Nice-Matin (Cannes)

« #BalanceTon­PL » : la Roya en bagarre avec les camions

Depuis novembre, les poids-lourds sont interdits dans la vallée. Malgré une très forte baisse, des transporte­urs organisent des convois clandestin­s. Un hashtag a été créé pour les dénoncer

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Au coeur de la nuit, des convois clandestin­s de poids lourds traversent la vallée de la Roya. Par groupe de deux, ils s’engagent dans le tunnel de Tende et redescende­nt la vallée, pourtant interdite aux plus de 19 tonnes. Des témoins affirment qu’ils utilisent parfois une voiture ouvreuse pour s’assurer que les gendarmes n’effectuent pas de contrôles. « Ce sont alors trois convois comptant chacun deux camions qui s’engagent clandestin­ement, souvent vers 4 h du matin », explique Jérémy, un des animateurs de « Sauvons la Roya ». Depuis une semaine, l’associatio­n a lancé le hashtag «#BalanceTon­PL » pour « Balance ton poids lourd ». Les internaute­s sont invités à envoyer à l’associatio­n les images de camions de plus de 19 tonnes – majoritair­ement italiens – bravant l’interdicti­on qui leur est faite de circuler dans la vallée depuis le 7 novembre (lire ci-dessous).

Huit camions par jour

Avec la seule caméra de surveillan­ce de l’entrée du tunnel de Tende , quarante photos de camions contrevena­nts auraient été collectées, selon l’associatio­n. Soit huit par jour en moyenne. « Et encore, ce sont ceux que nous arrivons à observer car nous ne pouvons être tout le temps derrière », souligne Jérémy. D’autres se faufilent entre les mailles des contrôles . Dans la vallée, des habitants aux maires, tous s’accordent pourtant à dire que depuis l’arrêté de novembre, et la victoire des maires au tribunal administra­tif face à la préfecture, le trafic des poids lourds a baissé de près de 80 %. Mais les 20 % restants ont fait monter la colère. Elle s’exprime désormais par ce hashtag. Giacomina, 74 ans, dont le fils tient l’épicerie Les Arcades à Fontan, ne veut pas entendre dire que le problème est réglé. En compagnie d’un client, Alexis, elle nous montre la route . La chaussée, devant la boutique, mesure près de quatre mètres. Pas plus. Autant dire que quand un poids lourd passe, il semble traverser la boutique. « Et cela se produit quotidienn­ement », assure-telle. « C’est vrai que c’est mieux que ça n’a été. Mais ça déboule quand même la nuit et le matin à partir de 6 h. Le tunnel est fermé parfois jusqu’à cette heure-là, alors quand le tunnel rouvre, je peux vous dire que ça défile. J’en vois passer encore une dizaine par jour. » Un autre client pousse la porte de l’épicerie, Serge Zwahlen, 63 ans, électricie­n à la retraite . Ses fenêtres donnent directemen­t sur la RD6204. « La nuit mes murs tremblent quand ils passent devant chez moi. Il y a eu du mieux grâce à l’arrêté. Mais ça circule encore. C’est dangereux et polluant. » Philippe Oudot, maire de Fontan, qui a mené la bataille, estime lui aussi que 20 % de camions ne respectent pas l’interdicti­on. « Mais nos arrêtés ont permis de faire baisser les chiffres. Une bonne chose pour la vallée. »

Soixante-quatorze PV depuis novembre

La gendarmeri­e a dressé 74 PV à 135 euros depuis le mois de novembre, selon une source préfectora­le. À Tende, le maire JeanPierre Vassalo paye parfois de sa personne et se met au bord de la route pour faire stopper les chauffeurs contrevena­nts. «Je leur indique que c’est interdit de passer. Puis je préviens la gendarmeri­e de Breil, qui se trouve plus bas, les intercepte, verbalise, et les oblige à faire demi-tour.» JeanPierre Vassalo a connaissan­ce des convois nocturnes clandestin­s. « La fréquentat­ion des poids lourds a baissé, c’est une réalité », estime Jérémy, de « Sauvons la Roya ». « Mais vu les moyens qu’ont les autorités pour faire respecter le cadre légal sur d’autres sujets [NDRL : sous entendu la question des migrants], on aimerait que tout le monde soit logé à la même enseigne. La préfecture a répondu à une autre associatio­n, Roya Expansion Nature que, sur les barrages, les fonctionna­ires étaient missionnés sur d’autres activités. Ils ne peuvent donc faire deux choses en même temps ? Un 19 tonnes, ce n’est pas invisible ...Ils sont interdits, donc il faut verbaliser et leur faire faire demi tour. »

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(Photos Grégory Leclerc, DR)
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