L’Europe éclatée
Paradoxe: c’est au moment où le flux des migrants est, en volume, le moins important depuis des années, que le problème des réfugiés divise le plus gravement l’Europe. Ils étaient plus d’un million à traverser la Méditerranée en ; au cours du premier semestre , quelque hommes et femmes seulement sont arrivés sur nos côtes. C’est beaucoup, jugent certains qui s’alarment à l’idée de la disparition de l’identité européenne. Mais c’est aussi la démonstration que les politiques suivies jusqu’à présent n’ont pas été entièrement inefficaces, par exemple les accords avec la Turquie et le Niger, qui ont permis, moyennant finance, de «fixer» dans ces pays des migrants qui, auparavant, auraient risqué leur vie pour traverser la mer. Mais cela ne parvient pas à stopper le mouvement, comme on le voit tous les jours. Seize pays européens seulement étaient présents à Bruxelles, hier, pour définir un ensemble des mesures communes. Seize pays, autrement dit à peine plus de la moitié de l’Europe. Celle-ci n’allait déjà pas très bien. Elle va aujourd’hui carrément mal, à partir du moment où ce qu’on appelle le groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, Tchéquie et Slovaquie) s’oppose à toute mesure d’accueil obligatoire. Ils sont tombés d’accord, c’est bien le moins, sur un renforcement des frontières extérieures de l’Union. Pour le reste, ce sommet était davantage celui des interrogations que celui des solutions. Faut-il, comme le demande l’Italie, réviser les accords de Dublin, qui confient aux pays de première entrée dans l’UE la responsabilité des demandeurs d’asile? Faut-il ou non séparer en amont, hors de l’UE, les demandeurs d’asile, autorisés à venir en Europe, et les migrants économiques, qui se verraient interdire de prendre la mer? Peut-on, à défaut d’entraîner l’ensemble des , envisager des coopérations limitées à quelques pays? Une certitude: mieux vaudrait, pour tenter de domestiquer les flux migratoires, défi du XXIe siècle, que l’Europe soit unie plutôt que divisée.