Des élus ouverts à la religion L’appel au dialogue
Dans un pays – la France – qui met la laïcité en avant, le voyage au Vatican de près de 300 élus de la région, peut choquer. Les intéressés, majoritairement catholiques, se justifient
Dans le contexte actuel où la société française, au nom de la séparation de l’église et de l’État, semble avoir du mal avec les questions religieuses, ce n’était pas facile de faire venir des élus de la République jusqu’à Rome », glisse l’archevêque de Marseille Georges Pontier. Alors, en convaincre près de trois cents relève presque du miracle. Et sans l’assurance d’une audience privée avec le charismatique Pape François, sans doute auraient-ils été moins nombreux à faire le déplacement. Pourtant, assez curieusement au vu des débats clivant sur la laïcité, lorsqu’on les interroge sur leur présence devant le Saint-Père, aucun élu ne semble gêné.
« Il est grand temps de tenir compte de la religion»
«Il y a beaucoup de croyants de foi catholique dans ma circonscription. Je les représente», justifie Valérie GomezBassac, députée La République en Marche de la sixième circonscription du Var. Avant d’ajouter : « Il est grand temps de tenir compte de la religion, quelle qu’elle soit, et de faire en sorte que tout se passe mieux». Delphine O, également députée LREM, mais de Paris, est sur la même longueur d’onde que sa collègue varoise. «Il faut associer les religions aux débats publics, y compris aux états généraux sur la bioéthique, mais elles ne doivent pas monopoliser ces débats ». Maire Les Républicains du Dans une région où la communauté musulmane est importante, le dialogue interreligieux s’est vite imposé comme une évidence. À Nice, rappelle Philippe Pradal, il avait même commencé bien avant l’attentat du juillet . « Nous rencontrons tout ce qui fait la cité », déclare le premier adjoint. Le voyage à Rome, effectué depuis lundi par quelque élus de Provence-AlpesCôte-d’Azur, a été l’occasion hier de rencontrer le cardinal Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux depuis le premier septembre . L’homme d’église s’est plutôt montré pessimiste. « Le terrorisme islamiste conduit malheureusement à la stigmatisation de l’islam. Tout ce que nous faisons pour favoriser le dialogue inter-religieux est miné par les attaques terroristes. Et j’ai bien peur que nous en ayons encore pour des années. Ce que veulent démontrer les terroristes, c’est qu’il est impossible de vivre ensemble ». Mais le cardinal Tauran n’est pas pour autant résigné. Il veut voir dans « les vibrations » que connaît actuellement l’islam, la promesse de jours meilleurs. « Ilyaaujourd’hui en Europe cinq ou six recteurs de mosquée qui réclament, au péril de leur vie, une critique textuelle, littéraire du Coran. C’est une nouveauté. Il faut les aider, les Pradet, Hervé Stassinos ne dit pas autre chose que les deux parlementaires. Tout en rappelant au passage que « la Provence est historiquement une terre chrétienne », il explique que « les maires ont à gérer différentes communautés, parmi lesquelles les chrétiens». Pour l’élu pradétan aussi : « Il ne faut pas couper les ponts avec les religions. Il n’y a rien de pire que de les laisser de côté. Écouter ce que l’église a à dire nourrit la réflexion. Notamment sur les questions sociales où elle a de vraies convictions». Catholique assumé, Philippe Pradal, ancien maire de Nice, devenu premier adjoint de Christian Estrosi, avertit : «Je ne suis pas venu à Rome pour chercher un directeur de conscience». Mais soutenir ». Persuadé que « la plupart des problèmes sont liés à la méconnaissance »,
la solution
un pays qui s’est construit à l’école trop souvent n’ont aucune « Il est important, notamment en France, que les imams reçoivent une formation théologique ». profondément marqué par une première rencontre avec le Pape en septembre 2016 – il accompagnait alors les familles des victimes de l’attentat de Nice – Philippe Pradal trouve dans sa foi et la figure du Saint-Père l’inspiration pour « faire de la politique catholiquement».
« Garantir le respect des religions dans le socle républicain » Il s’explique : « Être élu, ça crée des devoirs. Le discours du Pape François sur le vivre ensemble m’aide dans la construction de ma relation aux autres. Sans remettre en cause la devise de la République, j’ai envie de faire passer la fraternité avant la liberté et l’égalité ». Pour en revenir à la laïcité, Philippe Pradal estime qu’elle « ne doit pas être la négation du fait religieux, mais au contraire garantir le respect des religions dans le socle commun républicain ». Pour conclure, le sénateur des Alpes-Maritimes, JeanPierre Leleux rappelle que, « contrairement à la caricature un peu facile qu’on fait des hommes politiques, le germe de leur action part d’un principe de générosité. C’est le souhait de servir, noble sentiment, qui les a poussés à s’engager ». Vu sous cet angle, le dialogue entre religieux et élus paraît moins anormal…