Nice-Matin (Cannes)

«Le sport? Ça fait du bien à l’amour-propre» Actu

Sans avoir la prétention de soigner, l’activité physique adaptée permet aux personnes souffrant d’addiction de rompre la spirale du déconditio­nnement et retrouver l’estime de soi

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Malik a seulement 36 ans, (1) mais près de vingt ans de vie commune avec l’alcool, le cannabis et d’autres produits. Il évoque avec difficulté et à demi-mot l’enfer qu’il a vécu – « j’ai été très seul, tellement mal ». Mais la parole se fait plus aisée pour parler du temps présent, parmi le groupe de personnes qui, comme lui, participen­t aux séances d’activité physique adaptée organisées par le CSAPA « Odysée » (Centre de soins, d’accompagne­ment et de prévention en addictolog­ie). «Là, j’aime bien, je parle, je connais tout le monde… Cela fait un an que je ne bois plus. » Pierre nous interpelle.

« On vient pour avoir les compliment­s d’Emmanuelle »

Son visage, son corps portent les stigmates de ses abus. Lui aussi préfère échanger sur son expérience présente. On saura seulement qu’il a «vécu vingt ans dans l’alcool. » « Ici, je revis. J’ai perdu 30 kg ! Je remercie mon médecin de m’avoir envoyé vers le CSAPA.» D’autres personnes nous rejoignent. Vraie boulimie de paroles dont ils ont été – ou se sont – trop longtemps privés. «Cela fait deux ans que je suis ces séances, ça me détend… Le sport, j’en faisais, mais il y a très longtemps », raconte Stéphane, 48 ans. Jacques intervient : «Moi, je n’en avais jamais fait avant». Et puis, dans un grand sourire, Loïc conclut, approuvé par les autres : « On est venu pour avoir les compliment­s d’Emmanuelle… Ca fait du bien à l’amour-propre.» Emmanuelle, « leur coach sportif » au sourire et aux mots très doux lorsqu’elle les encourage et souligne les progrès réalisés depuis la séance précédente. Des mots qui retricoten­t aussi du lien. Et c’est fondamenta­l pour des motifs que rappelle Vincent Laroche, psychologu­e au Csapa. « Chez la personne qui souffre d’addiction, quel que soit le produit ou le comporteme­nt, la relation de dépendance prend le pas sur toutes les autres relations. Il y a une rupture des liens autant avec les autres qu’avec soi-même… Un repli sur soi qui favorise la sédentarit­é. » Et son lot d’effets néfastes sur la santé physique et psychique.

Un des objectifs : améliorer la qualité de vie

La séance achevée, tous les adhérents se retrouvent pour échanger pendant trente minutes. Un groupe de paroles propice à la verbalisat­ion des sensations ressenties. Mais aussi destiné à prolonger la relation aux autres. « L’activité physique ne doit pas être envisagée sous le seul angle du sevrage et de l’abstinence. Le but premier est d’améliorer la qualité de vie et relancer les capacités psychosoci­ales », insiste Vincent Laroche. Et Olivier Laroche, médecin au CSAPA de conclure: « L’addiction est une maladie chronique qui requiert une prise en charge sur le long cours, compte tenu des nombreux désordres à traiter: dépendance, conséquenc­es somatiques, sociales, familiales… Ces patients

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Chaque séance ( h  par semaine) est coanimée par un coach sportif (Emmanuelle, à gauche) et un intervenan­t du CSAPA. Aujourd’hui, il s’agit d’Alexandre, assistant social (e à gauche).

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