Le chaudron italien
« Cette situation éclaire le « casino » (bordel) italien. Une majorité de citoyens transalpins ne croit plus au miracle européen. »
L’Italie nous a habitués depuis longtemps à ses interminables crises politiques dont elle finit toujours par sortir pour reprendre son chemin cahin-caha. Une de plus, dira-t-on, après l’échec de la constitution d’un gouvernement aux couleurs des deux vainqueurs des élections du mois de mars dernier, la très droitière Ligue du Nord et le mouvement populiste Cinq Etoiles, et la désignation hier d’un ancien haut responsable du FMI, Carlo Cottarelli, pour former une équipe ministérielle qui ne peut être que de transition. On peut certes voir dans cette situation la preuve ques les institutions italiennes fonctionnent. Tout au long de cet épisode, le président de la République, Sergio Mattarella, n’a fait en effet qu’appliquer la constitution de son pays et les droits qu’elle lui accorde. Si cette possible sortie de crise respecte les formes, elle ne règle en vérité rien sur le fond. Certes, Bruxelles et les Européens vont se réjouir de la voie choisie car elle les rassure sur les futurs choix budgétaires de Rome mais il n’est pas sûr qu’elle comble les attentes de nombre d’électeurs de la Péninsule. Le gouvernement qui se profile n’est pas conforme, en effet, au verdict des urnes. Il symbolise une orthodoxie financière européenne dont les Italiens ne voient plus les bénéfices et qu’ils ont condamnée par leur vote. Si leur pays a réussi à ramener son déficit budgétaire bien en dessous des symboliques % bruxellois, son économie va en fait de plus en plus mal. Trois chiffres en témoignent : une dette proche de % du PIB ; trois millions de pauvres de plus qu’en ; une production industrielle actuelle inférieure de % à celle de . Cette situation éclaire le « casino » (bordel) italien. Une majorité de citoyens transalpins ne croit plus au miracle européen. La prospérité d’hier s’est envolée et beaucoup oublient que l’Union est un facteur de paix. Ce phénomène éclaire d’ailleurs la montée des populismes ou des extrêmes partout en Europe. Les partenaires de l’Italie auraient donc tort de se réjouir trop vite de la sortie de crise gouvernementale qui se profile à Rome. Elle ne fait que remettre le couvercle sur une marmite qui boue de plus en plus à travers tout le vieux continent. Les réponses de Bruxelles ne parviennent plus à endiguer cet inquiétant mouvement de fond qui oublie les tragédies d’hier. Ce qui se passe en Italie n’est pas une comédie. C’est un signal d’alarme.