Nice-Matin (Cannes)

Vécu Sans dessus-dessous à bord d’un avion de la “Race”

- THOMAS PEYROT

Votre cocktail d’adrénaline, vous le prendrez au shaker ou à la cuillère? «Les deux, mon commandant!» Notre gentil “chauffeur” de bord d’hier n’était rien d’autre que Florian Bergér. Il vous a peutêtre déjà transporté, sans que vous le sachiez, sur les lignes de la Lufthansa. Avec son allure d’ado, doux comme un agneau en apparence, ce pilote allemand de seulement 29 ans est capable des pires facéties aériennes, d’une précision chirurgica­le mais aussi d’une violence redoutable... Les tirailleme­nts dans mes vieilles lombaires en témoignent aujourd’hui. Il s’est classé troisième en 2014 au championna­t allemand de voltige. Il a également l’honneur d’avoir fait 10 podiums en 3 saisons.

À perdre le nord et la raison

Une bonne dose de secousses à vous faire perdre le nord et presque la raison. Et pour finir, après presque 30 minutes de « vol-tige », on vous ramasse à la petite cuillère. Bienvenue dans l’univers incroyable de Red Bull et ses « G-Flight Experience ». Un truc de malade? Pire que ce que vous imaginez. Ces pilotes, que vous voyez évoluer depuis quelques jours en tous sens n’ont, je peux vous l’attester aujourd’hui, pas la même cuirasse que vous et moi. Seraient-ils le fruit d’étranges manipulati­ons transhuman­istes ? La question mérite d’être posée tant ils semblent totalement insensible­s aux terribles contrainte­s exercées sur le corps pendant leurs évolutions. Comment arrivent-ils à enchaîner ces rotations avc une telle aisance, une telle finesse. Ma dose de flip s’est manifestée bien avant le décollage du tarmac de l’aéroport de CannesMand­elieu. Pas besoin de stimulant pour garder les pupilles bien dilatées... Découvrir – en presque exclusivit­é – l’envers du décor d’un championna­t tel que leur Air Race... Ça se mérite. La pression monte vite en signant la décharge longue comme le bras sur laquelle on vous demande votre pedigree et quasiment à quel âge vous avez perdu votre première dent de lait. Sans parler de la quinzaine de messages de vous amis vous promettant que vous allez vomir. Impossible de rebrousser chemin. Le ciel est d’une limpidité irréelle. Un spectacle sublime. On arrive même à discerner les nageurs de la piscine Grand Bleu de la Bocca ! La baie de Théoule cristallin­e sous nos pieds. Le massif de l’Estérel et ses tons ocre inimitable­s, puis le lac de Saint-Cassien totalement vierge. Florian met le turbo. Je peine à maintenir mes jambes repliées sur moi pour ne pas heurter le manche et les pédales à doubles commandes. Cap sur l’aérodrome de Fayence où une surprise nous attend. Des trémolos dans la voix, le pouce levé, je bredouille benoîtemen­t «Ok» à tout ce que me dit mon pilote posté juste derrière moi. Des pylônes similaires à ceux amarrés dans la baie de Cannes nous attirent comme un siphon. Le petit avion paraît si fragile, si frêle. Moins d’une tonne et à peine plus de 325 chevaux pour animer la petite hélice devant mes yeux. C’est parti pour des enchaîneme­nts de tourbillon­s qui font chanceler ma tête. Tonneau, vrille, looping. Je peine à respirer. Compressé dans mon harnais. Je crois que je vais perdre connaissan­ce mais je tiens le coup, de justesse. Pas question de sortir le petit sac roulé dans ma manche gauche. De toute façon mes mains sont tellement crispées que je ne peux plus bouger le petit doigt. Un break de deux secondes à l’horizontal­e. Sauf que l’on est à l’envers. Et rebelote. Il ne s’arrête jamais, ce Florian. À peine plus de 20 minutes de vol et mon corps semble meurtri. Une heure après avoir regagné la terre ferme, mes jambes chancellen­t toujours. Mais mon sourire béat atteste sans que je le réalise encore que je viens de vivre une expérience unique. Elle m’a transporté, fait planer, flipper, hurler. De peur et de plaisir. Merci Florian! Et bonne chance pour la course.

 ??  ?? Pas une mince affaire de se glisser dans un cockpit plus étroit qu’une boîte à chaussures. «Surtout ne toucher à rien» : la consigne absolue surtout quand on se retrouve face aux doubles commandes. Le harnais ajusté au millimètre écrase le buste et...
Pas une mince affaire de se glisser dans un cockpit plus étroit qu’une boîte à chaussures. «Surtout ne toucher à rien» : la consigne absolue surtout quand on se retrouve face aux doubles commandes. Le harnais ajusté au millimètre écrase le buste et...
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 ??  ?? « Alors, pour déclencher le parachute en cas de .... »
« Alors, pour déclencher le parachute en cas de .... »
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