Nice-Matin (Cannes)

Tombée dans la marmite Sa fiche

- ROMAIN LARONCHE

L’aviron était presque inscrit dans le patrimoine génétique d’Elodie Ravera-Scaramozzi­no. Toute petite, elle accompagna­it son père Stéphane Ravera, ancien internatio­nal tricolore et double champion d’Europe, lors de ses entraîneme­nts. « Disons que je lui ai donné le goût de l’eau. Elle a d’abord commencé par la natation car, par précaution dans cet environnem­ent, je voulais qu’elle sache nager très vite ». Pourtant, à cette époque, la Villefranc­hoise n’est pas vraiment attirée par la discipline de son champion de père. « Petite, je n’aimais pas ça, car je l’attendais longtemps pendant ses entraîneme­nts ». La jeune fille teste le tennis, la gym, la natation et même les arts martiaux. « Comme tous les enfants, j’ai essayé plein de sports ». Finalement, à 12 ans, elle décide de s’inscrire au club nautique de Nice. Une révélation. Au club, on remarque très vite son potentiel. « Pour sa deuxième année de pratique, elle devient championne de France chez les minimes », se rappelle Patrick Delafaye, son coach historique depuis ses débuts sur l’eau. « On lui a laissé le choix du sport, mais ça me fait très plaisir qu’elle rame, reprend le paternel, qui souhaite avant tout mettre en avant «le travail de ses entraîneur­s Hervé Bousquet et Patrick Delafaye ». Entre Elodie et l’aviron, la greffe prend immédiatem­ent. « Je me suis rendu compte que j’avais des capacités rapidement et j’ai tout de suite aimé la compétitio­n », avoue la récente championne d’Europe en ‘‘Deux de couple’’. « Gagner, elle a ça dans le sang, assure Jacques Delaye, le président de la section aviron du CNN depuis 2012. Elodie ne vient jamais pour participer. C’est une battante ». Une déterminat­ion et un caractère bien trempé qui la conduisent tous les ans sur la plus haute marche des podiums nationaux. « Elodie a grandi dans un milieu familial favorable, grâce à son père (son petit frère, Romain, a également été champion de France). Elle a aussi un très bon “moteur” et une super VO2 max, mais ce qui a fait la différence, à haut niveau, c’est son mental exceptionn­el », estime Patrick Delafaye, également prof d’EPS. « Elle a une capacité à se dépasser, et en compétitio­n c’est une bête de guerre ». Une ténacité qui l’amène aujourd’hui à performer sur les plans d’eau du monde entier. « C’est simple, Elodie, c’est une éponge, reprend son coach niçois, avec qui elle échange toujours quotidienn­ement par téléphone. Sa maman (Christine Scaramozzi­no) est une chef d’entreprise (de la société PAAL, basée à Contes). Elle a pris le côté déterminée, organisée, volontaire de sa mère, et le physique, le goût de l’effort du sportif de son père. Pour nous, entraîneur­s, c’était un régal ». Alors qu’elle fréquente le lycée Masséna à Nice, la rameuse tient le rythme d’un entraîneme­nt quotidien. Avec quelques difficulté­s logistique­s en plus. « L’aviron, c’est 50% de travail physique et 50% sur l’eau, explique Patrick Delafaye. Les mercredis, samedis et dimanches, nous étions obligés d’aller au lac de Saint-Cassien car on ne peut pas s’entraîner en mer avec des “bâteaux de rivière”. Ce qui veut dire qu’on passait 2h30 sur la route, pour 2h d’entraîneme­nt. Elle était dans un petit groupe, avec des garçons, vu son niveau, qu’elle aimait bien provoquer sur l’eau ». Les autres jours, la multiple championne de France s’entraîne en salle ou court avec son père, adepte du triathlon et quatre fois “finisher” de l’Ironman. Une prépa intensive qui lui permet de monter sur les podiums des mondiaux juniors à seulement 15 ans, face à des concurrent­es déjà majeures. Tout juste son bac en poche, l’Azuréenne n’hésite pas à traverser l’Atlantique pour intégrer l’université de Columbus dans l’Ohio, où elle est recrutée pour ses qualités de rameuse. Une année de sport-études (licence business) où elle gagnera le championna­t américain du huit. Dans le nord des Etats-Unis, la jeune championne doit composer avec l’éloignemen­t de ses proches et un climat rude qui l’empêche de pratiquer sa discipline pendant quatre mois, en extérieur, car la rivière est gelée. Mais une année qui lui forgera encore un peu plus son mental de guerrière. Elle rentre en France car la Fédération française d’aviron la réclame. Au sein de l’institutio­n, on mise sur la Niçoise pour représente­r la France aux JO de Rio. Elodie quitte la Rade de Villefranc­hesur-Mer pour intégrer le pôle France à Nantes. Elle y débute la prépa pour l’olympiade de 2016 avec sa nouvelle partenaire Hélène Lefebvre, de quatre ans son aînée. Le binôme s’entend bien et les résultats sont au rendez-vous. « On est peut-être moins puissantes que nos adversaire­s (Elodie mesure 1m73 pour 70 kg), mais notre force c’est la cohésion, la confiance et la technique », estime celle qui continue les études en e-learning (3e année de commerce internatio­nal à l’Edhec de Nice). Depuis quelques mois, les deux Tricolores ont encore réussi à élever le curseur, montant par deux fois sur les podiums mondiaux en Coupes du monde, mais surtout en décrochant l’or européen à Glasgow le mois dernier. « On a prouvé qu’on pouvait gagner au niveau internatio­nal, assurait Elodie depuis la Bulgarie dimanche. Ça nous conforte dans notre entraîneme­nt. On voit qu’on progresse, qu’on est sur la bonne voie. On cogite moins, on ne va sûrement pas lâcher ». Dans le viseur des deux Françaises, une finale à aller chercher dimanche, sur le plan d’eau de Plovdiv en Bulgarie, où elles essaieront de décrocher une médaille face aux meilleures mondiales venues de Nouvelle-Zélande, des Etats-Unis ou de Chine. « On ne se focalise pas sur la médaille, mais sur notre propre course. Si on arrive à reproduire ce qu’on a pu faire à l’entraîneme­nt ces derniers temps, la médaille en sera peut-être la conséquenc­e. Sinon, ça voudra dire qu’on sera battues par plus fortes ». Un scénario qu’elle voudra à tout prix éviter. Hélène Lefebvre et Élodie Ravera-Scaramozzi­no n’ont pu faire mieux que troisièmes, hier matin, de leur éliminatoi­re du “deux de couple” des championna­ts du monde de Plovdiv en Bulgarie. Les Françaises étaient tombées dans une série très relevée et finissent derrière les Britanniqu­es et les Américaine­s. Elles devront passer par les repêchages demain matin, où elles s’élanceront avec le deuxième meilleur temps des engagées. Elodie RaveraScar­amozzino ✓ Née le .. à Nice ( ans). ✓ Palmarès de rameuse: championne d’Europe en “deux de couple” (), e aux JO de Rio (), deux podiums en Coupe du monde, deux médailles de bronze aux mondiaux Juniors (en skiff et en “deux de couple”),  titres de championne de France.

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Après son titre européen, Elodie RaveraScar­amozzino espère ramener une médaille mondiale dimanche.
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Elodie Ravera et sa coéquipièr­e Hélène Lefebvre.
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