Stéphane Bern: «Le patrimoine est le pétrole de la France»
L’animateur vedette, présent hier au couvent royal de Saint-Maximin, défend son action au service des monuments historiques, sources, à ses yeux, de développement économique
Stéphane Bern est partout. Dans les pages du Figaro ;à la radio où il anime des émissions, à la télévision pour présenter Secrets d’histoire ou commenter des événements, souvent royaux ; dans les librairies où son dernier livre se vend comme les quarante qui l’ont précédé ; À l’Élysée aussi, où le président de la République, qui lui a confié une mission pour aider à sauver les monuments en péril, a présenté cette semaine le loto du patrimoine… Après un tournage en Belgique vendredi, l’animateur était hier dans le Var, au couvent royal de Saint-Maximin précisément, pour animer la convention des administrateurs de la Caisse d’Épargne Côte d’Azur, à l’occasion du bicentenaire de la banque. Un exercice qu’il a réalisé avec simplicité et humour. Rencontre avec le souriant « Monsieur Patrimoine» français.
Comment trouvez-vous le temps de faire tout cela ?
La passion, la passion, la passion… C’est le plus grand des moteurs. Je ne fais que les choses que j’aime faire.
Quel est le rapport entre la banque et le patrimoine ?
C’est intéressant aussi l’histoire de l’industrie du pays. Il n’y a pas que les rois et les reines. Et c’est le duc de LarochefoucauldLiancourt qui a créé la Caisse d’Épargne avec le baron Delessert. Je suis dans mon élément. En plus, la Caisse d’Épargne soutient mon action, me donne une tribune pour m’exprimer. La banque a le même attachement que moi pour le patrimoine local. J’espère qu’ils vont m’aider aussi. Et quelle chance d’être ici à SaintMaximin où s’est marié le prince Félix de Luxembourg ! Je n’ai pas pu venir à la noce mais j’ai vu le prince il n’y a pas longtemps.
Quel rapport entretenez-vous avec le Var ?
C’est un département que je connais bien. Enfant, je passais mes vacances à Sanary, j’aime la région toulonnaise. Plus tard, j’ai eu ma période « kéké » à SaintTropez. J’ai une passion pour l’hôtel de la Ponche de Simone Duckstein. Je suis aussi venu tourner une publicité dans une jolie maison varoise, mais aussi pour l’émission Le Village préféré des Français. Il y a tout ce que j’aime dans le Var. Je laboure le terrain…
Et vous, quel est votre village préféré ?
Le mien, Thiron-Gardais, dans le Perche, en Eure-et-Loir. Le musée que j’ai créé a ouvert. (Un monsieur s’approche tout près pour photographier, sans demander son accord, Stéphane Bern. Celui-ci prend la pose quelques secondes avec un grand sourire).
Les gens ne sont pas très polis de vous interrompre pour vous photographier ainsi…
C’est le revers de la médaille. Vous appartenez aux gens. Je ne l’ai pas voulu, c’est la contrepartie de ce qu’on fait. Mais ce n’est pas moi qui compte. Les émissions de radio, de télé, ça finira à l’INA (). La seule chose qui restera de ce que j’ai fait, c’est pour les monuments.
Le loto du patrimoine, présenté cette semaine, a essuyé des critiques.
Oui. Certains disent que c’est une goutte d’eau. Je réponds : c’est un début. On a une liste de monuments, j’en ai autant qui attendent. Les entreprises veulent faire du mécénat. Avant elles investissaient dans l’art contemporain. Le patrimoine revient à la mode ! Ce loto crée un appel d’air pour le patrimoine. Après, le ticket de loto reste à euros, celui du grattage sera plus cher, euros. Mais participe qui veut, ce n’est pas obligatoire. C’est un geste symbolique, citoyen. On entend dire aussi : c’est l’État qui doit financer. Mais en ce sont les Américains qui ont financé la restauration de Versailles…
On accuse également l’opération de bénéficier à des monuments privés.
Je rappelle que % de ceux qui sont éligibles au loto appartiennent à des collectivités ou des associations. Moins de % sont à des propriétaires privés. Allez vivre comme eux, avec des seaux pour récupérer l’eau de pluie qui passe par le toit ! On est le premier pays pour la vente de patrimoine privé. Il y a beaucoup d’hystérie autour du patrimoine, alors que son état est terrible. Les dotations publiques ont baissé. Que l’église à restaurer soit à Nice ou dans un village de habitants, cela coûte le même prix. A Nice, ils sauront lever beaucoup de fonds. Les villages, eux, ont besoin de moi.
Que leur apportez-vous ?
De l’espoir. Je vois ça dans les yeux des gens. Le patrimoine c’est l’identité de la France, et c’est aussi de l’économie, de l’emploi dans les villages. Quand les gens viennent visiter un monument, ils vont manger, dormir à proximité.
Ne risque-t-on pas de faire de la France un immense musée ?
Le tourisme est une industrie comme une autre. On ne sera plus jamais une grande puissance industrielle, c’est terminé. On peut faire des nanotechnologies, de l’industrie de pointe, mais la manufacture du monde c’est la Chine. Le patrimoine, c’est le pétrole de la France. Nous sommes le premier pays touristique du monde. Ce secteur rapporte milliards quand l’automobile en rapporte à milliards. Formons-nous, apprenons les langues, y compris le Chinois, pour bien accueillir les touristes. J’assume le fait de transformer la France en musée à ciel ouvert, un musée qui vit. Les projets qu’on soutient sont vivants. On peut aussi mettre des entreprises dans les monuments, du coworking. Le patrimoine est une source d’innovation, de création. C’est une chance pour la France, ça nous réconcilie avec les territoires. Je ne suis pas un Parisien, j’ai l’âme provinciale. Il faut aider les gens à rester vivre dans les villages. (1) Institut national de l’audiovisuel
Le patrimoine revient à la mode” J’assume le fait de transformer la France en musée à ciel ouvert. Un musée qui vit”