Nice-Matin (Cannes)

La goélette O’Remington, vedette du port Canto

Le O’Remington est amarré au Port Canto depuis le mois de mai dernier. Mais son histoire, en étroite relation avec le 7e art le lie à Cannes depuis le début des années 60

- PAULINE THURIER

Vingt-sept mètres de long et plus de soixante-dix ans d’histoire. La goélette O’Remington et son parcours fascinant ont jeté l’ancre au port Canto le 20 mai dernier. Tout a commencé pour elle en 1946. À l’époque nommé Maria del mar, le bateau transporta­it du vin entre Naples et Capri. Lorsque son chemin croise celui de Lord Remington, la goélette est promise à un avenir de strass et paillettes. Ce riche héritier américain a acheté le Maria del mar sur un coup de tête en 1958. Son ami Federico Fellini, le célèbre réalisateu­r italien, lui aurait conseillé avec humour de s’acheter un bateau s’il espérait rencontrer du succès à Rome.

Un porte-bonheur cannois

Rebaptisée à son nom, la goélette O’Remington est transformé­e en yacht de luxe. Avec cinq cabines, de l’eau chaude et un pont entièremen­t en bois, le transport de vin semble alors bien loin. Federico Fellini dessine même une tête de lit, deux tables de chevet et un vitrail pour son ami américain. Ces motifs rappellent étrangemen­t ceux de la palme d’or cannoise. En 1960, lorsque Fellini remporte le graal cannois pour son film La Dolce Vita ,ildemande à ce que des palmes soient gravées sur la proue. Lord Remington accueille alors à son bord les plus grandes stars de la Cinecittà. Et pour cause, ce bateau semble porter bonheur au cinéma italien. Après Fellini, c’est un autre habitué du O’Remington qui gagne la palme d’or au festival de Cannes : Luchino Visconti pour Le Guépard en 1963. Marcello Mastroiann­i est également familier du lieu. L’acteur italien a remporté par deux fois le prix d’interpréta­tion masculine au festival internatio­nal du film. À la mort de Lord Remington, le bateau passe dans les mains d’Aristote Onassis et Maria Callas, amie du défunt, puis dans celles d’Alberta Ferretti, une styliste italienne, dans les années 1990. Après des années d’errance dans la mer rouge, aux ports de Sicile et de Gènes, le bateau trouve enfin repreneur. Erick Leclerc, passionné de navires, et Didier Cloarec, un industriel parisien, ont acquis ce bijou marin en avril 2017 au port de Gènes. Ils l’ont sauvé d’un funeste destin. Le bateau a failli être dépecé pour devenir un restaurant de fruits de mer à Milan… ouf ! Pour Erick Leclerc, « c’est un rêve de gosse qui se réalise ». Les deux passionnés souhaitent lui rendre sa renommée cinématogr­aphique en faisant revenir des stars sur le pont du O’Remington, comme au bon vieux temps. En octobre, le bateau recevra le label de bateau « d’intérêt patrimonia­l », autant pour ses qualités maritimes que sa riche histoire. Mais la goélette n’est pas prête de quitter le port cannois. « Sa vie est à Cannes, nulle part ailleurs », assure Erick Leclerc avec un sourire.

 ??  ?? À gauche, Didier Cloarec et Erick Leclerc à bord de leur navire. À droite, en haut, la cabine principale décorée d’une tête de lit dessinée par Fellini. En bas, les palmes d’or sur la proue demandées par Fellini en . (Photos Gilles Traverso)
À gauche, Didier Cloarec et Erick Leclerc à bord de leur navire. À droite, en haut, la cabine principale décorée d’une tête de lit dessinée par Fellini. En bas, les palmes d’or sur la proue demandées par Fellini en . (Photos Gilles Traverso)
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 ??  ?? Du café pour Marcello Mastroiann­i.
Du café pour Marcello Mastroiann­i.

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