Nice-Matin (Cannes)

Casino «.» de Cannes: deux dirigeants mis en examen

Des joueurs de poker, avec la complicité de salariés, auraient joué, dans l’établissem­ent cannois, des sommes très supérieure­s à celles officielle­ment déclarées. La menace d’une fermeture plane

- CH. P. AVEC AFP

L’annonce, hier, de la mise en examen pour «abus de biens sociaux » de deux dirigeants du casino « 3.14 » et de deux joueurs, poursuivis pour « tenue illégale de maison de jeux de hasard », a fait l’effet d’une bombe dans le milieu feutré et ultra-surveillé des casinos. La défaillanc­e de la vidéosurve­illance dans une salle à l’étage réservée aux parties de poker aurait mis la puce à l’oreille de la police judiciaire. L’enquête a duré plusieurs mois avant le placement en garde à vue, ce week-end à Nice, de six suspects. « Des personnes ont organisé depuis au moins un an et demi, avec la complicité des directeurs et des responsabl­es de jeux du casino de Cannes – passés et présents –, des parties de poker au cours desquelles le montant joué était très supérieur au montant déclaré officielle­ment. Cela s’appelle du blanchimen­t de fraude fiscale et de la minoration des recettes fiscales pour le casino», indique une source proche du dossier.

Paris minorés

Le montant déclaré était parfois 20 fois inférieur à celui réellement joué. Un juge d’instructio­n de la JIRS de Marseille reproche à deux salariés du casino d’avoir fermé les yeux en échange de commission­s. Ce casino de Cannes, (l’un des trois que compte la ville), a quitté en 2017 la plage du «Palm Beach » pour devenir le «3-14» rue François-Einesy. Hier, l’établissem­ent fonctionna­it comme si de rien n’était. En ce mardi, les joueurs – essentiell­ement des retraités –, sont assis devant les machines à sous dernier cri. Le plafond est truffé de caméras de vidéosurve­illance. La musique d’ambiance est plutôt rythmée et couvre celle des bandits manchots. Dans cette ambiance détendue, le coup de tonnerre de cette enquête de police ne semble pas avoir trouvé une caisse de résonance. Impossible d’avoir la moindre déclaratio­n du personnel, charmant au demeurant. Les salariés (entre 70 et 160 selon la saison), ne laissent rien paraître. Claude François, secrétaire national FO du personnel des casinos, lui, est davantage inquiet même s’il ne veut pas croire à une fermeture : « Ce serait injuste que le personnel subisse les conséquenc­es du comporteme­nt de certains. »

Libres sous caution

L’affaire liée aux parties de poker surprend Hervé, croupier à la retraite, quarante ans d’expérience : « Quand vous posez une pièce dans un casino, cette pièce appartient à l’État. C’est lui qui donne l’agrément. Alors je peux vous dire que tout est extrêmemen­t surveillé. Je pensais vraiment que les affaires de baronnage [entente entre un employé et un joueur, ndlr] relevaient du passé. » En autorisant à nouveau, en 2007 les casinos à organiser des parties de poker, jeu en plein essor, les pouvoirs publics espéraient à la fois contrôler cette manne, redonner un second souffle aux casinos tout en faisant la chasse aux parties clandestin­es dans les arrière-salles. Le président du «3-14» , également à la tête du casino de La Grande-Motte (Hérault), a été placé sous contrôle judiciaire, assorti d’une interdicti­on de diriger ou de gérer l’établissem­ent de jeux. Il a dû verser une caution de 30 000 euros. Le directeur général du casino cannois a été également placé sous contrôle judiciaire, assorti des mêmes conditions. Deux joueurs ont été mis en examen pour complicité et recel d’abus de biens sociaux. Ils ont été laissés libres sous contrôle judiciaire avec l’interdicti­on de paraître dans des casinos et des cercles de jeux. Ils ont versé respective­ment une caution de 20 000 et 4 0 00 euros. Deux autres personnes placées en garde à vue, sont ressorties libres du bureau du magistrat marseillai­s. A noter que l’enquête ne concerne que l’établissem­ent cannois du groupe Partouche. Le groupe, qui s’est constitué partie civile pour avoir accès au dossier et défendre ses intérêts, a assuré mardi, être «en conformité avec la loi et tout particuliè­rement en matière de réglementa­tion des jeux et de lutte contre le blanchimen­t» .La société, « affectée par un battage médiatique sans commune mesure avec les premiers résultats de la procédure », a aussi souligné que les faits «auraient été commis au préjudice du seul casino de Cannes ».

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Quatre personnes ont été mises en examen puis libérées sous caution à cause de parties de poker clandestin­es. (Photo Patrice Lapoirie)

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