SIGNÉ ROSELYNE
La semaine de Roselyne Bachelot
Mardi
Emmanuel Macron et la ministre de la Santé Agnès Buzyn présentent un plan de transformation du système de santé. On ne peut que saluer la réaffirmation de ce que chacun sait déjà depuis belle lurette. Tout passera par la rénovation de la médecine de proximité grâce à un changement drastique des conditions d’installation, de fonctionnement et de rémunération ainsi que par la mise au régime de l’hôpital recentré sur ses vraies missions. Oui mais… depuis des décennies, les différents ministres de la Santé ont fait le même diagnostic et rencontré les mêmes difficultés puisqu’ils se sont tous et toutes heurtés à trois puissants lobbys. Le premier – très influent électoralement – est bien celui des élus locaux qui, à chaque fermeture d’un service désert ou dangereux, font défiler avec banderoles et fumigènes leurs administrés en leur faisant croire que la proximité est garante de la qualité des soins alors que ces élus ne font que défendre un pré carré d’influence politique. Ensuite, le lobby hospitalier qui hurle – à juste raison – contre l’engorgement des urgences ou des SAMU, mais crie comme une bête qu’on égorge chaque fois qu’on veut redimensionner un hôpital public asphyxié par l’hypertrophie. Enfin, en tête du cortège de l’immobilisme, on trouve les puissants syndicats médicaux. Ce sont eux qui ont bloqué ou retardé toutes les réformes indispensables, tels le dossier médical, la télé médecine ou les délégations de compétences depuis longtemps installés chez nos voisins. Il faut espérer qu’Agnès Buzyn recevra les soutiens politiques et les financements indispensables à la mise en oeuvre d’un plan ambitieux aux résultats qui ne seront pas engrangés dans l’immédiat. Espérons aussi que Macron n’aura pas la mauvaise idée de changer de ministre lors d’un prochain remaniement. C’est bien la
valse des ministres qui tue les réformes tant les nouveaux promus détestent mettre en oeuvre un plan qui ne porte pas leur nom… C’est ce qu’attendent, sans le dire, tous ceux qui ont intérêt à ce que rien ne bouge.
Mercredi
Je dois dire qu’il m’a bluffée le sieur Benalla. Franchement, après le déluge de feu qui est tombé sur la tête de ce jeune homme de ans, on aurait craint pour lui qu’il ne perde les pédales devant une assemblée de sénateurs à la démarche chafouine, bien décidés à se mettre incidemment au service de la vérité et principalement de leurs intérêts politiques. Il n’en a rien été et même les moins indulgents ont convenu qu’il avait, en cette audition devant une commission d’enquête parlementaire, fait preuve d’une maîtrise peu commune. Évidemment, cet avis ne vaut nullement quitus des fautes commises par lui ou ses donneurs d’ordre. Mais plusieurs choses choquaient dans cette audition. Certes le président et les membres de la commission d’enquête se sont bien gardés d’interroger
Monsieur Benalla sur la séquence qui fait l’objet de poursuites judiciaires à son encontre. Dont acte. Mais ils n’ont cessé de poser des questions outrepassant leurs prérogatives et contraires à la séparation des pouvoirs. Pourquoi l’interroger par exemple sur ses diplômes sinon pour sous-entendre que ne pas en avoir vous disqualifie ? Qu’apporte à l’enquête les détails demandés sur la procédure de son licenciement ? On pourrait multiplier les exemples qui cumulaient ainsi le voyeurisme et l’arrogance. Mais le sommet du mépris de classe a été atteint par les commentaires de certains sénateurs à la sortie de l’audition. Tout ce qui sépare la nomenklatura du peuple était là car bien évidemment, un gamin venu de la banlieue ne pouvait pas s’en tirer par ses propres qualités, mais parce que, comme un pantin décérébré, il était manipulé par un chef d’orchestre clandestin. Une chose est sûre, le « vieux monde » se porte mieux que jamais.
Vendredi
« L’affaire » Eric Zemmour-Hapsatou
Sy pourrait ne relever que du buzz médiatique dont raffolent certaines chaînes pour faire de l’audience. Elle dit en fait, bien autre chose. Résumons. Eric Zemmour fait actuellement la promotion de son dernier livre et toutes les chaînes de télé se l’arrachent car il est ce qu’elles appellent « un bon client ». Ce soir-là, ça se passait chez Thierry Ardisson. Une des chroniqueuses, Hapsatou Sy, voit ses parents accusés avec une grande agressivité par Eric Zemmour d’avoir refusé de s’intégrer en lui ayant donné ce prénom. Puis le chroniqueur indique qu’ils auraient mieux fait de l’appeler… Corinne. La production coupe la séquence au montage mais la jeune femme, choquée, décide de diffuser l’enregistrement caviardé. Je ne sais les suites qui seront données à ce clash par le groupe Bolloré ou par Hapsatou Sy. De nos jours, l’humiliation est devenue un ressort comique et une technique de débat. Mais le pire est bien qu’Hapsatou Sy soit la cible sur les réseaux sociaux, d’un incroyable déferlement de haine, de sexisme et de racisme. C’est cela la nouvelle doxa médiatique : les bourreaux plastronnent car ils font vendre et les victimes doivent s’aplatir, sauf à être accusées de manquer d’humour et d’intelligence. Pauvre de nous.
«Espérons que Macron n’aura pas la mauvaise idée de changer de ministre de la Santé lors d’un prochain remaniement. »