Nice-Matin (Cannes)

Fabien Barel : « Loïc ne

Loïc Bruni et Fabien Barel ont 13 ans d’écart mais de multiples points communs. Ils sont Azuréens, double champion du monde de descente, mais surtout de grands passionnés

-

Peille, samedi  avril. A deux semaines de la reprise de la Coupe du monde de descente (aujourd’hui à Losinj en Croatie), l’occasion était trop belle de réunir le Cagnois Loïc Bruni, champion du monde en titre, et le Blausascoi­s Fabien Barel, aujourd’hui patron d’équipe, pour parler de leur discipline. Deux génération­s, deux points de vue, mais le même langage. Celui du passionné, du téméraire. Du pilote dopé à l’adrénaline, capable de dévaler des pentes qui effraierai­ent même les bouquetins. Mais aussi deux garçons qui ont placé le travail et le plaisir comme valeurs sacrées. Deux hommes qui lâchaient facilement les freins mais jamais leur sourire.

Qu’est-ce que ça vous a fait de rejoindre Fabien, comme double champion du monde ?

L.B. Je n’avais pas réalisé tout de suite, mais quand je suis rentré en France, on me l’a fait remarquer. Ça m’a touché, car Fabien je le suis depuis que je suis tout petit. J’ai dû regarder au moins  fois les vidéos de ses victoires aux Gets ou à Livigno. Et puis, ça montre que sur la Côte d’Azur, on continue à avoir des pilotes de haut niveau.

Comment vous l’avez vécu Fabien son e titre mondial ?

F.B. Avec tout ce que Loïc avait fait depuis le début de sa carrière, je n’avais aucun doute qu’il y arriverait. Et je pense qu’il ne va pas s’arrêter là. Déjà, pour son premier titre, je me revois sur le parking de Valberg avec Nico (Vouilloz), on était comme des fous. Depuis mon dernier titre en , il n’y avait plus eu de Français sacré. Gagner un e titre, ça a montré sa capacité mentale à se transcende­r, surtout après la saison qu’il a connue. C’est génial ce qu’il arrive à faire, pour lui, pour le sport et pour les autres Français. Il les tire vers le haut. Il y a beaucoup de jeunes Français qui arrivent à très haut niveau, il y a une belle émulation entre eux.

Nicolas Vouilloz et Fabien Barel vous ont inspiré pour votre propre carrière ?

L.B. J’ai grandi dans ce milieu. Mon père (Jean-Pierre, président de l’US Cagnes VTT) les connaissai­t. Quand j’étais minot, Nico et Fabien étaient des héros pour moi. Je prenais le plus que je pouvais de ce qu’ils avaient à offrir. Je m’amusais avec mes potes du club, mais à côté il y avait des mecs qui roulaient au meilleur niveau mondial. J’avais tout ce qu’il fallait pour progresser. F.B. Pour nous, le père de Loïc, mais aussi George Edwards (créateur de la Transvésub­ienne), ou Claude Vergier (le père de Loris) sont des gens qui nous ont aidés. L’émulation qui est partie dans la région vient d’eux. Je me rappelle d’une photo, sur une Coupe de France, où j’ai  ans. Dessus, il y a Sylvie, sa maman, avec Lolo qui est à côté dans la poussette. On se connaît depuis toujours. Et là, Loïc prépare sa saison à Peille comme je le faisais. Disons que le manège est le même, il n’y a que les personnage­s qui changent. Les génération­s passent, mais la conviviali­té de ce milieu reste la même. La base du sport, elle est là. C’est à travers nos petits clubs, nos organisati­ons, qu’on arrive à créer de vrais champions comme Loïc.

Vous avez aussi été adversaire­s...

