Nice-Matin (Cannes)

Trois ans après sa mort des titres inédits de Richard Anthony édités

Sa dernière compagne a intégré un inédit dans une compilatio­n des plus grands succès du chanteur décédé il y a trois ans. Elle revient sur ses vingt-cinq ans de vie commune avec l’artiste

- ROBERT YVON ryvon@nicematin.fr

Le dimanche 19 avril 2015, Richard Anthony s’éteint à l’âge de 77 ans dans sa maison de Pégomas. Il avait longtemps vécu au Cap d’Antibes, à Cannes, à Cabris aussi. Le chanteur populaire aux plus de six cents titres est mort dans les bras de sa compagne, Élisabeth Toulis. Une femme qui l’a accompagné pendant plus de vingt-cinq ans et l’a aidé à relancer sa vie profession­nelle. Avant de mourir, Richard Anthony travaillai­t, en effet, sur la réalisatio­n d’un nouvel album, comprenant notamment la version française et inédite à ce jour du tube de R. Kelly : I Believe I Can Fly. Cette chanson mais aussi les plus grands succès de Richard Anthony, sortent enfin sur un DVD sur le label Marianne Mélodie. «Je ne voulais pas qu’il sombre dans l’oubli », dit Élisabeth Toulis pour justifier cette rétrospect­ive de la carrière de son défunt mari. C’est d’ailleurs l’une des rares fois qu’elle sort de l’ombre du chanteur, par amour pour ce dernier.

Pourquoi n’y avait-il plus de rééditions des titres de Richard Anthony depuis sa disparitio­n ?

Allez savoir. J’en étais malade. Je ne comprends pas pourquoi on ne le diffuse plus aujourd’hui à la radio. Je ne supportais pas cette idée alors j’ai voulu travailler sur ce DVD avec un grand réalisateu­r qui s’est chargé du reste. Michel Poulain, qui a déjà sorti beaucoup d’autres rétrospect­ives, m’a aidé à concrétise­r ce projet. Il a lui même réalisé le clip de la chanson inédite Avec toi je m’envole avec des photos personnell­es que je lui ai envoyées. On entend aussi Le rap pas innocent qu’il n’avait jamais publié. Richard devait enregistre­r un album de reprises américaine­s. Cette chanson, il l’a enregistré­e dans un studio à Bruxelles. Comme celle du rap d’ailleurs que lui a inspiré un voyage américain.

Quand vous l’avez rencontré en , vous connaissie­z ses chansons ?

Franchemen­t pas vraiment. À part ce qu’on entendait à la radio. Je ne suis devenue amoureuse et fan de Richard que beaucoup plus tard.

Rappelez-nous comment vous l’avez rencontré ?

J’ai remplacé une infirmière pour venir le soigner. Il venait de se faire très mal après avoir voulu visiter un bateau au salon nautique de Cannes, en septembre . La passerelle s’était écroulée. Il avait une plaie énorme à la jambe, une épaule disloquée et des côtes en miettes. Je suis allé chez lui pour le soigner, boulevard Alexandre-III, à Cannes. Un jour, il n’a pas aimé un de mes soins. Il me l’a dit. Je lui ai expliqué qu’il n’avait qu’à prendre quelqu’un

‘‘ d’autre. Je lui ai tenu tête. Puis il a craqué, parce que je lui manquais. Alors il est venu me chercher à Cabris où je vivais. Il est venu un soir alors que je dormais. Il a jeté des cailloux dans mes fenêtres pour me réveiller. Du coup j’ai appelé la police qui est venue. Lui a dit qu’il voulait être soigné par son infirmière et personne d’autre. Je l’ai soigné et demandé aux pompiers qui étaient là aussi de l’embarquer. Mais il est resté dans le jardin, près de la piscine, assis sur un banc. Un orage s’est abattu. Je l’ai fait rentrer dans la maison. Il s’est montré très gentleman. Puis il m’a fait une déclaratio­n d’amour. On ne s’est jamais marié, mais on s’est pacsé au bout de vingt ans de vie commune.

Où avez-vous vécu avec lui ?

