Un «bonus-malus» contre la prolifération du plastique
La mesure, annoncée hier par le ministère de la Transition écologique et solidaire, sera mise en place à partir de 2019, avant de monter en puissance
S’appuyer sur le portefeuille des consommateurs pour promouvoir une démarche plus respectueuse de l’environnement. C’est la logique à l’oeuvre derrière la mesure annoncée, hier dans Le Journal du dimanche, par Brune Poirson, secrétaire d’État à la Transition écologique et solidaire. Afin de généraliser le recyclage du plastique, le gouvernement entend en effet mettre en place à partir de 2019 un système de « bonusmalus ». Alors que la production mondiale a progressé de plus de 40 % en dix ans (elle est passée de 245 à 348 millions de tonnes entre 2007 et 2017, essentiellement du fait de l’explosion de l’emballage), Emmanuel Macron avait promis pendant sa campagne d’arriver à 100 % de recyclage des plastiques d’ici 2025 en France, contre 25 % environ aujourd’hui, selon une étude de 60 Millions de consommateurs.
● Jusqu’à % du prix
« Demain, quand il y aura le choix entre deux bouteilles, l’une fabriquée en plastique recyclé et l’autre non, la première sera moins chère », promet Brune Poirson. La mesure, que la secrétaire d’État veut mettre en oeuvre dès 2019, avant de la « faire monter en puissance », pourra aller jusqu’à 10% du prix des produits à base de plastique. Elle n’a en revanche pas précisé dans quelle proportion ce dispositif abaisserait le coût des objets en plastique recyclé, et relèverait celui de ceux qui ne le sont pas. Elle s’est aussi abstenue d’établir un calendrier pour la mise en place généralisée d’une consigne sur le plastique. Cette piste, évoquée par le ministère en début d’année, consisterait à associer un emballage à une caution, que le consommateur paye à l’achat du produit et récupère sous forme monétaire ou de bon d’achat lorsqu’il le restitue.
● Des réactions plutôt favorables
Le bonus-malus est « une logique dans laquelle on se retrouve », a déclaré Emmanuel Guichard, délégué général de la fédération française de l’emballage plastique (Elipso). Encore faut-il que les alternatives au plastique existent, nuance-t-il toutefois : « Pour les bouteilles, c’est un choix du consommateur qui est possible. Mais il ne faut pas oublier les autres. Sur le pot de yaourt, il n’y a aujourd’hui pas de plastique recyclé. » « On espère que les industriels joueront le jeu pour que les consommateurs ne soient pas directement pénalisés » ,a relevé pour sa part Flore Berlingen, directrice de l’association Zero Waste France. Qui estime toutefois que « le recyclage est essentiel, mais pas suffisant. Il faut absolument couper le robinet et avoir des mesures plus fermes pour tout ce qui concerne le suremballage, les objets jetables. »
● Faire coopérer les industriels
Brune Poirson confirme ainsi la ligne du gouvernement : collaborer avec le secteur plutôt que bannir immédiatement certains produits, même si elle rappelle que l’exécutif veut interdire le commerce des pailles en plastique d’ici 2020. L’exécutif avait reçu début juillet une cinquantaine d’entreprises et de fédérations, qui ont pris différents engagements, par exemple doubler le taux d’incorporation de matières premières issues du recyclage dans les produits en plastique. «Si dans deux ans, le compte n’y est pas, alors on passera au règlement », assure Brune Poirson. Michel-Edouard Leclerc, p.d.g. de l’enseigne de distribution portant son nom, annonce dans Le Journal du dimanche avoir décidé « d’anticiper la loi » en ne proposant plus de pailles et de vaisselle en plastique début 2019. Parmi d’autres grandes enseignes, Carrefour veut cesser la commercialisation des pailles fin 2018 et supprimer ses emballages plastique non recyclables de fruits et légumes bio.
● Une tendance mondiale
Cette annonce intervient alors que la diffusion massive sur les réseaux sociaux d’images des océans et de la faune marine étouffant sous les déchets, et le lancement de certaines initiatives telles que les « Plastic Attacks » (des rassemblements de consommateurs qui entassent leurs emballages à la sortie d’un supermarché) commence à susciter des réponses politiques dans le monde. La Commission européenne veut ainsi réduire drastiquement l’utilisation d’objets à usage unique, du coton-tige au matériel de pêche. Et les sacs en plastique à usage unique ont été interdits cette année au Chili et en Nouvelle-Zélande, comme c’est le cas en France pour ceux qui ne sont pas compostables.