L.B. Une année, pour la dernière de Fabien. F.B. Le jour où j’ai arrêté, je me rappellera­i toujours de sa réaction. Je ne l’avais annoncé à personne et je lui ai dit alors qu’on était en train de dérouler à La Bresse, après la qualif’ (en août ). La première chose qu’il m’a répondu c’est “tu ne peux pas me faire ça, on ne s’est pas assez tapé la bourre ensemble”. Ça m’a fait cogiter, car j’avais eu la chance de le faire un long moment avec Nico. L.B. Quand j’ai débuté sur le circuit mondial, Nico avait déjà arrêté, mais il restait Fabien. Alors, sa décision m’avait marqué. Son arrêt m’a laissé un vide. F.B. C’était vraiment le moment pour moi et il y avait comme une passation. Quand j’arrête, c’était l’année où on a compris que Loïc allait pouvoir gagner. Je suis parti en me disant que la relève était assurée. L.B. Ça a quand même pris un peu de temps ( ans et demi après, il est champion du monde). Entre pouvoir le faire et gagner vraiment, il y a une différence. F.B. Maintenant, il doit travailler la constance pour gagner le classement général de la Coupe du monde. Ce que je n’ai jamais eu. J’ai toujours eu des pics de performanc­es.

Ce sera votre objectif cette année ?

L.B. Oui, dans l’idéal. C’est le plus haut objectif que je peux me fixer. C’est très très dur, mais je pense que c’est réalisable. Il ne faut pas faire d’erreurs, être régulier. Ça fait deux ans que je passe à côté parce que je me blesse pendant la saison. Maintenant, j’arrive à un stade où je sens que l’expérience est suffisante pour y arriver. On verra si ça se vérifie. Le mondial restera toujours un objectif parce que tout le monde se rappelle du champion du monde. Mais le classement général, pour un pilote, c’est vraiment l’accompliss­ement. F.B. Avec le niveau qu’il y a aujourd’hui, il faut performer tout le temps pour y arriver. Faire “top ” à chaque course ne suffit pas.

La discipline a radicaleme­nt évolué depuis vos débuts en  ?

F.B. Elle a évolué au niveau du matériel, de la compréhens­ion de l’entraîneme­nt. Les tracés ont aussi changé. A mes débuts, on descendait les mêmes pistes avec des vélos rigides ! Il y avait aussi beaucoup d’engagement, mais aujourd’hui, les vitesses sont nettement supérieure­s. L.B. L’entraîneme­nt a changé. Quand on voit Thibaut (Daprela), il n’entre qu’en Junior cette année et il s’entraîne déjà beaucoup. Il est déjà très “pro”. Les teams travaillen­t sérieuseme­nt l’hiver pour avoir le meilleur vélo possible. Et ce, depuis - ans. A mes débuts, il y a - ans, la préparatio­n était surtout physique, moins sur le vélo. F.B. C’est ta vision, mais je t’assure qu’avec Sun de  à , il y avait une grosse prépa des vélos l’hiver. Un mec comme Nico Vouilloz, je te garantis qu’il travaillai­t comme un malade sur le vélo. L.B. C’était l’exception Nico. F.B. Je te garantis qu’il y avait déjà beaucoup de monde qui se préparait comme ça l’hiver, avec les ingénieurs. L.B. De l’extérieur, c’était ma vision.

Vous vous verriez Loïc descendre avec un vélo rigide ?

L.B. Non sûrement pas. Déjà que là (à Peille), je me “chie” dessus, alors ça ne risque pas (rires). F.B. Faut savoir qu’à Peille, tu n’as pas le droit à l’erreur. Si tu tombes, tu te fais mal. En présaison, je savais que si le vélo tenait ici, j’étais tranquille, je pouvais y aller. L.B. Il y a une différence entre “rouler” et prendre de la vitesse où tu peux vite te faire mal.

Loïc, vous faites appel à un préparateu­r mental (Philippe Angel). C’est un aspect très important dans votre sport ?

L.B. Quand tu construis un weekend, si tu n’as pas un peu de support mental, tu peux facilement te tromper et reproduire tes erreurs. C’était mon cas. Des fois, je ne faisais pas la course que je voulais et je n’arrivais pas à l’analyser. Je répétais mes fautes. Maintenant, j’arrive à les rectifier. Avant une course, toute la semaine est importante. Les reconnaiss­ances, les réglages du vélo, le sommeil, la récupérati­on... Et quand t’arrives au départ de la finale, où il faut être le plus efficace possible pendant  minutes, si dans la tête t’es fort et serein de tout ce que tu as pu construire, tu vas finir devant un mec qui a la même préparatio­n mais qui n’aura

 ??  ?? Fabien Barel, Loïc Bruni, avec “Jacquot”, le mécano des deux hommes.
Fabien Barel, Loïc Bruni, avec “Jacquot”, le mécano des deux hommes.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France