À Cabris, à Cannes puis à Pégomas. Mais il avait aussi beaucoup d’attaches familiales au ” Cap d’Antibes. Il adorait cette région. Il adorait aussi manger l’été régulièrem­ent sur la plage Keller.

Comment avez-vous appris qu’il était gravement malade ?

Je savais qu’il était très mal en point depuis que je le connaissai­s. Il avait une vie de patachon et buvait beaucoup à l’époque lorsque je l’ai connu. J’ai réussi à le faire arrêter ou, du moins, à le laisser boire avec modération.

Comment avez-vous vécu la maladie de Richard Anthony ?

D’abord Richard a été opéré en  d’un polype cancéreux. Il n’y avait pas de métastase à l’époque. Mais il a eu des problèmes liés à son diabète. Il est tombé plusieurs fois dans le coma. Ensuite il a repris les tournées, les galas. Notamment Âge tendre et tête de bois. À Paris, il a eu un problème dans un hôtel qui avait climatisé une chambre en plein hiver. Le matin il est devenu aphone. Puis Richard est tombé en dépression, en . Sa voix partait constammen­t. Il ne la retrouvait plus. C’était terrible pour lui. On devait enregistre­r un nouvel album à cette époque avec des chansons inédites d’Yves Dessca. On en a plein les tiroirs.

Pourquoi êtes-vous en colère aujourd’hui contre le showbusine­ss ?

Parce qu’on ne l’entend plus jamais. Même lorsqu’il y a des émissions sur les années soixante. C’était pareil de son vivant. Je l’ai vu s’isoler dans sa chambre, avec les larmes aux yeux. Il n’y a pas que J’entends siffler le train dans ses succès. Il y a tellement d’autres de ses chansons qui sont merveilleu­ses. J’adore J’irai pleurer sous la pluie ,ou Poème d’amour par exemple. On a aussi dit qu’il n’avait plus de succès et qu’il était ruiné. C’est n’importe quoi. Je l’ai suivi dans ces tournées. Il n’aurait même pas été obligé de faire la tournée des années Age tendre et tête de bois pour vivre. Il avait des galas partout. Je l’ai vu chanter en Belgique devant   personnes. J’essayais de le suivre partout.

Comment a-t-il vécu ses derniers jours ?

Ce fut très difficile. Je l’ai eu à la maison pendant près de neuf mois tout seul. J’y ai cru jusqu’au bout. Il était dans le déni de la maladie. Je voulais qu’il sorte cet album. Il en avait besoin pour exister. Je le sortais tous les jours, parfois de Pégomas à la Siesta entre Antibes et Villeneuve-Loubet. Je ne voulais pas qu’il soit seul dans une chambre. Je suis allée pour lui jusqu’aux Voiles de Saint-Tropez. Parce qu’il adorait les bateaux. Je ne le descendais pas de la voiture. Mais cela lui changeait les idées. Je l’ai soigné jusqu’au bout. Il n’a jamais été dans le coma. Le jour de sa mort il a déjeuné comme d’habitude. A  heures il a pris son thé. Et dans la nuit du  avril, il est parti.

Pourquoi avoir tant attendu pour sortir ce DVD ?

C’est très difficile de sortir un enregistre­ment aujourd’hui. Je ne me mêle pas de la succession de Richard. Mais je veille à ses intérêts. Je défends sa mémoire. Il existe encore beaucoup de chansons inédites qui sont conservées. Peut-être qu’un jour ces chansons d’amour sortiront du coffre-fort. Chez moi, je n’ai rien. J’écoute Richard Anthony sur ma tablette grâce à Internet. Mais je n’ai plus rien à la maison.

Il a déjeuné, il a pris son thé et il est parti

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 ??  ?? Richard Anthony vivait depuis près de  ans avec Élisabeth Toulis qui veut aujourd’hui réhabilite­r la mémoire et l’oeuvre de son compagnon disparu en . (Photo archives Patrice Lapoirie)
Richard Anthony vivait depuis près de  ans avec Élisabeth Toulis qui veut aujourd’hui réhabilite­r la mémoire et l’oeuvre de son compagnon disparu en . (Photo archives Patrice Lapoirie)

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