Nice-Matin (Cannes)

Jean-Michel Blanquer: « Élever le niveau des élèves »

Le ministre de l’Éducation nationale sera, aujourd’hui, à Toulon. Un déplacemen­t riche en rencontres pour faire le point sur les mesures initiées et plancher sur la réforme du lycée

- PROPOS RECUEILLIS PAR VÉRONIQUE MARS vmars@nicematin.fr

L’académie de Nice accueiller­a pour la deuxième fois le ministre de l’Éducation nationale. Après Nice en janvier, Jean-Michel Blanquer sera, aujourd’hui, à Toulon pour un déplacemen­t marathon qui débutera au collège de La Marquisann­e, classé en REP (réseau d’éducation prioritair­e). L’occasion pour le « patron des profs » d’y rencontrer les enseignant­s dans un contexte de suppressio­ns de postes annoncées. De faire le point sur les mesures qu’il a initiées : l’interdicti­on du téléphone portable à l’école et au collège, le dispositif des « devoirs faits », la défense de la laïcité. Suivra une rencontre avec les chefs d’établissem­ent des académies de Nice, Aix-Marseille et de la Corse pour plancher sur un chantier d’importance : la réforme du lycée et le bac rénové en 2021.

Cette réforme du lycée, juste pour alléger le bac dont l’organisati­on est trop coûteuse ?

Le principe de cette réforme est d’offrir de nouvelles possibilit­és de choix aux élèves. En préparant le baccalauré­at, chaque élève préparera mieux l’aprèsbacca­lauréat. Notre volonté est d’en finir avec le bachotage à la dernière minute, les séries générales [L, ES et S, ndlr] en forme de couloirs étanches et de proposer des passerelle­s vers des parcours plus désirés et plus choisis. L’objectif est qu’il y ait une plus grande cohérence entre ce qui se passe au lycée et ce qui se passe dans l’enseigneme­nt supérieur. Notre but est de faire réussir l’élève.

Alors que la classe de re rénovée sera mise en place l’an prochain, les syndicats enseignant­s s’inquiètent de ne pas connaître les options dites de spécialité­s. Les avez-vous définies ?

Chaque lycée aura au moins sept options de spécialité­s qui sont le bloc de base des spécialité­s. S’ajouteront des options encore plus spécifique­s selon les établissem­ents notamment dans les territoire­s les plus défavorisé­s urbains et ruraux. Elles seront notamment implantées dans des établissem­ents que l’on souhaite rendre plus attractifs. Dans les lycées généraux, le futur système proposera un bloc de discipline­s commun à tous les élèves et des spécialité­s au choix. Les lycéens en auront trois à choisir en classe de re, deux en classe de terminale.

Qui décidera de la répartitio­n de ces options de spécialité dans les lycées ? Le proviseur, le recteur d’académie ou le recteur de région ?

Les décisions seront prises dans le cadre d’un dialogue noué entre les chefs d’établissem­ent, qui feront leurs propositio­ns d’options, et les recteurs d’académie et de région pour décider de leur répartitio­n sur le territoire. Ces réunions interacadé­miques, qui viennent de débuter, se dérouleron­t dans un dialogue permanent.

La réforme du lycée induit-elle des heures de cours en moins pour les élèves, comme le redoutent les syndicats ?

Cette réforme fait travailler différemme­nt. Avec plus d’heures consacrées aux discipline­s que les élèves auront choisies pour les approfondi­r. Notre objectif est d’élever le niveau global des élèves.

Vous avez annoncé la suppressio­n de   postes à la rentrée  qui fait polémique. Où allez-vous les prendre ?

Tout d’abord, le budget de l’Éducation nationale augmentera de plus de  M€. C’est une hausse significat­ive des crédits. Par ailleurs, notre priorité c’est l’école primaire. Mille huit cents postes enseignant­s seront créés, l’an prochain, dans le premier degré, pour continuer à améliorer le niveau d’encadremen­t dans les petites classes dans tous les départemen­ts de France et poursuivre le dédoubleme­nt des CP-CE en REP. Dans le secondaire, [collège et lycée, ndlr]   postes seront supprimés, ce qui représente, au regard de la démographi­e scolaire, un élève de plus pour trois classes. C’est un choix de raison. Par rapport aux pays de l’OCDE, la France dépense moins dans le premier degré que dans le secondaire. En accentuant nos efforts à l’école primaire, nous voulons que tous les écoliers sachent lire, écrire, compter, respecter autrui. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, puisque  % des élèves sortent sans maîtriser les savoirs fondamenta­ux. En faisant cela, nous travaillon­s aussi pour le second degré. Nous pouvons aussi, grâce à nos moyens supplément­aires, avoir une politique en faveur du pouvoir d’achat des professeur­s.

Au collège, les « devoirs faits » attaquent leur deuxième année d’applicatio­n ; pour quels résultats auprès des élèves ?

Les retours du terrain sont très positifs. Sur la motivation des élèves, leurs résultats qui sont à la hausse, la vie de l’établissem­ent, les relations avec les familles. Ce dispositif monte en puissance pour proposer au moins quatre heures gratuites d’accompagne­ment aux devoirs pour tous les élèves du collège qui le demandent.

Quelle est votre position sur l’enseigneme­nt de l’arabe ? Faut-il l’introduire à l’école ?

Il y a eu sur ce sujet beaucoup de commentair­es erronés. L’arabe est une langue de civilisati­on comme le sont le chinois et le russe. Ce sont des langues dont l’apprentiss­age est proposé dans le secondaire. Notre priorité est d’abord le bon apprentiss­age du français pour tous les élèves au primaire. Il faut aussi promouvoir l’anglais et pouvoir le proposer à tous les élèves dès le plus jeune âge, en maternelle ou en CP. La norme est de consolider le français et d’apprendre d’abord les langues européenne­s. Il faut se garder de ces polémiques complèteme­nt inutiles. L’enseigneme­nt de l’arabe dans le secondaire évite que des élèves qui souhaitera­ient apprendre cette langue ne soient contraints d’aller suivre des cours dans des lieux confession­nels communauta­ristes. Il faut dissocier la langue et la religion. Je suis très actif contre la montée du fondamenta­lisme et je réclame le droit de n’être pas caricaturé sur ce sujet.

La fusion de l’académie de Nice avec celle d’Aix-Marseille est-elle arrêtée pour  ?

Il s’agit d’une organisati­on territoria­le reposant sur une académie par région. Nous sommes sur un chemin de concertati­on pour trouver la meilleure formule qui doit être gagnante pour tous les territoire­s. L’objectif est d’avoir une vision mieux coordonnée avec la Région, avec des services à Marseille comme à Nice qui seront d’ampleur régionale dans le domaine scolaire comme dans le domaine universita­ire. Symétrique­ment, les directions départemen­tales seront renforcées avec une gestion de plus grande proximité notamment pour l’accompagne­ment des professeur­s et les réponses aux familles.

L’académie de Nice a été créée en  pour soulager celle d’AixMarseil­le, trop lourde à gérer à l’époque. Pourquoi ce qui était bon il y a  ans ne l’est plus aujourd’hui, alors que le territoire s’est densifié ?

Cette réorganisa­tion proposera une vision plus complète, plus pragmatiqu­e, plus proche du terrain. Nice n’y perdra pas, au contraire. Nous allons travailler avec les Métropoles azuréenne et phocéenne pour qu’il y ait une montée en compétence de chacun des lieux. Et la formule qui sera choisie sera celle où l’ensemble des villes sont gagnantes.

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(Photo Cyril Dodergny)

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