Nice-Matin (Cannes)

Mémoire de Grassois Joseph Ellena et Ste-Anne

- C. J.-B.

Retrouvez cette rubrique qui donne la parole à un habitant de la cité des parfums ou du pays grassois. Aujourd’hui : cet ancien cantonnier retrace le chemin parcouru à Sainte-Anne où il vit depuis toujours

«Mon père était le moulinier de Sainte-Anne, avant que la famille Conti ne prenne la suite. Mes parents, en tant que métayers, exploitaie­nt aussi des terres dans le même quartier. À l’époque, il existait très peu de constructi­ons et les champs s’étendaient à perte de vue» raconte Joseph Ellena, plus connu sous le nom de « Jojo ». Né le 13 juillet 1937 au Blanchissa­ge, lieu-dit de la Vallée verte, Joseph est le seul enfant de Pierre et Marie. Qui, entre le travail des champs, l’entretien des oliviers et l’activité oléicole, de novembre à février, ne s’arrêtent jamais de travailler. «Mes parents avaient loué cette maison, où j’habite encore aujourd’hui, à côté du moulin. Je vis dans ce vieux mas depuis 1947. »

Les soixante platanes du manoir

Après avoir fréquenté l’école primaire de Saint-Jacques, où il se rend à pied, le jeune Joseph trouve un emploi de jardinier, au manoir du Blanchissa­ge. «Le domaine venait d’être acquis par un Anglais. Pour moi, c’était un retour aux sources. » Au coeur de cet immense domaine, le labeur ne manque pas. L’entretien du parc nécessite de nombreux soins. Mais c’est surtout le ramassage des feuilles des platanes séculaires qui monopolise Joseph, dès octobre. « Une immense allée, bordée d’une soixantain­e de majestueux platanes, menait au manoir. À l’automne, ils perdaient leurs feuilles. Il fallait alors les rassembler en tas, puis les brûler. À peine étaisje parvenu au bout du chemin, qu’il me fallait à nouveau revenir à son début. Entre-temps, les feuilles étaient de nouveau tombées ! » La ligne des Chemins de Fer de Provence, de Draguignan à Grasse, passe au-dessus du moulin.

Cantonnier à Saint-Jacques

« Elle franchissa­it alors le torrent par un immense viaduc, d’une longueur de cent vingt mètres. Il n’en reste aujourd’hui que des vestiges. La structure du pont a été démontée, puis vendue dans les années 1950. La ligne a laissé son empreinte sur le réseau routier aménagé après sa disparitio­n. Au carrefour de Saint-Jacques, il existait une halte où les habitants attendaien­t le train » poursuit Joseph, intarissab­le sur le sujet. Après 27 années passées au Blanchissa­ge, « Jojo » est embauché à la mairie, comme cantonnier du hameau de Saint-Jacques. Il y demeurera jusqu’à l’âge de la retraite. «Il n’y a plus de cantonnier aujourd’hui. De mon temps, cet employé devait procéder au nettoyage des chemins, des rues et des places, désherber et entretenir la cour de l’école.» Tout le hameau connaît Jojo, qui, au cours de sa journée de travail, rencontre tous les habitants. On ne manque pas de prendre des nouvelles de la famille, des voisins. La fête de Sainte-Anne reste un grand moment de l’année. Joseph, qui a été trésorier du Cercle pendant 25 ans et président durant 15 ans, se souvient du bal, de la messe à la chapelle et de l’aïoli organisé par le comité des fêtes. «Notre cercle est le plus ancien de France, il date de 1872. Le week-end, on se retrouvait pour jouer aux boules et aux cartes. » Aujourd’hui, Joseph qui a longtemps voyagé durant ses vacances, demeure dans son quartier. Il se rend tous les jours à Saint-Jacques pour faire ses courses. Fidèle à ses habitudes, il retrouve le mardi après-midi, à la salle polyvalent­e du hameau, un groupe d’amis, pour des parties de Manille animées. Aucun platane n’ombrage son jardin où l’imposant lavoir accueille des poissons rouges. «Au moins, je n’ai plus de feuilles à ramasser ! » déclare Jojo en souriant.

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Passé : devant le viaduc du train des Pignes, nourrissan­t les poules. Présent: devant le mas qu’il n’a jamais quitté.
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(Photos DR et C.J.-B.)

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