Nice-Matin (Cannes)

Accès aux soins pour tous Interview

En dépit des dispositif­s mis en place, des inégalités d’accès aux soins persistent en Paca. L’ARS, en partenaria­t avec la médecine libérale, a lancé un nouveau plan que détaille son patron

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Il y a quelques mois, le Premier ministre, Edouard Philippe, et la ministre de la Santé, Agnès Buzyn annonçaien­t la mise en place d’un plan national d’accès aux soins, qui trouvait un accueil plutôt favorable auprès des profession­nels. «Ce plan ne comprend presque pas beaucoup de mesures très emblématiq­ues, mais une série d’actions qui répondent bien aux souhaits des profession­nels de terrain », interprète Claude d’Harcourt, directeur général de l’ARS Paca. À son initiative, une déclinaiso­n territoria­le à ce plan (PTAS : plan territoria­l d’accès aux soins) vient d’être mise en place. Il la présentait mercredi dernier à Marseille, ciblant quelques grands thèmes [lire ci-contre].

Vous décrivez une situation paradoxale qui rend difficile cet accès aux soins pour tous.

Oui, dans la mesure où nous souhaitons garantir l’égalité d’accès aux soins à tous nos concitoyen­s – qu’ils habitent Saint-Martin-Vésubie, Breil-surRoya ou à  m de la Fondation Lenval – alors que nous sommes dans un système d’offre libérale ; les praticiens, et les médecins en particulie­r, contrairem­ent à leurs confrères anglais ou allemands, peuvent s’installer où ils le souhaitent.

L’équation semble impossible à résoudre !

Non. Il faut simplement que les profession­nels de santé comprennen­t la profondeur de la demande d’égalité d’accès aux soins. Faute de quoi, ils mettront à mal le système libéral.

Plus précisémen­t ?

Il est important que les dispositif­s incitatifs mis en place – on n’est pas dans la coercition – fonctionne­nt. Le jour, où ils ne fonctionne­ront plus, il y aura de vraies interrogat­ions sur la pertinence du modèle libéral. À l’Assemblée nationale, on voit des parlementa­ires, de tous partis politiques, commencer à demander que l’on sorte d’une logique libérale. Aussi, j’insiste : il faut que ce plan atteigne son objectif. Sinon, c’est le principe même de notre système libéral qui pourrait être mis en cause. Ce que nous ne voulons pas.

Quid Au niveau Paca, la situation est assez simple. Globalemen­t, il y a une surdensité de profession­nels de santé par rapport à la moyenne nationale : supérieure de  % pour ce qui concerne les médecins généralist­es et spécialist­es, et de  % s’agissant des kinésithér­apeutes et des dentistes (supérieure de  %). Aujourd’hui, c’est un confort.

de la situation en Paca ?

Mais, Paca est dans la même situation de fragilité que les autres régions concernant la pyramide des âges. Plus de  % de nos praticiens ont plus de  ans ; dans  ans, ils auront  ans. Si le nombre de remplaçant­s n’est pas de même niveau que le nombre de départs, nous nous heurterons à un mur démographi­que. Nous devons prendre les devants sans nous endormir sur nos lauriers ; la surdensité aura un terme et on sera touché comme les autres régions par le fait que pendant encore dix ans, l’ouverture du numerus clausus n’aura pas d’effet (il faut  ou  ans pour former un médecin).

Quelles zones seront concernées par les aides prévues dans le plan ?

Seront concernées les ZIP (zones d’interventi­ons prioritair­es) et les ZAC (zones d’actions complément­aires) dans une moindre mesure, qui couvrent au total  % de la population (jusqu’à présent moins de  % du territoire étaient couverts).

Il existe déjà plusieurs mesures incitative­s pour encourager l’installati­on des médecins dans des zones désertées. Elles n’ont pas, jusque-là, eu beaucoup d’effet!

On a toujours souhaité que ces incitation­s aient des effets, mais là, on veut que ces incitation­s produisent réellement leurs effets. Notre atout en Paca, et ce n’est pas du tout le cas dans toutes les régions, c’est l’existence d’une vraie coordinati­on d’action entre tous les acteurs : facultés de médecine (à Nice comme Marseille), assurance-maladie, Union régionale des profession­s de santé médecins libéraux, CNOM… Tout le monde est d’accord sur la nécessité d’évoluer, de presser le pas.

Mais comment convaincre l’ensemble des profession­nels?

Ce que nos amis libéraux, et les Français en général, n’aiment pas, ce sont les plans top down (hiérarchiq­ues). Ce plan pourra marcher parce qu’il est une émanation du terrain, il répond aux besoins propres des profession­nels de santé (comme la mesure d’aide au remplaceme­nt…). Quoi qu’il en soit, j’insiste, il faut une prise de conscience à la base, il n’y aura pas   plans ! On sent bien qu’il y a une forme d’impatience chez les élus, au contact de nos concitoyen­s, quand ils parlent de déserts médicaux.

 ??  ?? « C’est paradoxal de vouloir poursuivre comme objectif l’égalité d’accès aux soins, alors même que l’offre de soins, notamment la médecine libérale peut s’installer partout. » (Photo F.C.)
« C’est paradoxal de vouloir poursuivre comme objectif l’égalité d’accès aux soins, alors même que l’offre de soins, notamment la médecine libérale peut s’installer partout. » (Photo F.C.)

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