Les maux bleus
Battue par la Colombie vendredi soir, au stade de France, l’EDF a fait éclater au grand jour certaines de ses failles. Rolland Courbis, consultant pour RMC, nous livre son expertise
Une défense inquiétante Dans l’esprit de Didier Deschamps, la charnière VaraneUmtiti reste l’option numéro un, mais la défaite contre la Colombie a mis en exergue certaines limites de cette formule. En se privant de Koscielny, certes diminué par une douleur à la hanche toute la semaine, la France a perdu en muscles et semblé beaucoup plus friable dans les duels. C’est la qualité première du défenseur d’Arsenal à qui on a même parfois reproché d’en mettre trop dans l’impact. Varane aurait besoin de s’en inspirer par moments. Privé d’Euro sur blessure, le Madrilène, vicecapitaine des Bleus, n’a pas rayonné en première période dans la relance, avant de finir par couler après la pause. En bleu, Deschamps ne l’a jamais mis en concurrence, comme cela a pu être le cas au Real Madrid, où de nombreux entraîneurs lui ont un temps préféré Pepe et son goût pour la chair. Cela ne lui ferait pas de mal, d’autant que Presnel Kimpembe, excellent à chaque fois qu’il a la possibilité de jouer avec le Paris Saint-Germain, attend sagement d’avoir sa chance. De tous les rassemblements depuis octobre 2016, le joueur du PSG devrait bientôt honorer sa première sélection. Alors qu’on l’imaginait clos, le débat de la charnière centrale est, donc, relancé, comme celui des latéraux. A ce poste, la concurrence est faible, ce qui permet à Sidibé et Digne d’enchaîner les matchs, sans que ce ne soit toujours bien brillant. Vendredi soir, ce fut même très poussif pour le Monégasque et tout juste convenable pour le Barcelonais. Mardi, face à la Russie, Pavard pourrait jouer à droite et inviter le sélectionneur à revoir ses plans, en cas de bonne performance.
Pogba, ça ne s’arrange pas
Il a eu un peu moins de trente minutes pour se montrer à son avantage et rappeler qu’un joueur de son talent n’est aucunement programmé pour jouer les utilités. Hélas, Pogba n’a pas donné tort à Deschamps qui l’avait placé sur le banc au coup d’envoi, comme pour lui rappeler qu’il pouvait faire sans lui, et même plutôt bien. Pendant une mitemps, le binôme Kanté-Matuidi a rayonné dans l’entrejeu, aimantant chaque ballon à la récupération et laissant libre court à l’imagination de Lemar pour organiser les offensives. Hormis sur une frappe lointaine boxée pour la photo par Ospina, « La Pioche » a été très effacée après son entrée, voire même peu concernée par le défi physique lancé par les Colombiens qui ont fini par marcher sur la tête de ces Bleus qui ne travaillent qu’à mi-temps. Compte tenu de la dimension prise par Kanté, qui a gâché son match dantesque par une perte de balle évitable au départ du deuxième but, de l’émergence de Tolisso et de l’assurance tout risque Matuidi, la place de Pogba dans le 4-4-2 semble de plus en plus incertaine.
Devant, ça se cherche !
Entre le 4-4-2 et le 4-3-3, Didier Deschamps n’a toujours pas tranché, ce qui est en partie dû à la défaillance de son animation offensive. Contre la Colombie, les Bleus ont mis de la vie pendant trente minutes, avec un Lemar le plus souvent positionné à l’intérieur et un duo Mbappé-Griezmann capable de faire des étincelles quand bon lui semble. Hélas, cela s’est transformé en bouilli de football après la pause. Le deuxième but français était venu récompenser un mouvement de grande qualité, une attaque rapide qui colle parfaitement avec les profils de certains (Sidibé, Mbappé, Lemar, Griezmann), moins à Giroud qui a besoin de monde autour de lui pour faire admirer son jeu en déviation. Se priver de ce dernier pourrait paraître injuste, mais ce serait prendre le pari du jeu et de la technique. Une certaine idée du football, plus dogmatique que pragmatique, qui demande du temps et de la patience. A moins de trois mois de la Coupe du monde, l’heure n’est pas à la révolution.