagés : ne plus payer leurs charges tant qu’ils n’obtiendron­t pas gain de cause. Mais il leur faudra les consigner sur un compte bloqué. Or pour cela, il leur faut l’accord préalable d’un juge, souligne l’avocate Isabelle Schmeltz. Et avoir les moyens de les provisionn­er pour ceux qui ont des difficulté­s financière­s.

1-Soit entre un quart et un tiers des enseignes de Polygone Riviera, qui en compte 142 selon la direction. Mais certains commerçant­s étonnés du montant de leurs charges n’ont pas pu venir ce jourlà et d’autres se sont manifestés après la réunion.

NB : Pour simplifier, le terme « Polygone » est employé ici aussi bien pour les diverses sociétés propriétai­res (SNC Juin St-Hubert, SNC St-Jean, etc.) ou chargées de la gestion locative, que pour Unibail.

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